Macron persiste et signe...
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Après presque une semaine de crise depuis le recours du gouvernement au 49.3, et alors que les manifestations et les blocages se multiplient dans le pays, Emmanuel Macron s’est adressé ce mercredi aux Français lors d’une interview télévisée sur TF1 et France 2.
Le chef de l’État qui ne veut ni dissolution, ni remaniement, ni référendum, entendait montrer qu’il tenait la barre, engagé sur un chemin dont la direction n’a pas changé. Il a ainsi réaffirmé la nécessité de sa réforme des retraites dont il souhaite l’entrée en vigueur "d'ici la fin de l'année" et s’est dit prêt à "endosser l’impopularité" pour la mettre en œuvre. Renouvelant sa confiance à Élisabeth Borne mais lui demandant d’"élargir" la majorité, le président de la République a par ailleurs regretté que les syndicats n’aient pas présenté de "proposition de compromis" sur le texte, soulignant que le gouvernement l’a fait, en revanche, "avec le Parlement".
Mardi, au terme d’une journée d’intenses consultations, Emmanuel Macron avait appelé le gouvernement à "apaiser" et "écouter les colères", tout en assumant ses choix, selon des participants à une réunion avec les parlementaires de son camp dont certains sont très remontés après l'usage du 49.3. "La foule, quelle qu’elle soit, n’a pas de légitimité face au peuple qui s’exprime souverain à travers ses élus", avait-il également mis en garde.
"Ce sont des propos qui clarifient" a expliqué ce mercredi le président lors de son interview. "On ne peut accepter ni les factieux, ni les factions" a-t-il aussi fait valoir alors que de nouveaux rassemblements ont été organisés hier soir dans plusieurs grandes villes françaises, théâtre pour certaines d’entre elles de tensions entre forces de l’ordre et manifestants. "Qu’il y ait des manifestations, c’est légitime. Ça a été fait de manière calme et organisé. Les violences il faut les condamner, les blocages, il faut les lever. On ne tolérera aucun débordement" a encore prévenu Emmanuel Macron à la veille d’une 9e journée de de grèves et de manifestations prévue ce jeudi 23 mars à l’appel de l’intersyndicale.
Vu la gravité de la crise politique, le chef de l'Etat a par ailleurs annoncé le report de l’examen de la loi immigration au Sénat. "Nous allons réagencer les choses et découper les textes plus courts", a-t-il expliqué. Le président de la République a également dit souhaiter "réengager" le dialogue avec les partenaires sociaux sur les conditions de travail, pour entendre "ce besoin de justice" exprimé par les manifestants. Il a promis que la discussion concernerait notamment l’évolution des carrières ou la pénibilité, et se tiendrait "dans les prochaines semaines".
Mais a-t-il convaincu ? Furieux, Laurent Berger n’a pas tardé à répondre sur Twitter, accusant Emmanuel Macron de "déni et de mensonge ! La CFDT a un projet de réforme des retraites. Macron 2019 l'avait compris, il avait repris notre ambition d'un système universel. Macron 2023 refait l'histoire et ment sur la CDFT pour masquer son incapacité à trouver une majorité pour voter sa réforme injuste" a écrit le leader du syndicat réformiste. Les propos d'Emmanuel Macron sont "du mépris pour les millions de personnes qui manifestent", a réagi de son côté Philippe Martinez. Le patron de la CGT a également fait part de son inquiétude. "Le président de la République est sûr tout seul de ce qu'il fait, et c'est grave", a-t-il déclaré sur France 2.
Du côté de l’opposition, les réactions et les critiques n’ont également pas tardé. Le leader de la France insoumise a dénoncé les "traditionnelles marques de mépris" et "l'arrogance" d'Emmanuel Macron après son entretien télévisé, estimant que le chef de l'État "vit en dehors toute réalité". "La foule est au peuple ce que le cri est à la voix", a ajouté Jean-Luc Mélenchon en référence aux propos de la veille du président. Le premier secrétaire du Parti socialiste a lui aussi jugé avec sévérité l'interview du président de la République, estimant que celui-ci aggrave le mécontentement social. "C'est hallucinant, il est dans un déni absolu. Je crains qu'il n'ait mis plus d'explosifs sur un brasier déjà bien allumé", notamment en "disqualifiant les syndicats" a déclaré Olivier Faure depuis l'Assemblée nationale. Marine Tondelier, la secrétaire nationale d'EELV, s'est dit pour sa part sur Twitter "glacée par la démonstration d'autosatisfaction du président" qui, à ses yeux, a tenu des "propos offensants". Le député LR Aurélien Pradié, qui a croisé le fer avec le gouvernement sur la réforme des retraites, a de son côté accusé Emmanuel Macron de "jouer avec le feu". C'est "une provocation de plus", a-t-il affirmé.
Alors que retenir de l’interview du président de la République ? Comment Elisabeth Borne peut-elle bâtir une "majorité élargie" ? Et que vont faire maintenant les syndicats ?
Les invités :
- Christophe Barbier, éditorialiste politique, conseiller de la rédaction de Franc-tireur
- Raphaëlle Bacqué, Grand reporter au journal - Le Monde
- Astrid De Villaines, cheffe du service politique au - Huffington Post
- Bernard Sananes, politologue, président de l’institut de sondages Elabe
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé