Huawei : qui a peur du géant chinois ?
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Alors que les négociations commerciales doivent reprendre dans quelques jours entre la Chine et les États-Unis, Washington a inculpé Huawei, numéro un chinois des télécommunications, d’espionnage industriel et de fraude. Cette double inculpation annoncée lundi soir dans la capitale américaine s’ajoute au dossier délicat de Meng Wanzhou, directrice financière de Huawei et fille du fondateur du géant chinois des télécoms. Arrêtée début décembre à Vancouver, au Canada, elle est assignée à résidence en attendant que la justice canadienne décide si une procédure d’extradition demandée par Washington est fondée.
Le Département du commerce américain insiste sur le fait que les procédures contre Huawei sont « totalement séparées » des négociations avec Pékin. De son côté, la Chine accuse les États-Unis dans un communiqué de « manipulations politiques ». L’affaire est à remettre dans le contexte de la campagne menée par les États-Unis pour convaincre les opérateurs américains et ceux de ses pays alliés de ne pas acheter d’équipement auprès de Huawei. Selon Washington, ils seraient susceptibles d'être utilisés par Pékin pour espionner les télécommunications dans des pays occidentaux.
Les craintes des États-Unis sont notamment dues au fait que Huawei puisse prendre la main de la 5G, la prochaine génération de réseau mobile qui devrait permettre de développer l’internet des objets. Convaincus que le contrôle mondial de la 5G sera déterminant pour prendre le leadership de l’économie mondiale, Washington et Pékin se livrent d’ores et déjà une véritable bataille technologique.
Si les deux superpuissances ne parviennent pas à régler leurs différends commerciaux avant le 1er mars, Donald Trump menace d'instaurer de nouvelles taxes sur des biens chinois. Une décision qui pourrait avoir des conséquences sur la santé de l’économie chinoise, scrutée avec la plus grande attention. Selon le Bureau national des statistiques (BNS), le produit intérieur brut (PIB) chinois n’a progressé que de 6,6 % en 2018. Il s'agit de sa plus timide hausse depuis 28 ans, la guerre commerciale entre Pékin et Washington ayant accentué les faiblesses de la deuxième économie mondiale.
Moins connu du grand public que Huawei, le groupe de matériel ferroviaire China Railway Rolling Stock Corporation (CRRC) fait peur à la concurrence. Fort d’un chiffre d’affaires de 26 milliards d’euros, le premier constructeur mondial de matériel ferroviaire espère faire de l’ombre à ses concurrents japonais, canadiens et européens. Pour répondre à de telles ambitions, Alstom et Siemens avaient présenté en 2017 un projet de fusion. Ce dernier a été rejeté, mercredi 6 janvier, par la Commission européenne. Elle estime que cette fusion aurait porté atteinte à la concurrence sur les marchés des systèmes de signalisation et des TGV.
La décision a été vivement critiquée par les gouvernements français et allemands. Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a ainsi reproché à la Commission européenne de « servir les intérêts économiques et industriels de la Chine ». La Commission a, quant à elle, estimé que la concurrence chinoise n'était pas menaçante en Europe.
Pourquoi les deux superpuissances mondiales se livrent-elles une telle bataille pour la 5G ? Quelles peuvent être les conséquences de cette bataille technologique sur l’économie mondiale ? À quoi est dû le succès des géants mondiaux que sont Huawei et CRRC ?
Invités :
• Dominique Seux, directeur délégué de la rédaction des Échos.
• Pierre Servent, expert en stratégie militaire et spécialiste des questions de défense.
• Valérie Niquet, responsable du pôle Asie à la Fondation pour la recherche stratégique et auteure de « La puissance chinoise en 100 questions ».
• Nicolas Bouzou, économiste - cabinet de conseil Asterès.
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé