Tous les parents le savent maintenant : il est difficile, en ces temps de confinement, d’occuper les enfants, de gérer la maison, d'assurer le suivi scolaire tout en télétravaillant. Cela l’est d’autant plus pour les parents solos, qui vivent une période particulièrement compliqué.
Les gardes partagées chamboulées
Si certains parents s’étaient organisés jusqu'ici en garde partagée, dans la réalité, et même si le gouvernement autorise les déplacements pour ce motif, il peut être compliqué, voire impossible, de respecter les rythmes habituels de garde des enfants en temps de confinement.
Anna s’est récemment séparée de son mari. Venant d’apprendre une mauvaise nouvelle, elle décide, avant le début du confinement, de quitter Paris avec ses 2 garçons de 2 et 7 ans, Oscar et Jules :
« Quelques jours avant l'annonce du confinement, j’ai appris une nouvelle difficile qui m’a miné le moral. Seule avec mes 2 garçons, je ne voulais pas qu’ils me voient dans un tel état. Je suis donc partie chez mes parents pour qu’ils prennent le relai avec les enfants. »
Le confinement annoncé, Anna est bloquée chez ses parents, loin du père de ses enfants, qui ne peut plus les voir comme avant. Le situation ne peut pas durer, explique Anna :
« Au bout d’un mois, les enfants réclamaient beaucoup leur père. Nous sommes donc rentrés. Comme le père vit pour l’instant en colocation, il ne peut pas recevoir les enfants. Il vient tous les jours à la maison pour les voir, mais ça ne m’aide pas plus que ça. »
Tout faire : l'équation impossible
Léa, maman de Lison, 8 ans, témoigne de la difficulté à tout faire seule :
« Ma fille allait chez son père un week-end tous les 15 jours. Ce n'était pas beaucoup, mais cela me permettait de souffler, de reprendre de l'énergie. Depuis le début du confinement, elle n’y va plus du tout. Je gère donc tout depuis le début. »
Car, seul.e avec leur enfant, les parents solos doivent, en plus de la gestion de la maison et des repas, organiser l'école à la maison et le suivi pédagogique.
Pour les parents qui télétravaillent, cette masse de choses à faire peut vite devenir difficilement gérable sur la durée. Afin de ne pas se laisser déborder par la situation, Léa a mis en place une organisation millimétrée :
« Le matin, je me lève avant Lison pour répondre à mes mails. Ensuite, nous faisons école, et je prépare le déjeuner. L'après-midi j'essaye de travailler un peu, mais cela ne dure jamais longtemps car ma fille me sollicite beaucoup. Enfant active, elle n'est pas habituée à rester seule et enfermée et s'ennuie vite si je ne joue pas avec elle. Nous faisons des jeux jusqu'au dîner, puis, une fois qu'elle est couchée, je me mets au travail. »
Une situation qui peut être épuisante et anxiogène pour certains parents, comme témoigne Léa :
« Quand je me couche le soir, après avoir fini le travail, je me mets à penser aux courses qu'il faudrait que je fasse le lendemain, à l'évier qui n'est pas réparé, aux leçons que Lison n'a peut-être pas bien comprises... Tout en me disant : "Ne te mets pas trop la pression !"... C'est à devenir folle ! »
Aline Nativel Id Hammou est psychologue clinicienne et auteure du livre La charge mentale des enfants, publié aux Éditions Larousse :
« Les parents ne peuvent pas être tout à la fois : l’enseignant, le professionnel de santé, le coach sportif à domicile, le professeur de musique, le copain absent, l’assistante maternelle et le professionnel disponible en télétravail. C’est simplement un parent qui s’adapte et qui se fait confiance, tout comme à l’enfant. »
Sachez que plusieurs associations viennent en aide aux parents depuis le début de la crise sanitaire, notamment en mettant en place des lignes d'écoute téléphoniques comme SOS parentalité (0974 763 963) ou Allô Parents Confinés (0805 382 300).
Un terrain pouvant être propice au conflit
Pour les parents séparés qui ont des difficultés à s'entendre en temps normal, cette période peut réveiller encore plus les conflits, avec des difficultés de communication entre les 2 parents. Hélène, maman de Colin, 6 ans, témoigne :
« Mon ex-mari et moi étions de temps en temps en désaccord quant à l'éducation de Colin, mais depuis la crise du coronavirus, nous ne sommes d'accord sur rien : comment appliquer les mesures de confinement, les gestes barrières, comment gérer l'école à la maison, comment se déplacer pour la garde de Colin... C'est l'enfer ! »
Si les parents séparés sont en désaccord quant aux déplacements pour la santé de leur famille, il est préférable de recourir à un accord à l’amiable. Effectivement, en raison de la pandémie de Covid-19, les tribunaux fonctionnent au ralenti, et ne pourront pas assurer de médiation en cas de litige.
Le rapport au temps remis en question
Outre les difficultés d'organisations, certains parents trouvent aussi des avantages à la situation. Hélène raconte :
« Avant le confinement, j'avais la sensation que l'on courrait tout le temps. Courir pour amener Colin à l'heure à l'école, courir pour rejoindre une réunion de travail, courir pour le récupérer à la garderie, lui faire faire ses devoirs, qu'il ne dîne pas trop tard, se couche à une heure raisonnable... Je ne dis pas que la situation actuelle est facile, mais nous avons arrêté de courir. Nous jouons beaucoup plus ensemble, nous prenons le temps de cuisiner, nous lisons plus d'histoires... J'ai l'impression que le confinement me permet de mieux connaître mon fils, même si tout n'est pas toujours rose. »