Syrie / Turquie : la menace du retour de Daech
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Huit jours après avoir donné un quasi feu vert au président Erdogan pour déclencher son opération contre les Kurdes, Donald Trump appelle la Turquie à mettre fin à son offensive militaire en Syrie et a annoncé, hier, une série de sanctions économiques. Le locataire de la Maison Blanche promet de signer "bientôt" un décret autorisant des sanctions contre trois ministres turcs et qu'il augmenterait les tarifs douaniers sur l'acier. Le président américain s'est également dit prêt à "détruire l'économie turque si les dirigeants turcs poursuivent dans cette voie dangereuse et destructrice". "Les États-Unis veulent que la Turquie mette fin à l'invasion, mette en œuvre un cessez-le-feu immédiat et commence à négocier avec les forces kurdes en Syrie", a indiqué par ailleurs le vice-président américain Mike Pence qui doit se rendre prochainement en Turquie pour tenter de résoudre la crise.
Mais est-ce un début de revirement ou une simple pression pour la forme ? Cela aura-t-il un effet sur le terrain ? Lancée le 9 octobre après le retrait des soldats américains présents dans la zone, l’opération turque contre les Kurdes en Syrie a ouvert un nouveau front dans le conflit qui a fait depuis 2011 plus de 370 000 morts et poussé à la fuite des millions de personnes. Lors d’un échange téléphonique avec son homologue turc, Donald Trump s’est montré "très ferme", a affirmé Mike Pence, qui a assuré que le dirigeant turc s’était engagé à ce qu’il n’y ait "aucune attaque" contre la ville de Kobané. Le chef du Pentagone Mark Esper a de son côté déclaré que l’offensive militaire turque avait entraîné la libération de nombreux détenus "dangereux" de Daech. Washington demandera à l'Otan de prendre des "mesures" contre Ankara, coupable d'avoir "sapé" la mission internationale anti-État islamique dans le pays, a-t-il précisé.
Les autorités kurdes en Syrie avaient annoncé dimanche la fuite de près de 800 proches de djihadistes du groupe EI d’un camp de déplacés, le camp d’Aïn Issa qui se trouve à environ 30 kilomètres au sud de la frontière turque, ayant profité selon elles du chaos sécuritaire créé par l’offensive militaire. Cinq djihadistes de l’EI se seraient également échappés vendredi d’une prison après des raids aériens turcs. Une perspective qui inquiète de nombreux pays, et notamment la France. "Évidemment que nous sommes inquiets par rapport à ce qui pourrait se passer", a ainsi déclaré dimanche soir la porte-parole du gouvernement sur France 3. "Je ne sais pas, aujourd’hui, qui sont exactement les personnalités qui se sont enfuies du camp, c’était depuis le début de cette intervention armée une préoccupation pour la France", a-t-elle insisté, en mentionnant les "djihadistes français dont nous avons toujours considéré qu’ils devaient être jugés sur place".
Jusqu’à présent 12 000 combattants de l’EI, des Syriens, des Irakiens mais aussi 2 500 à 3 000 étrangers originaires de 54 pays, seraient détenus dans les prisons sous contrôle des Kurdes. Les camps de déplacés accueilleraient aussi près de 12 000 étrangers, 8 000 enfants et 4 000 femmes. Mais alors que de violents combats font rage sur le terrain, entraînant plus de 150 morts et l’exode de plus de 130 000 personnes, la situation apparaît de plus en plus chaotique.
Alors que se passe-t-il sur place ? Combien de djihadistes ont–ils été relâchés à la faveur de l’attaque contre les Kurdes ? Dans ce contexte explosif, quelles sont les marges de manœuvre de la communauté internationale ? Pourquoi ce changement de ton de Donald Trump ? Enfin, la Russie est-elle le seul vrai arbitre du conflit ?
Invités :
• Jean-Dominique Merchet, éditorialiste pour L’Opinion, spécialiste des questions Défense et Diplomatie.
• Hala Kodmani, journaliste de Libération.
• Édith Bouvier, journaliste et auteur de "Parfum de djihad".
• David Rigoulet-Roze, chercheur à l’Institut Français d’analyses et de recherches stratégiques (IFAS).
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé