Chine : ça va mieux, vraiment ?
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Après plus de trois mois de lutte, le pays semble enfin avoir dompté le virus. La Chine en profite donc pour apporter son aide, très médiatisée, à d’autres pays et aussi pour produire et vendre des masques aux pays qui en ont besoin. Mais l’attitude de Pékin déplaît à certains Etats actuellement frappés par l’épidémie.
“La solidarité, ça ne s’instrumentalise pas”. La secrétaire d’État aux Affaires européennes, Amélie de Montchalin, a reproché dimanche dernier, dans l’émission Questions politiques sur France Inter, à la Chine et à la Russie de “mettre en scène” l’aide qu’elles apportent à d’autres pays dans la lutte contre le coronavirus. “C’est parfois plus simple de faire de la propagande, des belles images et parfois d’instrumentaliser ce qui se passe”, a ajouté la secrétaire d’État. “À un moment donné la Chine a eu besoin de nous (…) on a envoyé 56 tonnes de matériel”, a-t-elle rappelé, en référence à l’aide agrégée européenne.
De son côté, Donald Trump a accusé, hier au cours d’une conférence de presse, la Chine d’avoir “sous-estimé” le nombre de morts causés par l’épidémie en Chine. Le président américain se base sur un rapport du renseignement américain relayé mercredi par plusieurs parlementaires. “Le renseignement américain a désormais confirmé ce que nous savions déjà: la Chine a dissimulé la gravité de ce virus pendant des mois”, a résumé le sénateur républicain William Timmons. “Le monde paie à présent pour leurs erreurs”, a-t-il ajouté.
La Chine a enregistré 3.312 morts et 81.554 cas de personnes infectées par le virus, d'après les chiffres officiels. Soit moins que les Etats-Unis, où le Covid-19 a fait à ce jour plus de 4.600 morts et contaminé plus de 209.000 personnes, et bien moins que l’Italie (11.500 morts) ou que l’Espagne, qui vient de passer la barre des 10.000 morts.
Les soupçons de sous-évaluation des morts en Chine se basent sur le nombre de familles qui se présentent ces derniers jours à Wuhan pour récupérer les urnes funéraires contenant les cendres de leur proches. Le magazine économique chinois Caixin a notamment révélé que, le mercredi 25 et le jeudi 26 mars, des camions avaient livré environ 2.500 urnes par jour à un des crématoriums de Wuhan.
Si la situation se crispe entre la Chine et certaines puissances occidentales, d’autres pays sont très heureux de pouvoir compter sur l’aide de Pékin. Le ministre italien des Affaire étrangères, Luigi di Maio, a déclaré que son pays «se souviendrait de ceux qui étaient avec nous dans les moments difficiles». La Chine, qui produit actuellement 116 millions de masques par jour, a annoncé l’envoi de 500 000 masques à l’Espagne et de 2 millions vers l’Italie.
Elle multiplie également les dons vers les pays africains avec qui elle entretient de fortes relations économiques. Sur ce continent, la propagation du virus progresse. Plusieurs pays comme l’Afrique du Sud ou le Nigéria ont décidé de confiner une partie de leur population. Le Covid-19 pourrait faire des ravages dans des pays aux infrastructures sanitaires insuffisantes.
La Chine a-t-elle volontairement minimisé la gravité de l’épidémie ? Que faut-il penser de son positionnement actuel en matière de diplomatie ? L’aide chinoise pour lutter contre le coronavirus est-elle indispensable pour éviter un drame en Afrique ?
Invités :
- Valérie Niquet, responsable du pôle Asie à la Fondation pour la Recherche Stratégique
- Pascal Boniface, géopolitologue, directeur de l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques
- Frédéric Lemaître, correspondant à Pékin du journal Le Monde
- Antoine Flahault, épidémiologiste, directeur de l’Institut de Santé Globale à Genève
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé