Émission du mercredi 6 février 2019
Le Pitch - Cinéma- Émissions culturelles
- 1 min 58 s
- tous publics
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LA FAVORITE de Yórgos Lánthimos
Avec Olivia Colman, Rachel Weisz et Emma Stone
Début du XVIIIe siècle. L’Angleterre et la France sont en guerre. Toutefois, à la cour, la mode est aux courses de canards et à la dégustation d’ananas. La reine Anne, à la santé fragile et au caractère instable, occupe le trône tandis que son amie Lady Sarah gouverne le pays à sa place.
• Meilleure actrice dans une comédie pour Olivia Colman aux Golden Globes 2019
• Coupe Volpi de la meilleure interprétation féminine pour Olivia Colman à la Mostra de Venise
« La Favorite » revient sur le destin de la reine Anne, dernière héritière de la lignée des Stuart. La souveraine la moins connue d'Angleterre n'a laissé aucun héritier malgré ses 17 grossesses. Unique descendante protestante de la lignée des Stuart, elle accède au trône alors que l'Angleterre traverse une période de mutations. Elle supervise une guerre contre la France, la première guerre considérée comme « moderne », ainsi que l’union de l’Angleterre et de l’Ecosse afin de constituer le Royaume-Uni. Sa constitution fragile et son caractère docile lui ont donné l'image d'une personne facilement manipulable, constamment entourée d'individus qui souhaitaient profiter de son pouvoir.
Le film est né avec une première ébauche de scénario conçue par Deborah Davis, qui a épluché des volumes entiers de correspondance entre la reine Anne et Lady Sarah Churchill et entre Abigail Masham et Robert Harley. La productrice Ceci Dempsey développe le projet durant vingt ans avant d'être rejoints en 2009 par le producteur Ed Guiney. Ce dernier et Dempsey découvrent Yorgos Lanthimos lors de la nomination aux Oscars de « Canine ». C'est ensuite le dramaturge et scénariste australien Tony McNamara qui est engagé par les producteurs pour réécrire le script en compagnie du réalisateur. Durant quatre ans, ils affinent les dialogues et développent les personnages.
Si « La Favorite » est un film historique, l'équipe a souhaité dès le début briser les codes du film en costumes. Ainsi, il était question d'injecter de l'irrévérence dans les comportements des personnages, loin de l'attitude guindée de beaucoup de films d'époque, comme l'explique le scénariste : « nous voulions montrer une sorte de cruauté ordinaire. La société était très rigide à l’époque et on se retrouvait vite coincé dans un statut, alors pour s’en sortir, il restait à chacun sa propre capacité à influencer les autres afin de se frayer un chemin ».
Quant aux acteurs, ils ont été encouragés à se détacher de la réalité historique et de leurs recherches pour livrer des performances plus contemporaines.
Le réalisateur revient sur le choix du casting : « J’ai toujours choisi mes acteurs en fonction de leur présence, leurs penchants naturels et ce que la caméra parvient à capter chez eux, même si on ne sait pas précisément ce que c’est. J’ai rapidement senti qu’Olivia devait être notre reine. » Tony McNamara remarque que le rôle de Anne est captivant « car elle n’est pas ce qu’elle semble être. Si elle apparaît comme invalide et même un peu simple d’esprit au début, on s’aperçoit bientôt qu’elle est très consciente de son pouvoir. Elle choisit juste de l’utiliser d’une manière erratique, ce qui façonne un personnage très intriguant. »
Olivia Colman a aussi savouré l’opportunité de travailler à nouveau avec Yorgos Lanthimos. « Il est véritablement brillant et on peut lui faire entièrement confiance. Son esprit est si particulier qu’on ne peut jamais vraiment être en relâche, on ne sait jamais où il va nous emmener. Il tourne à partir d’angles et de perspectives que personne d’autre n’utilise, et c’est très beau. J’adore apprendre et travailler avec Yorgos s’apparente toujours à une grande phase d’apprentissage. »
Rachel Weisz interprète Sarah pour sa seconde collaboration avec Yorgos Lanthimos après « The lobster ».« C’était un choix inspiré. Rachel apporte à la fois autorité et sex-appeal à Sarah. Elle en donne une image impérieuse, parfois à la limite de l’antipathie. » note Ceci Dempsey. « L’univers qu’il crée est toujours unique, propre à sa sensibilité, personne ne pourrait imiter ça. Du point de vue du ton, il s’agit clairement d’une création de Yorgos ; la manière dont il la développe est incroyable et mystérieuse. » rapporte l’actrice.
