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Le Pitch - CinémaÉmission du mardi 20 novembre 2018
Émissions culturelles
2 min 15 s
Disponible jusqu'au 18/01/2038
LES BONNES INTENTIONS de Gilles Legrand Avec Agnès Jaoui et Alban Ivanov Une quinquagénaire surinvestie dans l'humanitaire est mise en concurrence dans le centre social où elle travaille. Elle va alors embarquer ses élèves en cours d'alphabétisation, avec l'aide d'un moniteur passablement foireux, sur le hasardeux chemin du code de la route. Gilles Legrand et le producteur Frédéric Brillion sont allés voir une pièce de Leonore Confino, « Le Poisson belge », car ils apprécient l’écriture saillante de cette auteure. Les deux hommes voulaient alors lui proposer d’écrire un scénario sur l’engagement social ou humanitaire, dans lequel évoluent souvent des gens pleins de bonne volonté, mais avec peu ou pas de formation et souvent peu de moyens. Le réalisateur se rappelle : « Dit comme ça, il y a matière à faire du cinéma ! Nous lui avons présenté une amie qui donne des cours d’alphabétisation. Je lui avais aussi fait part de mon plaisir d’entendre la langue française massacrée par des étrangers... et aussi d’un projet abandonné de comédie autour d’une auto-école. Nous avons déposé ces idées entre les mains de Léonore, qui est revenue avec une structure de scénario, nourrie aussi de son expérience personnelle, car sa mère a, je crois, beaucoup œuvré dans le social. C’était donc une grande salade de fruits, composée de différents vécus, qui nous a menés à ce portrait de femme. À la lecture de cette première structure écrite par Léonore, j’ai eu envie de réaliser ce film moi-même. Il y a eu ensuite beaucoup d’allers et retours entre elle et moi pour finaliser le scénario, mais la trame initiale revient à Léonore. » Gilles Legrand ne voulait pas réaliser un drame social. Pour que le spectateur puisse rire des situations dépeintes dans le scénario des « Bonnes intentions », il a fallu jouer avec les clichés et rendre les personnages attachants. Le metteur en scène précise : « Si j’avais engagé des acteurs reconnus pour jouer cette bande d’illettrés, nous aurions fabriqué des clichés. Là, j’ai choisi des inconnus qui n’avaient presque aucune expérience du jeu. Par exemple, Roméo Hustiac, qui joue Radu, est un vrai Rom, qui ne savait ni lire ni écrire, et qui vivait sous un pont à Marseille avec sa famille. Je ne pouvais évidemment pas m’amuser à faire une caricature de son personnage ! Mais je voulais aussi tenter de faire rire. Donc oui, nous étions sur un fil. Le film n’épargne personne, ni ceux qui donnent ni ceux qui reçoivent : Isabelle, sa famille passive ou les ‘apprenants’, comme on dit dans le social. » Pour le rôle d’Isabelle, le choix s’est porté sur Agnès Jaoui. Le réalisateur explique : « Agnès est l’actrice idéale pour ce rôle. Elle a cette image de femme généreuse, engagée, avec des idées progressistes, tout en ayant la capacité de se moquer un peu d’elle-même. Elle a été très bonne joueuse – elle a eu parfois du mal avec certains dialogues très acides, mais elle a de l’audace et de l’autodérision. Elle accepte de ne pas forcément être mise en valeur. J’ai beaucoup de reconnaissance pour ce qu’elle a fait dans ce film. » La comédienne revient sur ce qui l’a touché dans le scénario : « J’ai été immédiatement séduite par le personnage d’Isabelle et par le sujet, fort et engagé, des ‘Bonnes Intentions’. Je suis très sensible à l’écriture de Léonore Confino, dont j’avais joué au théâtre ‘Les Uns sur les autres’. Je l’ai suivie dans ses différents projets. Quelque chose me touche dans sa façon d’aborder et de mettre en place les situations. Je trouve qu’elle est très honnête dans son écriture, elle n’essaie pas de plaire, ne cède ni à la mode ni à une facilité de penser. » Concernant les autres comédiens, il y a Tim Seyfi, qui joue le mari d’Isabelle. Acteur turc, qui vit à Munich. Il a fait des études d’interprète et parle plusieurs langues, dont le français. Gilles Legrand se souvient à son sujet : « J’avais du mal à trouver un acteur de l’Est pétillant pour jouer le mari d’Isabelle. Il fallait qu’il soit plus jeune qu’elle, comme le veut le scénario, puisqu’on doit imaginer qu’Isabelle l’a rencontré jeune homme alors qu’elle faisait de l’humanitaire en Bosnie. Tim a un charme certain. Son côté Sean Penn me plaisait. » Alban Ivanov incarne une fois de plus avec brio un loser magnifique. « Je pense que ce comédien ira loin. Il a la force d’un Jacques Villeret moderne. Son potentiel comique est énorme, et c’est surtout son humanité qui le distingue. Il peut être très émouvant. En outre, c’est un homme adorable, fin et généreux, avec qui il est très agréable de travailler », note Gilles Legrand. Le réalisateur estime que le cinéma peut éveiller et ouvrir les consciences : « Quand j’étais enfant et que je sortais d’un film, les héros s’imprimaient en moi. Je pense que cela fonctionne aussi à l’âge adulte, quand on arrive à entrer en empathie avec des personnages très humains. J’espère que ‘Les Bonnes Intentions’ donnent à voir des personnages de ce type et qu’il donnera espoir dans le fait que le monde peut évoluer dans le bon sens. Car notre Isabelle, malgré tous ses défauts, parvient à faire bouger les lignes. Je souhaite qu’elle sache inspirer les spectateurs. » AMANDA de Mikhaël Hers Avec Vincent Lacoste, Isaure Multrier et Stacy Martin Paris, de nos jours. David, 24 ans, vit au présent. Il jongle entre différents petits boulots et recule, pour un temps encore, l’heure des choix plus engageants. Le cours tranquille des choses vole en éclats quand sa sœur aînée meurt brutalement. Il se retrouve alors en charge de sa nièce de sept ans, Amanda. Mikhaël Hers a déjà abordé le thème du deuil dans son précédent film. Dans « Amanda » il le traite de façon plus concrète avec cette nièce que David doit prendre en charge après le décès de sa mère : « Dans mes précédents films, l’inspiration venait plutôt par un biais rétrospectif et mélancolique, qui me permettait de réinvestir une époque ou des lieux. Pour ‘Amanda’, le point de départ était l’envie de parler du Paris d’aujourd’hui et de capturer quelque chose de la fragilité, de la fébrilité et de la violence de l’époque. ‘Amanda’ est donc effectivement plus inscrit dans le présent et le quotidien que mes précédents films », analyse le metteur en scène. Le réalisateur a fait le choix d’inventer un attentat dans le bois de Vincennes comme point de départ de son film, événement tragique qui va chambouler la vie de ses protagonistes. « J’aurais trouvé indécent d’inventer une victime fictive pour un événement terriblement réel qui a fauché tant de vies et qui appartient désormais à l’imaginaire collectif… C’est malheureusement plausible que cet attentat survienne lors de ce pique-nique dans un bois, mais en même temps ce bois est moins identifiable que certaines grandes artères parisiennes ou que le Louvre par exemple. Je pense que le film ne pouvait pas faire l’économie de montrer les images de l'attentat, cela aurait été une fausse pudeur. ‘Amanda’ n’est pas un film sur les attentats ni sur le terrorisme islamiste, mais il me semblait impossible qu’ils ne soient pas filmés ni nommés frontalement (lors de la scène du café avec Raja). Il fallait juste trouver la manière et le moment. Lors du 13 novembre, on a été saturés d’images, toujours les mêmes, qui revenaient en boucle. Des images médiatiques qui créaient du vide plutôt qu’un imaginaire qui nous aide à penser l’événement. A mon humble mesure, il fallait que le film prenne en charge ces images manquantes. » Le héros du film, David, est interprété par Vincent Lacoste. « Dans la première version du scénario, le personnage était plus vieux mais en discutant avec Pierre Guyard, mon producteur, on s’est dit que la vérité du personnage résidait dans cet âge précis, très jeune adulte, où l’on vient tout juste de dépasser la vingtaine... Et dans cette tranche d’âge, Vincent Lacoste était l’évidence. Son visage, sa façon de parler, sa douceur, sa grâce, sa beauté un peu gauche, infiniment touchante... J’ai eu un plaisir immense à travailler avec lui. Il est époustouflant et s’est immiscé dans le projet avec beaucoup de travail et une grande justesse », affirme le réalisateur. C’est la première fois que Vincent Lacoste joue un rôle tout en émotion. Il s’explique : « C’était aussi pour ça que j’avais envie d’y aller : parce que je n’avais jamais fait ce genre de film et de rôle. Mais ça me faisait aussi très peur. Avant le tournage, je ne faisais que dire à Mikhaël : ‘Je ne te promets rien, je n’ai jamais fait ça !’ Et lui, ça le faisait rire : ‘T’inquiète pas, ça va bien se passer. Et si un jour tu n’y arrives pas, on prendra le temps de parler, d’aller chercher la bonne émotion pour la scène.’ C’est rassurant un réalisateur en face de vous qui vous fait comprendre qu’on a le temps et qu’il est à vos côtés, pas uniquement derrière sa caméra à vous regarder… Avec Mikhaël, je me suis vraiment senti accompagné. » La révélation Isaure Multrier joue Amanda. « Isaure n’avait encore jamais joué. C’est la directrice de casting qui l’a remarquée dans la rue. J’avais ce fantasme d’une petite fille très juvénile et poupon, mais avec un petit côté adulte. De par ce qui lui arrive dans le film bien sûr, mais aussi parce que je trouve que les enfants qui grandissent avec un seul de leurs parents ont une forme de maturité. Je me racontais donc qu’Amanda avait une élocution et une capacité de formulation de sa pensée peut-être un peu plus développées qu‘une autre petite fille de sept ans », confie Mikhaël Hers. Vincent Lacoste évoque sa relation avec sa jeune partenaire, Isaure Multrier. « On s’est un peu vus avant le tournage mais on a vraiment appris à se connaître au fur et à mesure du tournage. Au départ, comme mon personnage, je ne savais pas du tout comment me comporter avec elle. Je n’ai pas de nièces ou de jeunes enfants dans mon entourage, je me demandais comment lui parler, ce qu’elle pensait, à quel niveau elle comprenait qu’on était en train de jouer… Alors j’essayais juste d’être gentil et délicat avec elle, que ce soit très agréable pour elle de faire ce film et qu’elle prenne ce métier pour ce qu’il est. Les enfants jouent de manière très instinctive, il faut savoir être à leur écoute. Moi de toute façon, je travaille toujours ainsi. Je n’ai jamais pris de cours et quand je joue, je ne fais que réagir à la personne qui est en face de moi. » BONUS AFTER MY DEATH de Kim Ui-seok Avec Young-hwa Seo, Go Won-Hee et Lee Tae-kyoung Ce film fait l’objet de l’avertissement suivant : « Certaines scènes sont susceptibles de heurter la sensibilité du public ». La disparition soudaine d’une élève d’un lycée