Paralympiques 2024 : Bretonne d'adoption, accident de gymnastique... Qui est Emeline Pierre, sacrée sur le 100 m nage libre ?

"J'arrivais ici en tant qu'outsider, mais j'ai fait ma course pour toucher première." Emeline Pierre a créé l'exploit dans le bassin de Paris La Défense Arena en devançant sur le 100 m nage libre catégorie S10, pour les handicaps physiques, l'ultra-favorite Aurélie Rivard, détentrice du record du monde en 58"14. Mais son aller-retour en 1'00"49 dans l'eau parisienne lui aura suffi pour se parer d'or, 33 centièmes devant la Canadienne Aurélie Rivard. Une belle revanche pour la nageuse de 24 ans, qui avait terminé 10e en 2021 à Tokyo.

"Il y a deux ans, j'étais au fond du trou après Tokyo, j'en ai vraiment bavé, ma santé mentale était au plus bas, a retracé la native de Pau au micro de France 2 après sa course. Je suis arrivée à Brest avec si peu de confiance en moi, en mon projet, en ce que j'étais capable de faire... Et toutes les personnes que j'ai rencontrées à Brest ont réussi à me faire briller ce soir." La Bretagne, pour Emeline Pierre, c'est surtout un choix salvateur, lorsqu'en 2022 elle se rend compte qu'au lendemain de la déception des Jeux de Tokyo, elle a "perdu de vue qui [elle] était à côté d'un bassin", comme elle le concède à Ouest-France.

Une adaptation en or à Brest

Elle met derrière elle ses années passées au Pôle espoir France handisport à Vichy, qu'elle a rejoint dès l'âge de 15 ans, pour mettre le cap vers Brest, où elle termine un master en psychomotricité et rejoint le Cercle des nageurs, pas vraiment habitué à gérer des athlètes paralympiques. Au côté du groupe élite valide, elle enchaîne les entraînements en crawl et en dos, puis se construit son équipe avec un objectif en tête : Paris 2024.

"Avec mon coach et tout le staff du Cercle des nageurs de Brest, on a fait en sorte que je sois prête aujourd'hui, appuie-t-elle, tout juste sortie du bassin. J'ai eu un hiver compliqué. Aux championnats d'Europe, je me suis même posée la question de savoir si j'allais sortir quelque chose. J'ai fait deux mois fantastiques au niveau de la prépa, et aujourd'hui ça paie." Avant de se voir médaillée d'or sur le 100 m nage libre, la Bretonne d'adoption avait déjà explosé le record de France sur 50 m, malgré sa cinquième place en finale.

Une erreur médicale fait basculer son adolescence

Pourtant, c'est sur les tapis de gym qu'Emeline Pierre était destinée à briller étant plus jeune. Mais à la suite d'une chute à la poutre à l'âge de 13 ans, entraînant une luxation du coude et une fracture du cubitus, elle est victime d'une erreur médicale lors de son opération et n'a jamais retrouvé l'usage complet de son bras, malgré deux opérations successives pour améliorer son manque de mobilité allant de l'épaule au poignet.

Un handicap qui la contraint à se tourner vers la natation, qu'elle pratiquait déjà en parallèle de la gymnastique. Engagée aux Jeux paralympiques dans la catégorie S10, celle avec les déficiences motrices les plus légères dans la discipline, Emeline Pierre est constamment déséquilibrée dans sa nage, faute notamment de pouvoir plier son coude. Mais elle s'adapte, mieux que jamais. Avant de poser ses valises dans la capitale, la nageuse a battu le record du monde du 100 m dos aux championnats de France en petit bassin (1'06"96), et multiplié les podiums en compétitions internationales (deux médailles aux championnats du monde 2023, trois aux championnats d’Europe 2024).

Elle n'était jusqu'ici jamais montée sur la plus haute marche d'un podium, mais a lancé sa collecte de titres de la plus belle des façons aux Jeux paralympiques de Paris. Il lui reste encore plusieurs épreuves pour améliorer ce palmarès, puisqu'elle sera encore alignée sur le 100 m dos et les relais 4x100 m nage nage libre et 4x100 m 4 nages.