Pour incarner Abigail, c’est Emma Stone qui a été choisi. Tout comme Anne et Sarah, Abigail est faite de contrastes. Son pragmatisme calme et avisé, fruit d’une vie difficile, se mélange à sa capacité de charmer. Emma Stone révèle les multiples facettes de son personnage, sous le regard de Yorgos Lanthimos. « J’ai toujours beaucoup apprécié Emma. Dès notre rencontre, je me suis aperçu qu’elle était très intelligente et qu’elle s’impliquait dans son personnage », raconte Yorgos Lanthimos. C’est la façon dont Abigail suit toutes les règles sociales puis les transgresse qui a le plus séduit Emma Stone.
« J’adore la manière dont Abigail se découvre petit à petit. Elle a beaucoup d’assurance, c’est une vraie survivante, » commente-t-elle. L’actrice se dit également très intéressée par le trio de femmes que son personnage vient compléter. « Le fait que trois personnages féminins très bien développés soient au centre de ce récit en fait un cas rare parmi les scénarios actuels. Elles ont toutes leurs défauts, elles sont hilarantes et complexes, j’adore ça. C’est simplement représentatif de la vraie vie. » relève-t-elle.
MY BEAUTIFUL BOY de Felix Van Groeningen
Avec Steve Carell, Timothée Chalamet et Maura Tierney
Ce film fait l’objet de l’avertissement suivant : « La description du parcours d’un jeune toxicomane dont le père s’emploie à le sauver de la dépendance peut perturber un jeune public. »
Pour David Sheff, la vie de son fils, Nicolas, un jeune homme billant, sportif, à l’esprit vif et cultivé, était déjà toute tracée : à ses 18 ans, Nic était promis à une prestigieuse carrière universitaire. Mais le monde de David s’effondre lorsqu’il réalise que Nic a commencé à toucher à la drogue en secret dès ses 12 ans. De consommateur occasionnel, Nic est devenu accro à la méthamphétamine et plus rien ne semble possible pour le sortir de sa dépendance.
Réalisant que son fils et devenu avec le temps un parfait étranger, David décide de tout faire pour le sauver. Se confrontant à ses propres limites mais aussi celles de sa famille.
« My beautiful boy » est adapté des mémoires « Beautiful Boy : A Father's Journey Through His Son's Addiction » de David Sheff et « Tweak : Growing Up on Methamphetamines » de Nic Sheff.
En 2005, David Sheff a écrit un article pour le New York Times Magazine. Il y racontait avec une sincérité poignante le combat de son fils, Nic Sheff, contre l’addiction aux drogues comme la méthamphétamine, et ses propres efforts pour tenter de sauver sa famille. Un calvaire qui a duré près de dix ans. Deux ans plus tard, le producteur Jeremy Kleiner, a découvert que David Sheff avait écrit un livre sur les dix années de combat de son fils intitulé « Beautiful Boy », tandis que Nic racontait ces mêmes années dans sa propre autobiographie, « Tweak ». Publiés simultanément, ces deux récits dressent le portrait d’une famille dans la tourmente. Après les avoir partagés avec ses partenaires, les producteurs Dede Gardneret Brad Pitt, Jeremy Kleiner leur a soumis une idée singulière : associer ces ouvrages en un film encore plus éloquent.
Le réalisateur belge revient sur ce qui l’a poussé à réaliser le film « J’avais déjà envisagé de faire un film en anglais par le passé, mais aucune histoire ne m’avait ému comme celle des Sheff. Les relations familiales, l’illusion de contrôle et le passage du temps sont des thèmes que j’avais déjà explorés dans mes précédents films. J’avais également évoqué le sujet de la drogue, mais l’intensité brute, bouleversante, de l’histoire des Sheff – tout comme la manière dont ils la racontaient –, m’a secoué. David, Nic et leur famille éprouvent un amour inconditionnel les uns pour les autres, mais ils ont dû accepter le fait qu’il n’existe pas de remède miracle contre l’addiction et qu’il s’agit d’un combat parfaitement irrationnel. J’étais assez intimidé à l’idée de raconter leur histoire, mais cela me semblait impératif et nécessaire. Je n’imaginais pas un instant l’incroyable aventure que cela allait être. »
« My beautiful boy » n'est pas l’histoire d’une seule personne - Nic et David jouent en effet un rôle aussi important l’un que l’autre dans le déroulé des événements. Felix Van Groeningen précise : « Les films qui traitent de l’addiction racontent souvent l’histoire de toxicomanes qui sortent de cure de désintoxication et tentent de reconstruire leur vie, ou bien de leur combat jalonné de hauts et de bas. Mais je n’avais encore jamais vu un film dans lequel une famille tout entière est confrontée à cette épreuve. C’est un sujet très difficile auquel les personnages opposent cependant un profond amour de la vie qui leur procure aussi de grandes joies. » Par ailleurs, le film détrône aussi le mythe selon lequel l’addiction serait corrélée à la pauvreté et à la précarité. La productrice Dede Gardner commente à ce sujet : « Il s’agit d’un phénomène qui touche tout le monde sans distinction de revenus, et sans lien avec l’amour que l’on reçoit ou notre niveau d’éducation. Je ne connais personne qui ne soit pas affecté de près ou de loin par le sujet. La raison pour laquelle il nous est si difficile de voir tomber dans la drogue ce jeune homme issu d’une famille aisée et pour qui ses proches sont prêts à tout, c’est que cela va à l’encontre de nos idées toutes faites sur l’addiction. Ça a été notre point de départ. »
Dès la phase de développement du projet, les cinéastes ont pris conscience que l’un des plus grands défis consisterait à trouver des acteurs dotés d’une intensité équivalente pour interpréter les rôles principaux du film. Ils ont donc fait appel à Timothée Chalamet et Steve Carell. Timothée Chalamet incarne Nic. La productrice déclare : « Timothée est un jeune homme extraordinaire et incroyablement talentueux. C’est également une vieille âme, il a vécu beaucoup de choses malgré son jeune âge. Et je pense que c’est aussi vrai de Nic. »
Felix van Groeningen se souvient de son audition : « Face à Steve, Timothée a été d’une justesse absolue. Lorsqu’ils ont eu fini leur lecture, il ne subsistait pas l’ombre d’un doute dans mon esprit : il avait la capacité d’incarner cet adorable adolescent proche de son père, mais également son double diabolique sous l’emprise de la drogue. Sur le plan émotionnel, on lit en Timothée comme dans un livre ouvert. Il se met à nu et il est tellement présent et vrai qu’il est impossible de ne pas s’attacher à lui. » L’acteur confie que sa plus grande peur était que les Sheff voient le film et ne le trouvent pas à la hauteur. Mais à en croire David Sheff, c’est tout le contraire qui s’est produit : « C’est très étrange de le voir dans le rôle tant son apparence et sa manière de se déplacer rappellent celles de Nic à cette période. Au lieu de s’asseoir normalement dans le canapé, il sautait par-dessus le dossier exactement comme Nic avait l’habitude de le faire. »
David Sheff est quant à lui incarné par Steve Carell. L’acteur confie avoir hésité avant d’accepter le rôle. Il explique : « Ma plus grande peur était que le film aborde le thème de l’addiction de manière très hollywoodienne et qu’il ne raconte pas vraiment les faits avec sincérité. Mais le scénario m’a fait l’effet d’une claque : il n’y avait ni héros ni méchant, simplement la vie telle que nous la connaissons. »
Steve Carell appréhendait un peu sa rencontre avec David Sheff en amont du tournage, craignant qu’une gêne ne s’installe entre eux. L’acteur explique : « Je ne voulais pas lui donner l’impression qu’il était une sorte de projet scientifique en le bombardant de questions, mais en même temps je tenais à comprendre qui il était et ce qu’il avait traversé. De l’extérieur, les Sheff semblaient être une famille qui, sans être parfaite, était cependant très heureuse et dont tous les membres étaient bien intentionnés, y compris Nic. »