pour jeunes filles précipite la communauté scolaire dans le chaos. Famille de la victime, enseignants et élèves cherchent à fuir toute responsabilité, l’image de l’école étant en jeu. Pourtant, sans indice ni corps, on suspecte un suicide. Young-hee, l’une de ses camarades d’école, dernière à l’avoir vue vivante, est suspectée par tout le monde, à commencer par la mère de la victime. Bouc-émissaire idéal, Young-hee va chercher à n’importe quel prix à échapper à la spirale de persécutions qui l’accablent. Mais quel secret, quel pacte peut-elle bien cacher… ? Prix du Meilleur Film et Prix d’interprétation pour Jeon Yeo-bin dans la section « New Currents » au Busan International Film Festival 2017. Le réalisateur revient sur la genèse du projet : « Un jour, j’ai perdu un de mes meilleurs amis. Ses affaires avaient été retrouvées sur le pont de la rivière Han. Il a fallu environ un mois pour retrouver son corps. J’ai essayé de traduire ce que j’ai ressenti à ce moment-là. Le suicide est tellement répandu en Corée du Sud qu’il est devenu chose banale dans la tête des gens. On n’en perçoit plus la gravité. On a d’ailleurs commencé par me dire que c’était trop insignifiant pour en faire un sujet de film. Ça m’a tellement perturbé que je m’y suis accroché, ce qui m’a permis d’approfondir mon idée. J’ai essayé de représenter les différentes phases qui succèdent à la mort d’un proche au sein d’une petite communauté. » Le film dépeint un système éducatif pyramidal très brutal avec des phénomènes de harcèlement à tous les niveaux : « Nous vivons dans une société qui ne cesse de nous mettre en concurrence les uns avec les autres. Si vous ne réussissez pas, ou si vous êtes différent, vous serez rejeté du système et votre vie sera considérée comme une faute morale. La pression est forte, et elle créée des rivalités. On nous fait croire qu’on est tous égaux, mais il existe une hiérarchie sociale très puissante. Chacun essaie de gravir les échelons de cette hiérarchie, même s’il fait semblant qu’elle n’existe pas. Cette pression psychologique conduit les gens à éprouver une culpabilité masochiste. Le suicide est perçu comme une délivrance, avec la connotation érotique que cela suppose. » Le film ne désigne jamais de coupables et n’explicite pas la cause du suicide, un choix délibéré de la part du réalisateur : « La véritable cause de la mort devait rester un mystère, ce sont les réactions de l’entourage qui m’intéressaient. Je souhaitais également que les différentes raisons invoquées par les uns et les autres demeurent probables, que le doute plane jusqu’au bout. Le suicide est un élément déclencheur. Il joue le rôle de révélateur d’un malaise social plus profond. » Kim Ui-seok a choisi de commencer son film comme une enquête policière en reprenant certains codes du polar coréen alors qu’il n’en est pas vraiment un. Il s’explique : « Il me semble que le genre policier, le film d’enquête était particulièrement approprié pour lancer le récit. Lorsqu’on est confrontés à quelque chose de mystérieux, d’irrationnel, on cherche toujours à en percer le mystère, à trouver des explications, comme si c’était possible. Si on persévère, on finit par s’enliser de manière désespérée, les questions amenant toujours d’autres questions. C’est pourquoi je finis par abandonner l’aspect policier pour me concentrer ensuite sur le drame, sur le thriller sociologique si l’on peut dire. » YOMEDDINE de A. B. Shawky Avec Rady Gamal et Ahmed Abdelhafiz Beshay, lépreux aujourd’hui guéri, n’avait jamais quitté depuis l’enfance sa léproserie, dans le désert égyptien. Après la disparition de son épouse, il décide pour la première fois de partir à la recherche de ses racines, ses pauvres possessions entassées sur une charrette tirée par son âne.Vite rejoint par un orphelin nubien qu’il a pris sous son aile, il va traverser l’Egypte et affronter ainsi le Monde avec ses maux et ses instants de grâce dans la quête d’une famille, d’un foyer, d’un peu d’humanité… Le réalisateur revient sur sa note d’intention : « Avec ‘Yomeddine’, je voulais raconter l'histoire du mauvais cheval, l'outsider, le ‘moins-que-rien’ qui grandit pour comprendre les rouages d'un monde qui refuse de l'accepter. L'idée m’est venue alors que je tournais un court métrage documentaire (‘The colony’), relatant le parcours des résidents de la léproserie d’Abu Zaabal, au nord du Caire. Je me suis rendu compte que la lèpre était davantage un problème social que médical, et que leur défiguration avait contraint les résidents à s’isoler du reste du monde. Le choix de confier le rôle de Beshay à un non-acteur lépreux est venu de la volonté de donner au personnage, tout comme à l'homme, la possibilité d'être défini par son humanité et non par sa maladie. L'idée est de ne pas détourner le regard des exclus que l’on croise dans le film et de voir au-delà de leur apparence pour se concentrer sur leur personnage. Malgré son fond a priori pesant, ‘Yomeddine’ est traité avec légèreté, mettant l’accent sur le courage de Beshay face à la misère. » Il revient sur l’écriture du scénario et les difficultés qu’il a rencontré pour produire le film : « Je voulais que ‘Yomeddine’ soit mon premier film : j’avais les bons contacts, l’histoire dans ma tête. Beaucoup d’éléments viennent directement de ce que j’ai entendu quand j’ai tourné ce court-métrage : celui-ci était centré sur une femme qui travaille dans la décharge, en récupérant des objets et en les revendant. J’ai longtemps pensé qu’elle serait à nouveau le personnage principal de Yomeddine, mais entretemps elle est tombée malade et aujourd’hui elle ne peut plus se déplacer. Sur le tournage du court, j’avais aussi rencontré un orphelin nubien, qui traînait autour de notre petite équipe, qui nous observait. Obama s’inspire de lui : il n’a pas de famille, et quand il se passe quelque chose d’intéressant, il s’incruste ! J’ai écrit le scénario en 2013/14, je suis rentré en Égypte pour chercher des financements. Trouver de l’argent n’a pas été facile : j’étais débutant, pour un film au sujet potentiellement dérangeant, sans star. Nous avons trouvé quelques partenaires et mis pas mal d’argent personnel. Finalement, le tournage a commencé en septembre 2015 pour s’achever en janvier 2016. Nous n’avions plus d’argent pour la post-production. Les gens qu’on approchait nous disaient : ‘Finissez le film, on verra après si on investit’. C’était d’ailleurs souvent les mêmes qui nous avaient dit à l’origine : ‘Tournez le film, on verra après…‘ Logiquement, une fois le montage fini, ils nous ont dit : ‘Faites des projections publiques, et selon les réactions du public, on vous aidera ou pas’. En 2017, j’ai été consultant sur la série ‘The looming tower’, ils cherchaient quelqu’un qui parlait arabe, qui pouvait les renseigner sur la langue, la culture, etc. Cela m’a permis de réunir un peu d’argent pour continuer. » La réussite du film doit beaucoup au charisme très singulier de Rady Gamal, qui tient le rôle principal. « J’ai eu beaucoup de chance. À la léproserie, j’avais demandé à rencontrer des gens intéressés à jouer dans le film et Rady a été le premier que j’ai reçu. Je savais que c’était prendre un gros risque de choisir la première personne auditionnée, on m’avait dit : ‘Ne fais surtout pas ça !’, mais honnêtement, il a été impressionnant ! Il possédait exactement l’énergie du film. J’ai vu quand même d’autres candidats, mais j’ai toujours pensé que ce serait lui : il comprenait bien l’histoire, il avait un magnétisme très particulier. Au sein de la colonie, Rady tient une petite cafétéria, il propose du café, du thé, il vend des cigarettes. Son histoire personnelle est un peu différente de celle de son personnage : on l’a déposé ici quand il était enfant, et il a failli mourir parce qu’on ne l’avait pas soigné. Il a été finalement guéri par les religieuses qui s’occupent d’Abu Zaabal. Il a encore de la famille, avec laquelle il s’entend bien : son père est mort, mais sa mère et ses soeurs habitent dans le sud du pays et il leur rend visite régulièrement. Il m’a raconté qu’il n’avait pu se décider à habiter avec elles, parce qu’il n’aurait pas supporté le regard des gens. Il ne veut pas qu’on le traite comme un handicapé. » Le réalisateur revient sur la direction d’acteurs : « On a passé quatre mois ensemble, c’était un processus très lent, je voulais qu’il rencontre le reste de l’équipe, qu’il ne soit ni choqué, ni bouleversé. Il est venu plusieurs fois chez moi au Caire, on s’est parlé de nos vies, de nos enfances, et puis je lui ai lu le scénario. Rady ne sait pas lire. Et peu à peu, je lui ai fait faire des petits exercices d’acteurs. Rady est quelqu’un qui ne s’apitoie jamais sur son sort, et je voulais que le film soit à son image. Je ne voulais pas d’un film doloriste, pesant, je voulais un ‘feel good movie’.Le processus a été à peu près le même avec le gamin qui joue Obama, Ahmed Abdelhafiz, qui, bien sûr, n’est pas acteur, lui non plus. J’avais peur que ça ne colle pas entre lui et Rady, mais je ne voulais pas non plus qu’ils se rencontrent trop tôt, je voulais que l’alchimie se développe lentement. Ils ont appris à se connaître, et ça s’est vraiment bien passé. Sans doute aussi parce que Rady n’a jamais eu d’enfant. Il a développé avec Ahmed une vraie relation père-fils. » Le réalisateur revient sur le titre du film : « ‘Yomeddine’ signifie ‘jour du Jugement dernier’ en arabe. Bien que le film ne soit pas centré sur la religion, celle-ci est omniprésente dans le quotidien des gens. La croyance veut qu'au jour du Jugement dernier, tous les hommes seront considérés comme égaux et chacun sera jugé uniquement en fonction de ses actes et non de son apparence – une notion majeure dans la vie des personnages du film. Cette croyance résonne particulièrement chez ceux qui se sentent méprisés par la société, qui attendent ce jour avec impatience car il n'y a aucun autre espoir, pour eux, de se sentir égaux dans le monde réel. Quel que soit le degré de leur religiosité et qu’ils y croient ou non, cela demeure une source de réconfort et les aide à vivre. La scène qui évoque le plus cette idée est celle sous le pont, au lever du soleil, quand Rayes dit à Beshay : ‘Au jour du Yomeddine, nous serons tous égaux.’ »En savoir plusDu même programme
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Diffusé le 20/11/2018 à 23h34 - Disponible jusqu'au 18/01/2038
LES BONNES INTENTIONS de Gilles Legrand
Avec Agnès Jaoui et Alban Ivanov
Une quinquagénaire surinvestie dans l'humanitaire est mise en concurrence dans le centre social où elle travaille. Elle va alors embarquer ses élèves en cours d'alphabétisation, avec l'aide d'un moniteur passablement foireux, sur le hasardeux chemin du code de la route.
Gilles Legrand et le producteur Frédéric Brillion sont allés voir une pièce de Leonore Confino, « Le Poisson belge », car ils apprécient l’écriture saillante de cette auteure. Les deux hommes voulaient alors lui proposer d’écrire un scénario sur l’engagement social ou humanitaire, dans lequel évoluent souvent des gens pleins de bonne volonté, mais avec peu ou pas de formation et souvent peu de moyens. Le réalisateur se rappelle : « Dit comme ça, il y a matière à faire du cinéma ! Nous lui avons présenté une amie qui donne des cours d’alphabétisation. Je lui avais aussi fait part de mon plaisir d’entendre la langue française massacrée par des étrangers... et aussi d’un projet abandonné de comédie autour d’une auto-école. Nous avons déposé ces idées entre les mains de Léonore, qui est revenue avec une structure de scénario, nourrie aussi de son expérience personnelle, car sa mère a, je crois, beaucoup œuvré dans le social. C’était donc une grande salade de fruits, composée de différents vécus, qui nous a menés à ce portrait de femme. À la lecture de cette première structure écrite par Léonore, j’ai eu envie de réaliser ce film moi-même. Il y a eu ensuite beaucoup d’allers et retours entre elle et moi pour finaliser le scénario, mais la trame initiale revient à Léonore. »
Gilles Legrand ne voulait pas réaliser un drame social. Pour que le spectateur puisse rire des situations dépeintes dans le scénario des « Bonnes intentions », il a fallu jouer avec les clichés et rendre les personnages attachants. Le metteur en scène précise : « Si j’avais engagé des acteurs reconnus pour jouer cette bande d’illettrés, nous aurions fabriqué des clichés. Là, j’ai choisi des inconnus qui n’avaient presque aucune expérience du jeu. Par exemple, Roméo Hustiac, qui joue Radu, est un vrai Rom, qui ne savait ni lire ni écrire, et qui vivait sous un pont à Marseille avec sa famille. Je ne pouvais évidemment pas m’amuser à faire une caricature de son personnage ! Mais je voulais aussi tenter de faire rire. Donc oui, nous étions sur un fil. Le film n’épargne personne, ni ceux qui donnent ni ceux qui reçoivent : Isabelle, sa famille passive ou les ‘apprenants’, comme on dit dans le social. »
Pour le rôle d’Isabelle, le choix s’est porté sur Agnès Jaoui. Le réalisateur explique : « Agnès est l’actrice idéale pour ce rôle. Elle a cette image de femme généreuse, engagée, avec des idées progressistes, tout en ayant la capacité de se moquer un peu d’elle-même. Elle a été très bonne joueuse – elle a eu parfois du mal avec certains dialogues très acides, mais elle a de l’audace et de l’autodérision. Elle accepte de ne pas forcément être mise en valeur. J’ai beaucoup de reconnaissance pour ce qu’elle a fait dans ce film. »
La comédienne revient sur ce qui l’a touché dans le scénario : « J’ai été immédiatement séduite par le personnage d’Isabelle et par le sujet, fort et engagé, des ‘Bonnes Intentions’. Je suis très sensible à l’écriture de Léonore Confino, dont j’avais joué au théâtre ‘Les Uns sur les autres’. Je l’ai suivie dans ses différents projets. Quelque chose me touche dans sa façon d’aborder et de mettre en place les situations. Je trouve qu’elle est très honnête dans son écriture, elle n’essaie pas de plaire, ne cède ni à la mode ni à une facilité de penser. »
Concernant les autres comédiens, il y a Tim Seyfi, qui joue le mari d’Isabelle. Acteur turc, qui vit à Munich. Il a fait des études d’interprète et parle plusieurs langues, dont le français. Gilles Legrand se souvient à son sujet : « J’avais du mal à trouver un acteur de l’Est pétillant pour jouer le mari d’Isabelle. Il fallait qu’il soit plus jeune qu’elle, comme le veut le scénario, puisqu’on doit imaginer qu’Isabelle l’a rencontré jeune homme alors qu’elle faisait de l’humanitaire en Bosnie. Tim a un charme certain. Son côté Sean Penn me plaisait. »
Alban Ivanov incarne une fois de plus avec brio un loser magnifique. « Je pense que ce comédien ira loin. Il a la force d’un Jacques Villeret moderne. Son potentiel comique est énorme, et c’est surtout son humanité qui le distingue. Il peut être très émouvant. En outre, c’est un homme adorable, fin et généreux, avec qui il est très agréable de travailler », note Gilles Legrand.
Le réalisateur estime que le cinéma peut éveiller et ouvrir les consciences : « Quand j’étais enfant et que je sortais d’un film, les héros s’imprimaient en moi. Je pense que cela fonctionne aussi à l’âge adulte, quand on arrive à entrer en empathie avec des personnages très humains. J’espère que ‘Les Bonnes Intentions’ donnent à voir des personnages de ce type et qu’il donnera espoir dans le fait que le monde peut évoluer dans le bon sens. Car notre Isabelle, malgré tous ses défauts, parvient à faire bouger les lignes. Je souhaite qu’elle sache inspirer les spectateurs. »
AMANDA de Mikhaël Hers
Avec Vincent Lacoste, Isaure Multrier et Stacy Martin
Paris, de nos jours. David, 24 ans, vit au présent. Il jongle entre différents petits boulots et recule, pour un temps encore, l’heure des choix plus engageants. Le cours tranquille des choses vole en éclats quand sa sœur aînée meurt brutalement. Il se retrouve alors en charge de sa nièce de sept ans, Amanda.
Mikhaël Hers a déjà abordé le thème du deuil dans son précédent film. Dans « Amanda » il le traite de façon plus concrète avec cette nièce que David doit prendre en charge après le décès de sa mère : « Dans mes précédents films, l’inspiration venait plutôt par un biais rétrospectif et mélancolique, qui me permettait de réinvestir une époque ou des lieux. Pour ‘Amanda’, le point de départ était l’envie de parler du Paris d’aujourd’hui et de capturer quelque chose de la fragilité, de la fébrilité et de la violence de l’époque. ‘Amanda’ est donc effectivement plus inscrit dans le présent et le quotidien que mes précédents films », analyse le metteur en scène.
Le réalisateur a fait le choix d’inventer un attentat dans le bois de Vincennes comme point de départ de son film, événement tragique qui va chambouler la vie de ses protagonistes. « J’aurais trouvé indécent d’inventer une victime fictive pour un événement terriblement réel qui a fauché tant de vies et qui appartient désormais à l’imaginaire collectif… C’est malheureusement plausible que cet attentat survienne lors de ce pique-nique dans un bois, mais en même temps ce bois est moins identifiable que certaines grandes artères parisiennes ou que le Louvre par exemple. Je pense que le film ne pouvait pas faire l’économie de montrer les images de l'attentat, cela aurait été une fausse pudeur. ‘Amanda’ n’est pas un film sur les attentats ni sur le terrorisme islamiste, mais il me semblait impossible qu’ils ne soient pas filmés ni nommés frontalement (lors de la scène du café avec Raja). Il fallait juste trouver la manière et le moment. Lors du 13 novembre, on a été saturés d’images, toujours les mêmes, qui revenaient en boucle. Des images médiatiques qui créaient du vide plutôt qu’un imaginaire qui nous aide à penser l’événement. A mon humble mesure, il fallait que le film prenne en charge ces images manquantes. »
Le héros du film, David, est interprété par Vincent Lacoste. « Dans la première version du scénario, le personnage était plus vieux mais en discutant avec Pierre Guyard, mon producteur, on s’est dit que la vérité du personnage résidait dans cet âge précis, très jeune adulte, où l’on vient tout juste de dépasser la vingtaine... Et dans cette tranche d’âge, Vincent Lacoste était l’évidence. Son visage, sa façon de parler, sa douceur, sa grâce, sa beauté un peu gauche, infiniment touchante... J’ai eu un plaisir immense à travailler avec lui. Il est époustouflant et s’est immiscé dans le projet avec beaucoup de travail et une grande justesse », affirme le réalisateur.
C’est la première fois que Vincent Lacoste joue un rôle tout en émotion. Il s’explique : « C’était aussi pour ça que j’avais envie d’y aller : parce que je n’avais jamais fait ce genre de film et de rôle. Mais ça me faisait aussi très peur. Avant le tournage, je ne faisais que dire à Mikhaël : ‘Je ne te promets rien, je n’ai jamais fait ça !’ Et lui, ça le faisait rire : ‘T’inquiète pas, ça va bien se passer. Et si un jour tu n’y arrives pas, on prendra le temps de parler, d’aller chercher la bonne émotion pour la scène.’ C’est rassurant un réalisateur en face de vous qui vous fait comprendre qu’on a le temps et qu’il est à vos côtés, pas uniquement derrière sa caméra à vous regarder… Avec Mikhaël, je me suis vraiment senti accompagné. »
La révélation Isaure Multrier joue Amanda. « Isaure n’avait encore jamais joué. C’est la directrice de casting qui l’a remarquée dans la rue. J’avais ce fantasme d’une petite fille très juvénile et poupon, mais avec un petit côté adulte. De par ce qui lui arrive dans le film bien sûr, mais aussi parce que je trouve que les enfants qui grandissent avec un seul de leurs parents ont une forme de maturité. Je me racontais donc qu’Amanda avait une élocution et une capacité de formulation de sa pensée peut-être un peu plus développées qu‘une autre petite fille de sept ans », confie Mikhaël Hers.
Vincent Lacoste évoque sa relation avec sa jeune partenaire, Isaure Multrier. « On s’est un peu vus avant le tournage mais on a vraiment appris à se connaître au fur et à mesure du tournage. Au départ, comme mon personnage, je ne savais pas du tout comment me comporter avec elle. Je n’ai pas de nièces ou de jeunes enfants dans mon entourage, je me demandais comment lui parler, ce qu’elle pensait, à quel niveau elle comprenait qu’on était en train de jouer… Alors j’essayais juste d’être gentil et délicat avec elle, que ce soit très agréable pour elle de faire ce film et qu’elle prenne ce métier pour ce qu’il est. Les enfants jouent de manière très instinctive, il faut savoir être à leur écoute. Moi de toute façon, je travaille toujours ainsi. Je n’ai jamais pris de cours et quand je joue, je ne fais que réagir à la personne qui est en face de moi. »
BONUS
AFTER MY DEATH de Kim Ui-seok
Avec Young-hwa Seo, Go Won-Hee et Lee Tae-kyoung
Ce film fait l’objet de l’avertissement suivant : « Certaines scènes sont susceptibles de heurter la sensibilité du public ».
