Un vaccin... déjà ?
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C’est la nouvelle que le monde attendait depuis huit mois : un candidat vaccin "efficace à 90 %" contre la Covid-19. L’annonce, faite hier par le laboratoire américain Pfizer et allemand BioNTech, a insufflé une bouffée d’espoir qui a traversé la planète tout entière et littéralement enflammé les marchés boursiers du monde entier.
Pour autant, la prudence et le réalisme sont de mises autour de cette nouvelle qui ne présente pas encore toutes les caractéristiques d’une victoire scientifique. Car le vaccin est toujours en phase de tests et des questions majeurs restent encore sans réponse.
Alors que signifie exactement cette annonce ? Tout d’abord le communiqué diffusé par les sociétés avance que le vaccin en est au tout dernier stade de la phase 3 des essais cliniques, le dernier pas avant la demande d’homologation. Les entreprises estiment que le vaccin candidat (le BNT162b2) montrerait une efficacité de 90 % dans les groupes testés. L’essai a débuté fin juillet et s'est appuyé sur 43 538 participants à ce jour, dont 90 % ont reçu la deuxième dose de ce candidat vaccin le 8 novembre.
L'"efficacité vaccinale" a été mesurée en comparant le nombre de participants infectés par le nouveau coronavirus dans un groupe qui a reçu le vaccin, et dans un groupe sous placebo. La protection des patients testés a été obtenue sept jours après l'injection de la deuxième dose du vaccin, indiquent Pfizer et BioNTech, et 28 jours après la première injection, selon les résultats préliminaires. Mais combien de temps dure l’immunité ?
Le plus fragiles sont-ils aussi immunisés ?
Il n’y a pas assez de recul et d’éléments pour l’instant pour se prononcer sur ces points. On sait en revanche que 94 personnes ont été contaminées parmi les participants (dont 90% ont reçu le placebo plutôt que le vaccin) et que les laboratoires doivent atteindre le seuil de 164 avant de rendre une analyse finale.
D’autre part, pour lutter contre le coronavirus le candidat vaccin de Pfizer et BioNTech utilise une nouvelle technique, celle dite de l’ARN messager. Avec cette technique inédite, on n'injecte pas dans l'organisme des virus inactivés, atténués ou des antigènes - comme c'est normalement le cas - mais des brins d'instructions génétiques, appelées ARN messager : c'est-à-dire la molécule qui dit à nos cellules ce qu'il faut fabriquer. Le vaccin incite ainsi l'organisme à produire des défenses immunitaires contre l'ennemi quand il le rencontre. Mais que sait-on des effets secondaires éventuels ? Les données n’ont pas été communiquées par Pfizer mais les spécialistes notent quand même que depuis le début des essais, il y a quatre mois maintenant, rien n’a entraîné l’arrêt. Quand il y a un effet secondaire grave, la procédure est suspendue. Cela vient tout juste de se produire au Brésil avec un candidat vaccin chinois qui a suscité un effet secondaire grave.
À l’heure actuelle, 47 "candidats vaccins" sont évalués dans des essais cliniques sur l’homme à travers le monde et dix en sont au stade le plus avancé, la phase 3, où l’efficacité du vaccin est mesurée à grande échelle sur des dizaines de milliers de volontaires répartis sur plusieurs continents. Parmi eux, on trouve celui de l’alliance germano-américaine BioNTech-Pfizer, de la société américaine Moderna, de plusieurs laboratoires chinois, ainsi qu’un projet européen mené par l’université d’Oxford avec le britannique AstraZeneca ou encore le vaccin Spoutnik V, développé par la Russie et son institut de recherche Gamaleïa.
L’annonce de BioNTech-Pfizer s’inscrit donc dans une compétition planétaire, rapide comme aucune autre dans l’histoire, aux enjeux financiers énormes et ce alors l’on assiste à une explosion des cas partout dans le monde, et notamment en France. Ainsi alors que l'épidémie de Covid-19 poursuit sa résurgence, avec 551 nouveaux décès enregistrés à l'hôpital en 24 heures, le Premier ministre Jean Castex tiendra jeudi une conférence de presse afin de faire un point sur l’évolution de la situation épidémique et le confinement qui plonge les citoyens dans une morosité et une colère encore plus lourde qu’au printemps.
Alors c'est quoi le vaccin à ARN messager de Pfizer et BioNTech ? Pourquoi cette annonce soulève-t-elle autant d'espoirs ? Qu'en disent les experts ? Calendrier, essais cliniques, financements… Où en est la course au vaccin ? Enfin quelle est la situation en France ?
Invités :
- Dominique Seux, directeur délégué de la rédaction des Échos
- Sophie Aurenche, journaliste au service Reportages à RTL
- Pr.Christian Brechot, virologue - président du Global Virus Network
- Marie-Paule Kieny, directrice de recherche à l’INSERM - spécialiste en santé publique