Cette fois, ils ont touché le fond. Tenus en échec par l'Italie (13-13), dans un nul aux allures de défaite dimanche 25 février, les Bleus ne sont que l'ombre d'eux-mêmes. Pour la première fois de son histoire, la France n'a pas été en mesure de battre la Nazionale sur son terrain dans le Tournoi des six nations. Le contraste avec la démonstration trois mois plus tôt lors du Mondial face à ces mêmes Italiens (60-7) est saisissant. Retour sur les principales failles à l'origine de cette débâcle.
Mais où est passé l'allant offensif ?
"Ce qu'on a proposé n'est pas normal", a déploré le talonneur Julien Marchand sur France 2. La frilosité offensive n'est pas encore une norme, mais devient une constante pour ces Bleus. Dimanche, ils n'ont marqué qu'un seul essai, soit leur pire total contre l'Italie depuis... 1964. Pointée du doigt avant la rencontre, la charnière Maxime Lucu-Matthieu Jalibert a encore été neutre. Mais les deux autres animations testées dans la rencontre (Lucu-Ramos puis Le Garrec-Ramos, certes en infériorité numérique) n'ont pas fait mieux, signe que le mal est plus profond.
Souvent parfaitement huilée lors du premier mandat de Fabien Galthié, la ligne de trois quarts a été déconnectée. Si bien que les rares initiatives derrière, par Matthis Lebel ou Damian Penaud, n'ont pas abouti par manque de continuité. La dernière contre-attaque vaine de Yoram Moefana (80e), qui a préféré s'isoler sur l'aile jusqu'à être poussé en touche plutôt qu'attendre du soutien, en est une bonne illustration.
À ne pas savoir conclure...
Archi dominateurs dans le premier acte, du moins territorialement (70%) et en termes de possession (58%), les Bleus ont regagné les vestiaires avec un écart étriqué (10-3). Ce n'est pourtant pas faute d'avoir essayé dans les 5 mètres adverses. "On reste quasi 10 minutes proche de leur ligne sans scorer", a pesté Esteban Abadie en zone mixte. Les Bleus, plutôt dominateurs devant, ont cruellement manqué de précision dans les zones de marque et ont perdu, au total, 19 ballons.
Malgré une production globale à revoir, les Français avaient au moins su concrétiser leurs rares temps forts en Ecosse deux semaines plus tôt. Ils se sont cette fois entêtés à imposer un défi physique à des Italiens plus robustes qu'escompté. À plusieurs reprises, les Bleus ont préféré aller en touche sur des pénalités. "On n'a peut-être pas fait le bon dosage entre prendre les points ou insister", a reconnu Charles Ollivon en conférence de presse. En terminant avec 13 petits points marqués (pire total de l'ère Galthié égalé), les Français regretteront longtemps ce péché d'orgueil.
Un coup dans la tête comme une balle dans le pied
Avec le carton rouge de Jonathan Danty (40e), les Bleus ont encore joué une mi-temps à 14. Le centre a été exclu pour un contact tête contre tête, une erreur de plaquage semblable à celle de Paul Willemse contre l'Irlande. Dans les deux cas, les Français n'ont pas fait l'effort de se baisser. "Parfois, ça ne se joue pas à grand-chose, relève Fabien Galthié. Ça ne nous sourit pas et ça nous coûte cher." Au vu des deux visages radicalement différents, cette infériorité numérique a été préjudiciable aux Français. Derrière cette faute évitable, rejaillit la sempiternelle carence de l'indiscipline. Les Bleus ont été sanctionnés 12 fois, dont deux dans les dernières minutes.
La gestion de la rencontre à 14 contre 15 a, elle aussi, interrogé. "Le match nous a filé entre les mains", a reconnu Gaël Fickou. Les Français ont logiquement cédé le ballon aux Italiens et ont plutôt bien contenu leurs offensives. Mais leur jeu au pied quelconque et peu fréquent (20 coups de pied sur l'ensemble du match) les a empêchés de cantonner la Nazionale dans son camp. À ce jeu, la sortie précoce de Matthieu Jalibert et le replacement de Matthis Lebel à l'arrière, pas un spécialiste de l'occupation au pied, a pesé lourd.
Des leaders, quels leaders ?
L'essai égalisateur d'Ange Capuozzo (71e) a logiquement galvanisé les Italiens. Et les Français ? Les mains sur la tête, le regard dans le vide, ils ont au contraire paru médusés. L'esprit de révolte pour renverser des situations délicates, comme en Ecosse deux semaines plus tôt, était déjà loin. Ils ont au contraire plongé et frisé la correctionnelle, la pénalité de la gagne de Paolo Garbisi ayant heurté le poteau (80e).
Amputé d'une palanquée de cadres (dont Anthony Jelonch, Grégory Alldritt, Antoine Dupont et Romain Ntamack), le XV de France ne disposait plus de grand monde pour remobiliser les troupes. Le sursaut mené par Julien Marchand et Romain Taofifenua a été éteint par d'énièmes fautes de main. De manière générale, le banc quasiment vidé dès la 50e minute – seul Abadie est entré plus tard (66e) – n'a pas eu l'impact espéré sur la durée. Dominant sur la plupart des impacts et en mêlée, le pack français avait-il besoin d'être remodelé si tôt ?