Demi-frère, quasi-sœur : quelle différence ?
En France, on estime à 1,5 millions le nombre d’enfants qui vivent en famille recomposée. Ainsi, beaucoup sont ce que l’on appelle des demi-frères ou des quasi-frères.
On emploie le terme de demi-frères ou sœurs lorsque les enfants ont un seul des 2 parents en commun. On parle sinon de quasi-frères ou sœurs lorsqu’il n’y a pas de lien de sang, mais qu’ils se considèrent comme des frères et sœurs. C’est un terme sociologique.
De nouveaux liens
Reconstruire une nouvelle famille après une séparation n’est jamais simple pour un enfant. Surtout si d’autres enfants viennent vivre avec lui. L’enjeu va être de constituer une fratrie, des liens de cœur, à partir de l’absence totale de liens de sang. C’est la création d’une nouvelle cellule qui n’a pas (encore) d’histoire. Pour les parents, c’est un véritable challenge !
Pour la philosophe et thérapeute familiale Nicole Prieur, ces liens peuvent donner des résultats très positifs :
« C’est finalement souvent ce lien entre quasi-frères qui se met en place facilement et positivement. C’est un des liens qui peut poser le moins de problème si le contexte est favorable. L’enjeu est intéressant et important pour les enfants. Il y n'a que l’acceptation de l’altérité, la place de l’autre, la différence d’origine de l’autre qui puisse fonder la solidarité, car il n’y a aucun lien biologique, il n’y a que des liens d’appartenance. »
La différence que l’on va trouver chez ces quasi-frères et sœurs, c'est la mise en place d’une relation où l’on ne va pas les obliger « à s’aimer à tout prix ». Mais ils doivent cependant se respecter, comme le rappelle la spécialiste :
« Quand on ne s’entend pas avec son frère ou sa sœur, ça génère de la souffrance chez les enfants et les parents qui ont l’impression d'avoir raté quelque chose - alors que chez les quasi cela semble plus simple a priori, mais il faut quand même se demander pourquoi (relation du couple aux « ex », position du beau-père ou de la belle-mère, etc.) »
Demi-frères et sœurs, un même sentiment d’appartenance
Dans une famille recomposée ou l’on trouve des demi-frères ou sœurs, c’est un peu différent. Les demi frères et sœurs se rapprochent de frères et sœurs avec un vrai lien de sang. Il y a beaucoup de configurations qui fonctionnent comme les fratries classiques.
Le fait d’avoir la même mère ou le même père aide à donner le sentiment d’avoir la même origine, qui rapproche. Dans ce modèle familial, les enfants vivent souvent ensemble quand ils ont la même maman. Cela crée des rivalités et des proximités comme chez des frères et sœurs classiques.
Évidemment, l’arrivée d’un bébé dans une fratrie recomposée peut parfois bouleverser le climat entre les quasi-frères et sœurs. Selon Nicole Prieur, cela peut perturber ces fratries sans liens de sang qui avaient trouvé leurs marques :
« Deux frères ou sœurs de sang et un quasi de l’autre côté, cela peut poser des difficultés. Un enfant va par exemple mal supporter que son frère biologique s’entende mieux avec le quasi ».
Être beau-père ou belle-mère : quelles difficultés ?
Pour le couple, élever ses enfants dans une famille recomposée est loin d’être facile. Le nouveau couple peut afficher des différences dans ses méthodes d’éducation. Le risque si le nouveau couple n’accorde pas sa façon d’éduquer, est de se retrouver avec un foyer scindé en deux. Au lieu de former une famille, chaque parent contribue à isoler sa cellule familiale.
Ils doivent donc prendre conscience que la situation n’est déjà pas simple pour les enfants. La recomposition demande du temps et ne se fera qu’avec quelques concessions. Chacun doit trouver sa place.
La relation des enfants avec le beau-père ou la belle mère
Un enfant peut se sentir mal à l’aise vis à vis de ce nouvel adulte avec qui il doit vivre. Pour Nicole Prieur, il y a des cas où cela peut poser problème :
« Quand ça se passe mal, c’est une question de loyauté envers son parent ou quand le beau-père ou la belle-mère fait des différences entre les enfants. Dans ce cas l’enfant va se révolter et cela peut engendrer des différends dans la quasi fratrie ou la fratrie recomposée. »
Selon les cas de figure, les gardes alternées peuvent provoquer des inégalités chez l’enfant. Par exemple, un nouvel enfant va être à plein temps avec les parents et ne voir ses demi ou quasi-frères et sœurs qu’un week-end sur deux. Ces inégalités peuvent faire souffrir les enfants.
Nicole Prieur parle aussi du poids que peut avoir la question financière dans les fratries recomposées :
« L’argent peut intervenir à ce moment-là : quand les parents privilégient financièrement leur enfant biologique. Au fur et à mesure que les enfants grandissent, il peut y avoir des différences de traitement (payer les études, aider l’enfant à s’installer…) même si tout au long de la vie on a traité les enfants de la même manière. Les choix se font dans l’ordre de la filiation mais pas forcément consciemment. Les liens d’argent peuvent biaiser les liens de cœur. Le lien amical peut aussi se dégrader entre les enfants qui deviennent jeunes adultes quand ils ont été traités différemment sur le plan financier. »
Afin que l’entente soit bonne et durable, il faut que chacun ait l’impression d’avoir trouvé sa place. Il faut créer des relations entre les enfants via le jeu, le partage. Souvent, il faut réussir à apaiser et faire oublier les difficultés du divorce.
Enfin, les beaux-parents intègrent la nécessité de traiter tous les enfants de la même façon. Mais il faut donner à son enfant naturel des signes pour lui montrer qu’on le considère différemment des autres. Selon la thérapeute Nicole Prieur, il suffit de rassurer l’enfant avec des moments exclusifs :
« Par exemple, ça peut être passer une journée avec lui. Le lien parent-enfant biologique va être rassurant quand le parent arrive à faire des choses avec lui de façon privilégiée, de petits signes, un lien spécifique. »