"Il m'a montré la voie." Ces mots sont ceux de Maxime-Gaël Ngayap Hambou au lendemain de la médaille d'argent de Joan-Benjamin Gaba, son pote et compagnon de chambrée en équipe de France de judo, médaillé d'argent à Paris. Un exemple suivi à la lettre par le natif de Clichy-La-Garenne, mercredi 31 juillet, qui s'est paré de bronze. La récompense d'un travail mené depuis quelques années en coulisses au sein d'un groupe de messagerie Whatsapp nommé "Forces spéciales".
Ce groupe, c'est l'histoire d'une bande de jeunes judokas aux dents longues. Y sont également présents Kenny Livèze, Romain Valadier-Picard ou encore Maxime Gobert et autant de promesses pour l'avenir du judo tricolore.
Un groupe né pendant le confinement
Tous sont ou ont été membres de cette clique de judokas au sein de la célèbre messagerie cryptée. Créé durant la période du Covid par Stéphane Frémont et Richard Melillo, alors responsables des juniors au sein de la Fédération française de judo, ce groupe digital a permis à ces jeunes de garder le cap alors qu'ils étaient confinés. "On mettait chaque jour des citations de champions et on leur demandait de trouver qui c'était. On étalait le palmarès de types comme Michael Phelps et on les poussait à se poser les bonnes questions pour devenir comme eux", explique, un brin malicieux, Stéphane Frémont.
"On voulait les préparer à être des champions."
Stéphane Frémont, responsable de la cellule optimisation de la performance chez France Judoà franceinfo: sport
Malgré la pandémie, l'entraînement continue. L'entraide bat son plein. Stéphane Frémont et Richard Melillo fournissent des programmes précis à leurs protégés et se filment en train de le réaliser. De leur garage ou dans un dojo en Guadeloupe, les vidéos atterrissent sur le groupe et chacun se motive pour ne pas lâcher, seul dans son coin, en attendant des jours meilleurs. "Ils se sont nourris les uns et les autres dans le dépassement. Quand un collègue est dans le dur, le collectif est là pour le soutenir dans ce moment difficile", explique le technicien.
Une ambition sans limites
Une fois déconfinés, le travail peut reprendre avec un objectif : rattraper leur retard après des mois sans compétition. Lors des après-séances, tout le groupe se réunit auprès des entraîneurs et attend, avidement, la décision. "Soit des étirements, soit on repartait pour un entraînement d'une heure. On allait toujours plus loin", se souvient Stéphane Frémont. Le travail porte ses fruits : chez les jeunes, les titres européens et mondiaux tombent en individuel comme par équipes. En seniors, ce n'est pas encore le cas.
Mais Joan-Benjamin Gaba et Maxime-Gaël Ngayap Hambou sont sélectionnés pour les Jeux olympiques de Paris alors que les deux garçons pointent, à la veille de leur entrée dans la lumière, respectivement à la 36e et 38e place mondiale. Pas de répit pour les deux futurs médaillés : "Les deux, quand tout le monde dormait, on regardait leurs adversaires, on faisait beaucoup de vidéos. Ils s'en sont imprégnés", raconte Frémont.
Un avenir doré
Joan-Benjamin Gaba n'est pas le plus attendu, mais sa force de caractère étonne. Il définit son projet, le soumet avec une feuille de route pour les JO. Au bout, il y a une médaille d'argent. L'occasion de faire revivre ce groupe quelques instants et de s'envoyer des messages de félicitations. Malgré cela, celui qui est en chambre avec Ngayap Hambou au village olympique ne chôme pas : ses JO ne sont pas terminés avec l'épreuve par équipes (le samedi 3 août). Il est donc de retour à la salle d'entraînement à 7h30, quelques heures après avoir fêté sa médaille d'argent.
Ngayap Hambou s'inscrit dans ses pas. L'homme est habité dès son entrée en lice de la compétition olympique, mercredi. "Je n'ai jamais vu ce regard", souffle Stéphane Frémont, encore épaté de la matinée de son jeune disciple. Après avoir écarté tous ses adversaires durant la session du matin, Maxime-Gaël ne déroge pas aux bonnes habitudes et déjeune avec son pote de chambrée, Joan-Benjamin Gaba, et Stéphane Frémont. Au menu : partage des vidéos du prochain adversaire, le Japonais Murao.
En tribunes, le jeu de l'après-midi, c'est de faire rentrer le maximum de membres des "Forces spéciales" dans l'Arena pour pouvoir goûter ensemble aux récompenses de leur travail. Car jusqu'au bout, c'est le collectif qui compte. Le Japonais s'est sorti du piège tendu par le jeune judoka mais le Français a su se ressaisir pour s'offrir le scalp du 11e mondial Rafael Macedo pour la médaille de bronze. Avant de tomber dans les bras de ses potes en tribunes. Les "Forces spéciales" ont encore frappé.