La disparition soudaine d’une élève d’un lycée pour jeunes filles précipite la communauté scolaire dans le chaos. Famille de la victime, enseignants et élèves cherchent à fuir toute responsabilité, l’image de l’école étant en jeu. Pourtant, sans indice ni corps, on suspecte un suicide. Young-hee, l’une de ses camarades d’école, dernière à l’avoir vue vivante, est suspectée par tout le monde, à commencer par la mère de la victime. Bouc-émissaire idéal, Young-hee va chercher à n’importe quel prix à échapper à la spirale de persécutions qui l’accablent. Mais quel secret, quel pacte peut-elle bien cacher… ?
Prix du Meilleur Film et Prix d’interprétation pour Jeon Yeo-bin dans la section « New Currents » au Busan International Film Festival 2017.
Le réalisateur revient sur la genèse du projet : « Un jour, j’ai perdu un de mes meilleurs amis. Ses affaires avaient été retrouvées sur le pont de la rivière Han. Il a fallu environ un mois pour retrouver son corps. J’ai essayé de traduire ce que j’ai ressenti à ce moment-là. Le suicide est tellement répandu en Corée du Sud qu’il est devenu chose banale dans la tête des gens. On n’en perçoit plus la gravité. On a d’ailleurs commencé par me dire que c’était trop insignifiant pour en faire un sujet de film. Ça m’a tellement perturbé que je m’y suis accroché, ce qui m’a permis d’approfondir mon idée. J’ai essayé de représenter les différentes phases qui succèdent à la mort d’un proche au sein d’une petite communauté. »
Le film dépeint un système éducatif pyramidal très brutal avec des phénomènes de harcèlement à tous les niveaux : « Nous vivons dans une société qui ne cesse de nous mettre en concurrence les uns avec les autres. Si vous ne réussissez pas, ou si vous êtes différent, vous serez rejeté du système et votre vie sera considérée comme une faute morale. La pression est forte, et elle créée des rivalités. On nous fait croire qu’on est tous égaux, mais il existe une hiérarchie sociale très puissante. Chacun essaie de gravir les échelons de cette hiérarchie, même s’il fait semblant qu’elle n’existe pas. Cette pression psychologique conduit les gens à éprouver une culpabilité masochiste. Le suicide est perçu comme une délivrance, avec la connotation érotique que cela suppose. »
Le film ne désigne jamais de coupables et n’explicite pas la cause du suicide, un choix délibéré de la part du réalisateur : « La véritable cause de la mort devait rester un mystère, ce sont les réactions de l’entourage qui m’intéressaient. Je souhaitais également que les différentes raisons invoquées par les uns et les autres demeurent probables, que le doute plane jusqu’au bout. Le suicide est un élément déclencheur. Il joue le rôle de révélateur d’un malaise social plus profond. »
Kim Ui-seok a choisi de commencer son film comme une enquête policière en reprenant certains codes du polar coréen alors qu’il n’en est pas vraiment un. Il s’explique : « Il me semble que le genre policier,le film d’enquête était particulièrementapproprié pour lancerle récit. Lorsqu’on est confrontés à quelque chose de mystérieux, d’irrationnel,on cherche toujours à enpercer le mystère, à trouver desexplications, comme si c’était possible.Si on persévère, on finit pars’enliser de manière désespérée, lesquestions amenant toujours d’autresquestions. C’est pourquoi je finispar abandonner l’aspect policier pourme concentrer ensuite sur le drame,sur le thriller sociologique si l’onpeut dire. »
YOMEDDINE de A. B. Shawky
Avec Rady Gamal et Ahmed Abdelhafiz
Beshay, lépreux aujourd’hui guéri, n’avait jamais quitté depuis l’enfance sa léproserie, dans le désert égyptien. Après la disparition de son épouse, il décide pour la première fois de partir à la recherche de ses racines, ses pauvres possessions entassées sur une charrette tirée par son âne.
Vite rejoint par un orphelin nubien qu’il a pris sous son aile, il va traverser l’Egypte et affronter ainsi le Monde avec ses maux et ses instants de grâce dans la quête d’une famille, d’un foyer, d’un peu d’humanité…
Le réalisateur revient sur sa note d’intention : « Avec ‘Yomeddine’, je voulais raconter l'histoire du mauvais cheval, l'outsider, le ‘moins-que-rien’ qui grandit pour comprendre les rouages d'un monde qui refuse de l'accepter. L'idée m’est venue alors que je tournais un court métrage documentaire (‘The colony’), relatant le parcours des résidents de la léproserie d’Abu Zaabal, au nord du Caire. Je me suis rendu compte que la lèpre était davantage un problème social que médical, et que leur défiguration avait contraint les résidents à s’isoler du reste du monde. Le choix de confier le rôle de Beshay à un non-acteur lépreux est venu de la volonté de donner au personnage, tout comme à l'homme, la possibilité d'être défini par son humanité et non par sa maladie. L'idée est de ne pas détourner le regard des exclus que l’on croise dans le film et de voir au-delà de leur apparence pour se concentrer sur leur personnage. Malgré son fond a priori pesant, ‘Yomeddine’ est traité avec légèreté, mettant l’accent sur le courage de Beshay face à la misère. »
Il revient sur l’écriture du scénario et les difficultés qu’il a rencontré pour produire le film : « Je voulais que ‘Yomeddine’ soit mon premier film : j’avais les bons contacts, l’histoire dans ma tête. Beaucoup d’éléments viennent directement de ce que j’ai entendu quand j’ai tourné ce court-métrage : celui-ci était centré sur une femme qui travaille dans la décharge, en récupérant des objets et en les revendant. J’ai longtemps pensé qu’elle serait à nouveau le personnage principal de Yomeddine, mais entretemps elle est tombée malade et aujourd’hui elle ne peut plus se déplacer. Sur le tournage du court, j’avais aussi rencontré un orphelin nubien, qui traînait autour de notre petite équipe, qui nous observait. Obama s’inspire de lui : il n’a pas de famille, et quand il se passe quelque chose d’intéressant, il s’incruste ! J’ai écrit le scénario en 2013/14, je suis rentré en Égypte pour chercher des financements. Trouver de l’argent n’a pas été facile : j’étais débutant, pour un film au sujet potentiellement dérangeant, sans star. Nous avons trouvé quelques partenaires et mis pas mal d’argent personnel. Finalement, le tournage a commencé en septembre 2015 pour s’achever en janvier 2016. Nous n’avions plus d’argent pour la post-production. Les gens qu’on approchait nous disaient : ‘Finissez le film, on verra après si on investit’. C’était d’ailleurs souvent les mêmes qui nous avaient dit à l’origine : ‘Tournez le film, on verra après…‘ Logiquement, une fois le montage fini, ils nous ont dit : ‘Faites des projections publiques, et selon les réactions du public, on vous aidera ou pas’. En 2017, j’ai été consultant sur la série ‘The looming tower’, ils cherchaient quelqu’un qui parlait arabe, qui pouvait les renseigner sur la langue, la culture, etc. Cela m’a permis de réunir un peu d’argent pour continuer. »
La réussite du film doit beaucoup au charisme très singulier de Rady Gamal, qui tient le rôle principal. « J’ai eu beaucoup de chance. À la léproserie, j’avais demandé à rencontrer des gens intéressés à jouer dans le film et Rady a été le premier que j’ai reçu. Je savais que c’était prendre un gros risque de choisir la première personne auditionnée, on m’avait dit : ‘Ne fais surtout pas ça !’, mais honnêtement, il a été impressionnant ! Il possédait exactement l’énergie du film. J’ai vu quand même d’autres candidats, mais j’ai toujours pensé que ce serait lui : il comprenait bien l’histoire, il avait un magnétisme très particulier. Au sein de la colonie, Rady tient une petite cafétéria, il propose du café, du thé, il vend des cigarettes. Son histoire personnelle est un peu différente de celle de son personnage : on l’a déposé ici quand il était enfant, et il a failli mourir parce qu’on ne l’avait pas soigné. Il a été finalement guéri par les religieuses qui s’occupent d’Abu Zaabal. Il a encore de la famille, avec laquelle il s’entend bien : son père est mort, mais sa mère et ses soeurs habitent dans le sud du pays et il leur rend visite régulièrement. Il m’a raconté qu’il n’avait pu se décider à habiter avec elles, parce qu’il n’aurait pas supporté le regard des gens. Il ne veut pas qu’on le traite comme un handicapé. »
Le réalisateur revient sur la direction d’acteurs :« On a passé quatre mois ensemble, c’était un processus très lent, je voulais qu’il rencontre le reste de l’équipe, qu’il ne soit ni choqué, ni bouleversé. Il est venu plusieurs fois chez moi au Caire, on s’est parlé de nos vies, de nos enfances, et puis je lui ai lu le scénario. Rady ne sait pas lire. Et peu à peu, je lui ai fait faire des petits exercices d’acteurs. Rady est quelqu’un qui ne s’apitoie jamais sur son sort, et je voulais que le film soit à son image. Je ne voulais pas d’un film doloriste, pesant, je voulais un ‘feel good movie’.Le processus a été à peu près le même avec le gamin qui joue Obama, Ahmed Abdelhafiz, qui, bien sûr, n’est pas acteur, lui non plus. J’avais peur que ça ne colle pas entre lui et Rady, mais je ne voulais pas non plus qu’ils se rencontrent trop tôt, je voulais que l’alchimie se développe lentement. Ils ont appris à se connaître, et ça s’est vraiment bien passé. Sans doute aussi parce que Rady n’a jamais eu d’enfant. Il a développé avec Ahmed une vraie relation père-fils. »
Le réalisateur revient sur le titre du film : « ‘Yomeddine’ signifie ‘jour du Jugement dernier’ en arabe. Bien que le film ne soit pas centré sur la religion, celle-ci est omniprésente dans le quotidien des gens. La croyance veut qu'au jour du Jugement dernier, tous les hommes seront considérés comme égaux et chacun sera jugé uniquement en fonction de ses actes et non de son apparence – une notion majeure dans la vie des personnages du film. Cette croyance résonne particulièrement chez ceux qui se sentent méprisés par la société, qui attendent ce jour avec impatience car il n'y a aucun autre espoir, pour eux, de se sentir égaux dans le monde réel. Quel que soit le degré de leur religiosité et qu’ils y croient ou non, cela demeure une source de réconfort et les aide à vivre. La scène qui évoque le plus cette idée est celle sous le pont, au lever du soleil, quand Rayes dit à Beshay : ‘Au jour du Yomeddine, nous serons tous égaux.’ »