Total, les milliards et la polémique
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En plein débat sur la réforme des retraites, la question des superprofits et du partage de la richesse est relancée alors que TotalEnergies vient de publier le meilleur bénéfice de son histoire. Le groupe pétrolier a en effet réalisé un bénéfice net de près de 20 milliards d’euros pour l'année 2022, soit une hausse de 28 % par rapport à 2021, une année lors de laquelle il avait déjà atteint des niveaux de rentabilité jamais atteints et l'un des meilleurs de l'histoire du CAC40 qui se porte lui-même très bien.
Les quarante entreprises du principal indice boursier français ont ainsi distribué 80,1 milliards d’euros à leurs actionnaires en 2022, en dividendes ou rachats d’actions, selon la lettre financière Vernimmen.net. Dans le détail, les dividendes versés atteignent 56,5 milliards d’euros. En tête des groupes redistribuant des capitaux à leurs actionnaires, on trouve TotalEnergies (13,3 milliards d’euros de rachats d’actions ou de dividendes), LVMH (7,1 milliards) et Sanofi (4,7 milliards). Viennent ensuite Stellantis, AXA, Crédit agricole et la BNP Paribas. Après déjà un bénéfice net record en 2021, la BNP Paribas a fait mieux encore en 2022, avec 10,2 milliards d’euros engrangés. Mais cette annonce réalisée mardi est venue se télescoper avec une autre, parvenue quelques heures plus tard : des sources syndicales affirment que BNP Paribas prévoit de supprimer 921 postes en France sur les 5 142 de sa filiale dédiée au crédit à la consommation, BNP Paribas Personal Finance.
Pour tenter de désamorcer la polémique autour des superprofits, la banque a déjà tenu à souligner dans un communiqué qu’elle était "par ailleurs un contribuable important avec un montant total d’impôts et taxes de 7,2 milliards d’euros payés en 2022", dont 3,85 milliards au titre de l’impôt sur les bénéfices. De son côté, le PDG de TotalEnergies a expliqué dans une interview au Parisien-Aujourd’hui en France, que les résultats du groupe "se font essentiellement dans les pays producteurs d’énergie" où le taux moyen de fiscalité "appliqué est de plus de 50 %". Il a également indiqué que le groupe s’était acquitté de plus de 2 milliards d’euros de contribution sur les superprofits en Europe et au Royaume-Uni en 2022. Mais il s’est aussi dit prêt à refaire un geste commercial, comme l’an dernier, pour ses clients dans les stations-service françaises si le litre de gazole repasse au-dessus des 2 euros. "Plutôt que de partir dans un débat autour d’une taxe exceptionnelle sur les profits, nous préférons prendre des mesures de pouvoir d'achat que les Français ressentent directement", a précisé Patrick Pouyanné. L’ensemble des ristournes à la pompe réalisées ces derniers mois par TotalEnergies lui avait coûté autour de 600 millions d’euros, tout en dopant la fréquentation de ses stations-essence.
Mais, l'annonce des bénéfices record de TotalEnergies ce mercredi n'a pas manqué de faire réagir. Des militants des associations Les Amis de la Terre et Alternatiba ont aspergé de peinture rouge le siège de l'entreprise à Paris La Défense. Ils ont ensuite déployé des banderoles : "Superprofits : vous encaissez, nous subissons". Plusieurs personnalités politiques se sont également exprimées. À gauche, où l’on défend l’instauration d’une taxe sur les superprofits, le député insoumis François Ruffin a déclaré : "On assiste au gavage des uns, au rationnement des autres, c'est une situation scandaleuse". À droite, on est également choqué. Le président du Sénat Gérard Larcher ( LR), s'il se réjouit de la réussite d'une entreprise française, s'est interrogé ce matin sur "le partage de la valeur". "Total bénéficie comme d'autres sociétés profitent d'une situation de crise qui est difficile et douloureuse à porter pour nos entreprises, pour les citoyens, qui fragilise l'économie mondiale", a-t-il confié au micro de France Inter. "Ces bénéfices nous amènent à nouveau à nous interroger sur la répartition des dividendes entre les actionnaires, les salariés, et du rôle et de la place de l'impôt", a-t-il déclaré.
Une question qui agite les débats en France mais aussi à l’étranger, notamment aux États-Unis. Jugeant "scandaleux" les gigantesques bénéfices des compagnies pétrolières l’an dernier, "200 milliards de dollars au milieu d’une crise énergétique mondiale", le président américain Joe Biden entend "quadrupler" la taxe de 1 % sur les rachats d'actions qui est entrée en vigueur en janvier, ce qui, selon la Maison Blanche, encouragerait les entreprises américaines à investir pour le long terme au lieu de favoriser systématiquement les actionnaires. Le président américain a également appelé cette nuit à mettre en place une "taxe minimale" sur les milliardaires. "Le système fiscal n'est pas juste", a déclaré le président américain devant le Congrès.
Les experts :
- Dominique Seux, directeur délégué de la rédaction - Les Echos
- Christophe Barbier, éditorialiste politique, conseiller de la rédaction - Franc-Tireur
- Thomas Porcher, économiste, auteur de "Mon dictionnaire d’économie"
- Nathalie Mauret, journaliste politique - Groupe de presse régionale Ebra
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé