Les otages, le Hamas... et le Qatar
C dans l'air- 1 h 6 min
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Leurs visages fatigués a fait la une des journaux télévisés. Nathalie Ranaan, 59 ans et Judith, sa fille de 17 ans, deux otages israélo-américaines du Hamas, ont été libérées vendredi par le groupe terroriste et ont pu retourner en Israël. Elles avaient été enlevées à Nahal Oz, lors de l'attaque éclaire du Hamas menée le 7 octobre sur le sol israélien. Si les Etats-Unis sont le premier pays à récupérer des otages, le secrétaire d'État Anthony Blinken, qui a obtenu l'entrée d'un convoi humanitaire dans la bande de Gaza ce samedi, a rappelé que les négociations ne faisaient que commencer avec le Hamas : "Il y a encore 10 autres Américains dont le sort dans ce conflit n'est pas connu. Nous savons que certains d'entre eux sont détenus par le Hamas, aux côtés de quelque 200 autres otages détenus à Gaza", a-t-il déclaré ce vendredi lors d'une conférence de presse.
Les Brigades Ezzedine Al-Qassam, la branche armée du Hamas, ont expliqué la libération des deux otages grâce à "une médiation du Qatar". Le petit pays du Golf, où sont réfugiés de nombreux dirigeants du Hamas, dispose d'une position stratégique entre les deux camps. Il y abrite à la fois le bureau politique du Hamas, mais aussi le commandement militaire régional américain, le CentCom. Si la monarchie est un allié de Washington et a annoncé dès le 9 octobre mener des discussions avec le Hamas pour négocier la libération des otages, elle considère aussi l’État hébreu comme "seul responsable" de l’escalade de la violence. C'est aussi le Qatar qui paye les salaires des fonctionnaires de Gaza, finance les aides aux familles défavorisées et le carburant. Cette position, qui frôle parfois le grand écart entre ses alliés de la région et les États-Unis, le Qatar en a fait sa spécialité. Mais à force de discuter avec tout le monde, le pétro-État (37% de son PIB réel est issu de l'exploitation des hydrocarbures) pourrait bien se faire prendre à son propre jeu.
Il y a une semaine, lors d'une conférence de presse à Tel Aviv, Anthony Blinken s'est dit prêt à geler 6 milliards de dollars destinés à l'Iran et stockés à Doha : "Nous avons un strict contrôle des fonds, et nous nous réservons le droit de les geler". Cet argent, destiné à de l'aide humanitaire, avait été débloqué en août dernier lors d'un accord entre l'Iran et les Etats-Unis sur un échange de prisonniers. Mais le retour de la guerre menace désormais cet accord. Les États-Unis soupçonnent en effet la République islamique, qui ne cache pas sa haine d'Israël, d'avoir financé l'offensive du Hamas. De son côté, l'Iran s'est aussi fait une spécialité de la "diplomatie des otages" et retient plusieurs dizaines d'Occidentaux dans ses geôles. Arrêtée et détenue depuis 2020, la chercheuse franco-iranienne de Science Po, Fariba Adelkhah, a finalement pu rentrer en France ce mercredi. Elle avait été condamnée il y a trois ans pour atteinte à la sécurité nationale. À peine de retour, l'universitaire a demandé la libération immédiate des quatre autres otages français, dont l'enseignante alsacienne, Cécile Kohler, détenue de manière arbitraire depuis le 7 mai 2022.
Comment négocier la libération des 200 otages retenus par le Hamas ? Quel rôle peut jouer le Qatar dans ces discussions, notamment avec les Etats-Unis ? Après un léger réchauffement, les relations diplomatiques entre l'Iran et les Etats-Unis sont-elles à nouveau menacées ?
Nos experts :
- Ariane Bonzon, journaliste, ancienne correspondante à Jérusalem et Istanbul
- David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l’IRIS, rédacteur en chef de la revue "Orients stratégiques"
- Alain Pirot, journaliste spécialiste des questions de défense, ancien correspondant à Jérusalem - France Télévisions
- Alexandra Schwartzbrod, directrice adjointe de la rédaction - Libération
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé
Maison de production : France Télévisions / Maximal Productions