Mercredi 17 juillet, l'échappée est allée au bout. Ce qui devrait être un scénario ordinaire sur le Tour de France est devenu une anomalie cette année. Avec la victoire de Richard Carapaz lors de la 17e étape, c'est seulement la quatrième fois sur cette édition qu'un fuyard a résisté au peloton.
Cela avait pourtant commencé en fanfare en Italie avec Romain Bardet et Kévin Vauquelin. Puis, plus rien ou presque. Un gâteau conséquent de 14 étapes confisqué par les favoris et les sprinteurs, dont seul le malicieux Anthony Turgis est parvenu à croquer un morceau lors de la 9e étape.
Des baroudeurs dépités et enfin récompensés
Dans les dix jours qui ont suivi, les baroudeurs faisaient part de leur dépit. "Ce n'est pas nous qui avons les cartes en main : c'est soit Visma, soit UAE, voire peut-être même Quick Step", déplorait David Gaudu (Groupama-FDJ) mardi matin. "Il faut en laisser un peu aux échappés, sinon ça ne donne pas envie d'attaquer franchement. Ça serait bien qu'ils en laissent cette troisième semaine, il y a des mecs qui sont à plusieurs heures [au classement général], il n'y a rien à craindre pour eux", désespérait Bruno Armirail (Decathlon-AG2R La Mondiale).
"Les deux étapes de mercredi et jeudi, si l'échappée ne va pas au bout, je ne comprends plus rien."
Guillaume Martin, coureur de Cofidisau départ mardi matin
Mercredi, l'étape vallonnée avait été cochée par l'ensemble des baroudeurs du peloton. Pourtant, le scénario a bien failli se répéter. L'échappée a mis plus de 50 km à se former et a compté moins d'une minute d'avance pendant plus de 30 kilomètres. "Il y avait de la tension avec les bordures, ensuite du vent de face, donc ça a mis du temps à se dessiner, c'était assez tactique. Je me suis dit que ça n'allait jamais partir", décryptait Guillaume Martin (Cofidis), présent à l'avant et premier Français à l'arrivée (6e).
Mais, contrairement aux autres étapes, les ogres UAE et Visma-Lease a bike s'en sont cette fois désintéressé, peut-être refroidis par les étapes du Lioran et du plateau de Beille, où chacun a profité du travail de l'autre équipe pour s'imposer.
Cette fois, ce ne sont pas les équipes de favoris qui ont fait la chasse, mais celles... qui voulaient l'échappée. Pour une de leurs dernières chances, elles ont tout fait pour placer un coureur à l'avant. "Tout le monde avait les mêmes ambitions pour la victoire d'étape. Pour être honnête, je n'avais pas trop d'espoir toute la journée", souffle Bob Jungels (RedBull-Bora-Hansgrohe), longtemps dans le quatuor de tête et finalement 17e.
Ils furent en tout plus d'une cinquantaine à prendre la fuite pour aller cueillir la victoire, une fois reçu l'assentiment d'un maillot jaune en décontraction. L'Equatorien Richard Carapaz (EF Education-EasyPost), un des meilleurs attaquants de ce Tour, fut le seul récompensé. Mais passer une journée à l'avant avec, enfin, une possibilité de victoire, a stimulé les attaquants du jour.
Dernière chance jeudi ?
"C'est peut-être la seule étape du Tour ou je me suis dit qu'il y avait une ouverture pour la victoire. Ça ne l'a pas fait, mais j'étais parmi les coureurs qui ont fait la course. Ça laisse encore envisager de belles choses pour les trois jours qui viennent", s'est félicité Guillaume Martin, toujours premier Français au général (16e).
Jeudi, beaucoup s'accordent à dire que ce sera la dernière chance pour les fugitifs de passer à travers les filets du peloton. "Il faudra retourner dans l'échappée, c'est la seule chance pour nous de gagner", a résumé Romain Grégoire, élu combatif du jour.
Un peu plus loin, son coéquipier Lenny Martinez était questionné sur l'étape qu'il préfère d'ici à dimanche. "Celle de samedi me convient, mais ça m'étonnerait que ça aille à l'échappée", soupire-t-il. La guerre des baroudeurs devrait de nouveau faire rage jeudi, entre Gap et Barcelonnette, avant que Tadej Pogacar et consorts ne verrouillent la course à double tour pour décider du dénouement de cette édition.