Handicap invisible, qu’est-ce que c’est ?
Comme son nom l’indique, le handicap invisible est un handicap qui ne se voit pas. Mais les troubles impactent pourtant la qualité de vie du malade, avec des manifestations symptomatiques diverses.
Les personnes porteuses d’un handicap invisible souffrent d’une « double peine » : elles ne bénéficient pas forcément de l’aide dont elles pourraient avoir besoin, doivent faire face à leur maladie, privées d’une forme de bienveillance collective. Elles subissent souvent l’incompréhension de l’entourage, qui peut aller jusqu’à remettre en cause la véracité de la maladie. Amélie, 31 ans, souffre du syndrome d'Ehlers-Danlos, une maladie génétique rare qui touche le tissu conjonctif qui assure le soutien, la protection et la cohésion des organes au sein de l'organisme. Elle raconte :
« Mes douleurs, soudaines et invisibles, sont un calvaire que très peu de personnes peuvent comprendre. Je n’ai pas encore l'impression que mes proches aient conscience de cette maladie. Je me lève certains jours en super forme, mais d'autres jours, je suis épuisée, je ne peux rien faire d'autre que d'être allongée. Cela fait penser au monde extérieur que je suis une fainéante ! Jusqu’en 2020, je travaillais comme puéricultrice, j'adorais mon métier, mais le fait d'être à genoux toute la journée, de porter des bébés non-stop, me blessait quotidiennement. J'ai dû quitter mon emploi, mon employeur n'en pouvait plus de mes absences. Tout ça ne dépendait pourtant pas de ma volonté ou de ma motivation, mais bien de mon état physique ! »
Vivre une grossesse avec un handicap invisible
Pour les personnes souffrant d’un handicap invisible qui souhaitent fonder une famille et devenir parent, les obstacles et difficultés peuvent être nombreux. Diane, atteinte d’une algie vasculaire de la face et d’endométriose, maman de 2 enfants, raconte les réactions de son entourage à l’annonce de sa première grossesse, survenue après 7 opérations et alors que les médecins l’avaient diagnostiquée stérile :
« J’ai tout de suite éprouvée une peur bleue d’en parler. D’une part parce que l’algie vasculaire de la face est héréditaire, mais également parce que je ressortais à peine de mes opérations… Nous avons eu plusieurs réactions. Certains qui étaient heureux pour nous : on avait enfin le droit au bonheur ! D’autres ne comprenaient pas comment on pouvait faire un tel choix. Enfin, d’autres étaient très inquiets pour moi. »
Pour certaines mères en situation de handicap, la grossesse peut être une période difficile : les manifestations symptomatiques de leur maladie peuvent, selon les cas, se calmer ou s’aggraver avec la grossesse, parfois allant jusqu’à mettre en danger leur vie ou celle du bébé. Pour son premier bébé, l’équipe médicale a décidé de faire accoucher Diane prématurément, au regard de son état physique :
« Devoir faire ce choix entre ma santé et celle de mon bébé a été terrible, une grande culpabilité. Nous avons accompagné notre fils dans un nouveau combat, celui de la prématurité. J’avais l’impression que ma maladie avait conduit à cela et il a fallu luter physiquement et psychologiquement de longues semaines en s’oubliant pour se concentrer sur notre fils. »
La vie de parents avec un handicap invisible
Tous les jeunes parents le savent : avoir un bébé est une expérience pleine de bonheur, mais aussi remplie de difficultés et de fatigue ! Et lorsque les symptômes d’une maladie deviennent envahissants, il peut alors être compliqué de gérer un tout-petit. Anabelle, atteinte de plusieurs pathologies chroniques invalidantes et mère d’une petite fille de 3 ans, se souvient des difficultés de son post-partum :
« Quelques mois après la naissance de ma fille, j'ai commencé à avoir de plus en plus de douleurs au niveau du bassin, du dos. Des fatigues chroniques de plus en plus difficile à supporter. Petit à petit, la douleur est devenue mon quotidien. Elle s'est installée un peu partout dans mon corps, arrivant jusqu'à me faire tomber de douleur plusieurs fois par semaine. Cela a été très compliqué pour m'occuper de ma fille, surtout avec cette horrible fatigue. Je ne pouvais plus la porter, j'avais du mal à supporter ses émotions, parfois je m'endormais sur le canapé d'un coup alors qu'elle était en train de me parler. Je ne pouvais plus lui donner le bain. J'avais l'impression d'être une mauvaise mère, de ne pas pouvoir m'en occuper correctement. »
Mais malgré les difficultés rencontrées, ces mères se battent pour pouvoir s’occuper et profiter de leur enfant de la même façon que toutes les autres mamans, comme Amélie, qui profite des jours où elle se sent en forme pour « se promener, sauter sur le lit ou courir » avec sa fille. Pour Diane, qui raconte le quotidien de sa famille sur son compte Instagram, ses enfants sont sa force :
« Avoir nos enfants ont été un très long combat mais ça a été surtout nos plus belles victoires sur la maladie, notre plus belle revanche. Pouvoir dire oui à la vie. »
Quant à elle, de l’expérience de la maternité, Anabelle aura illustré un livre pour enfant, qui explique le handicap invisible aux petits :
« J'ai cherché des livres qui pourraient me servir de support pour parler de tout ça, mais impossible de trouver quelque chose qui corresponde au handicap invisible et à notre situation. J'ai rencontré Gaelle, elle-même atteinte de spondylarthrite. Elle avait écrit quelques années auparavant un livre sur sa maladie. Moi, depuis que je ne pouvais plus travailler, je dessinais tous les jours, comme pour soulager mon mal-être. Alors nous avons décidé de faire nous-même ce livre pour nos enfants !C'est alors qu'est né "Krrronik, la mystérieuse mal-à-partout de ma maman". Au départ, c'était juste pour nous, nos enfants. Et puis, nous nous sommes demandées combien de familles étaient dans la même situation ? Nous avons décidé d'éditer ce livre en créant une campagne de financement participatif, où nous avons dépassé l'objectif de plus de 300% ! Nous avons eu de nombreux retours et remerciements de mères qui ont trouvé dans notre livre un support qui leur a permis d'ouvrir le dialogue autour de leurs douleurs et leurs maladies avec leur entourage. Quant à moi, cette aventure m'a permis de relativiser beaucoup mon rapport à ma propre maternité, mes propres capacités et incapacités. Entendre d'autres témoignages sur le handicap invisible, rencontrer d'autres personnes dans ma situation et aider autant de mères m'a aidé à comprendre que même si je ne peux pas m'occuper de ma fille tout le temps comme je le voudrais, je ne manque pas d'amour pour elle, et notre relation est tout aussi belle. »
Un autre ouvrage à signaler, "Différents et heureux", développé par l'association GitelBart : le livre s'adresse à ceux qui souhaiteraient être sensibilisés à cette question en mettant en scène Théo et Lune, deux enfants atteints d’un handicap invisible.