Nic Sheff, qui continue à écrire et apporte son soutien aux familles confrontées à l’addiction, confie que malgré le fait que le film soit fidèle à son récit et à celui de son père, il lui a permis de poser un regard nouveau sur sa propre expérience. Il explique : « Le film m’a permis de revivre mon passé et de découvrir certains évènements sous un jour inédit. Plan B, Amazon et Felix nous ont permis, à ma famille et à moi, de mesurer le chemin parcouru. Au-delà de son caractère artistique, il m’a rappelé combien j’avais de la chance d’être en vie et en bonne santé. »
Il ajoute : « J’ai été surpris par la justesse et le réalisme du film. Il ne met pas en scène des gens qui veulent se droguer parce que c’est ‘fun’. C’est un acte engendré par la souffrance et je pense que c’est important de le montrer. J’espère que les spectateurs comprendront les mécanismes qui m’ont amené, moi et beaucoup d’autres, à consommer de la drogue. J’espère aussi que les toxicomanes prendront conscience qu’ils ne sont pas seuls et qu’on peut s’en sortir. »
** BONUS **
KABULLYWOOD de Louis Meunier
Avec Roya Heydari, Omid Rawendah et Ghulam Reza Rajabi
À Kaboul en Afghanistan, quatre étudiants assoiffés de vie décident d’accomplir un projet audacieux : rénover un cinéma abandonné, qui a miraculeusement survécu à 30 ans de guerre. Comme un acte de résistance contre le fondamentalisme des talibans, ils vont aller au bout de leur rêve pour la liberté, la culture, le cinéma…
Le réalisateur Louis Meunier a posé le pied en Afghanistan pour la première fois en mars 2002. Un contrat d’humanitaire en poche, il venait participer à l’effort de reconstruction après la chute du régime taliban. « À cette époque, les Afghans étaient optimistes ; c’était l’espoir du retour à la paix après 25 années d’invasion, de guerre civile et d’oppression. Une liberté d’expression nouvelle prenait forme et se manifestait par l’apparition d’une scène culturelle jeune et dynamique composée de réalisateurs, de comédiens, de musiciens, de peintres... Ces artistes devenaient l’exutoire d’une société emprise trop longtemps dans des normes conservatrices. Inspirés par le cinéma et la musique indienne, la culture iranienne, les arts de la rue et le hip-hop occidental, ils créaient une identité afghane originale, à mi-chemin entre l’Orient et l’Occident… » confie le cinéaste.
Parti au départ pour six mois, Louis Meunier est resté dix ans en Afghanistan. « Comme les Afghans autour de moi, j’ai été optimiste puis j’ai assisté, tristement, à la détérioration progressive de la situation. Avec ‘Kabullywood’, j’ai voulu témoigner de cette parenthèse pleine d’espoirs et porter un message : quand la religion est utilisée comme prétexte pour s’attaquer à la liberté d’expression et faire table rase du passé, c’est toute la société qui est en danger. J’ai voulu aussi montrer un visage méconnu de l’Afghanistan, loin de la trilogie simpliste taliban / opium / burqa, en rendant hommage à la richesse de l’héritage culturel du pays : la musique, la peinture, la poésie et surtout le cinéma, à travers une intrigue pleine d’action et d’énergie, qui s’inspire de l’essence de Kabullywood – le cinéma populaire afghan des années 1970 / 1980. »
Le décor principal du film est une salle de cinéma à l’abandon qui était autrefois la plus grande et la plus belle de Kaboul - une version afghane du Cinema Paradiso, avec ses projecteurs au charbon, ses fauteuils en velours, son grand balcon, son rideau doré. « Nous l’avons rénovée au cours du tournage dans l’espoir d’en faire, à nouveau, un lieu culturel. Tragiquement, la fiction a rejoint la réalité car les péripéties imaginées dans le film se sont réalisées sur le plateau du tournage : nous avons été menacés par des hommes en armes, notre maison a été criblée de balles, nous avons failli mourir dans un incendie et une partie de l’équipe a été blessée dans un attentat. Pour toutes ces raisons, les portes du cinéma sont malheureusement restées fermées à l’issue de la production. Mon seul soulagement est d’avoir pu mener à son terme la réalisation et la production de ‘Kabullywood’. À une époque où la culture et la liberté d’expression sont mises à mal - à Kaboul et ailleurs - ce film revêt pour moi une valeur symbolique particulière », relate Louis Meunier.