tout l'événement les résultats la programmation

REPORTAGE. Cyclisme sur piste aux JO 2024 : mots croisés, chute, fausse élimination... La journée de rêve de Benjamin Thomas, médaillé d'or de l'omnium

Sacré champion olympique de l'omnium jeudi, Benjamin Thomas est le premier médaillé d'or français en cyclisme sur piste depuis 2000.

Derrière une médaille d'or, il y a parfois une préparation inattendue. Sacré champion olympique de l'omnium, jeudi 8 août, en cyclisme sur piste, Benjamin Thomas a passé une partie de la journée la plus importante de sa vie à noircir une grille de mots croisés, allongé dans l'herbe, à l'ombre d'un parasol. Un détail qui n'en est pas un, à en croire Florian Rousseau, dernier champion olympique tricolore sur piste en 2000, devenu directeur de la performance de l'équipe de France : "Depuis son arrivée, il est très serein, très calme, décontracté. On l'a vu par le passé être beaucoup plus tendu à l'entame de course. Quand je l'ai vu sous son parasol, c'était un bon indicateur".

De son propre aveu, le cruciverbiste amateur était arrivé "la boule au ventre au vélodrome de Tokyo", lors des derniers Jeux. Résultat : il avait terminé 4e de l'omnium. "Tout le monde me mettait la médaille d'or autour du cou avant la course, j'avais eu du mal à gérer cette pression", reconnaît celui qui, cette fois, arborait bien le précieux métal dans la chaleur étouffante du vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yvelines.

"J'ai réussi à me détacher de tout ça. Je savais que j’étais attendu, pronostiqué comme médaillé d’or, mais je n’y ai jamais pensé avant et pendant. J’étais serein ce matin, c’était un truc de fou. Je n’ai jamais été aussi tranquille un jour d’omnium."

Benjamin Thomas, champion olympique de l'omnium

à franceinfo: sport

Tellement serein que lors de son réveil musculaire, le futur champion olympique a embarqué son coach sur les routes locales. "On a parlé de tout sauf de vélo pendant 45 minutes. J'ai compris qu'il allait faire un truc : je ne l'avais pas vu comme cela depuis 2020", racontait Steven Henry, dans la soirée. Sur les routes de la vallée de Chevreuse, les deux hommes ont ainsi pu parler des résultats impressionnants de l'équipe de France de cyclisme (huit médailles avant la sienne). "On est arrivés mardi dernier au centre de la performance, on a vu les autres médailles, ça donnait envie, retraçait précisait Steven Henry.

Une journée presque parfaite

Comme ses amis de la route, du BMX et du VTT, Benjamin Thomas a donc rapporté une médaille à la délégation tricolore. Un "bonheur rare, encore plus à domicile", appréciait Florian Rousseau. "C'est un truc de fou, une journée incroyable. Il ne pouvait rien m'arriver, les planètes étaient alignées. Devant ma famille, c'est un jour de gloire", lançait, extatique, le coureur.

Le double champion du monde de la discipline a pourtant bien failli tout perdre à quelques tours de l'arrivée, sur la dernière des quatre épreuves qui composent l'omnium. Après avoir maîtrisé le scratch, la course tempo et frôlé la sortie sur la course à élimination (il a été repêché après une faute d'un adversaire, avant de finir deuxième à la suite d'une disqualification), Benjamin Thomas a en effet vécu le pire scénario : la chute.

"On a eu peur sur la chute, il tombe lourdement. Mais il a vite fait signe que ça allait, il est remonté et il a fini grâce à l’adrénaline."

Steven Henry, entraîneur des Bleus

à franceinfo: sport

"La chute, c'est un détail, souriait après coup le principal intéressé. J'ai glissé, ça brûle, mais rien de cassé. J'ai eu de la chance. J'ai regardé le compte-tour, je suis remonté après le sprint en récupérant avant, ce qui m'a permis de maîtriser le final. Demain, j'aurai mal partout, mais on va serrer les dents pour la suite [l'épreuve de l'américaine, samedi]."

Chasseur plutôt que chassé

A l'image de ce fait de course, le Français était imperturbable, sur un vélodrome dont il connaît le moindre millimètre carré, et sur lequel il a déroulé sa stratégie. "Je voulais être en position de chasseur, plutôt que d'être devant et défendre. C'était la stratégie : ne pas prendre la tête trop tôt", a-t-il expliqué. "Il fallait retrouver de l'insouciance, sentir la course. Il y a trois ans, on a fait l'erreur de regarder toujours au-dessus, de ne pas regarder derrière. Là, on voulait sécuriser le podium", a ajouté son coach, Steven Henry.

Ce n'est que lors d'une ultime attaque du Portugais Iuri Leitao que Benjamin Thomas a compris. "Je me dis alors que si je bouche le trou, je suis champion olympique. Il n'y a pas meilleure motivation", souriait le natif de Lavaur (Tarn), les yeux penchés sur sa médaille d'or. Une consécration pour celui qui mène une double carrière, entre cyclisme sur piste et sur route. Il avait déjà connu un grand moment cette saison en remportant une étape du Tour d'Italie, avant d'être mis à disposition par son équipe, Cofidis, depuis début juin. "Libéré" par ce succès, selon son entourage, Benjamin Thomas a pu peaufiner sereinement sa préparation pour l'objectif ultime de sa carrière : l'or olympique.

Dernier joyau sur la couronne du roi Benjamin Thomas, la présence, dans son fief du vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yvelines, d'un public qui n'a cessé de chanter à sa gloire. De quoi faire oublier l'ambiance timide – et très anglo-saxonne – des premiers jours de compétition autour de l'anneau. "J'ai pu profiter dans les derniers tours, ce n'est que du plaisir. Je me suis amusé aujourd'hui, c'était un truc de fou", savourait Benjamin Thomas, qui n'a raté qu'une chose, jeudi. "Je n'ai pas réussi à chanter LaMarseillaise. J'aurais chanté faux, j'étais trop ému..."

Tous les articles