Voile : la polémique et la loi
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Quinze ans après l'adoption de la loi interdisant les signes religieux dans les écoles publiques françaises, le débat sur le port du voile à l'école est relancé, et cette fois, il porte sur les accompagnatrices scolaires.
La question a ressurgi à la suite d’un esclandre provoqué, vendredi dernier, par un élu du Rassemblement national au Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté. Il avait bruyamment demandé à une mère de famille, accompagnatrice lors d'une sortie de la classe de CM2 de son fils d'une école de Belfort, de retirer son voile, avant de publier les images de son coup d’éclat sur les réseaux sociaux.
Depuis la vidéo, devenue virale, a provoqué un tollé dans l’opinion, partagée entre l'indignation, face à cette femme humiliée devant son fils, et la crispation que suscite le port du foulard pour les accompagnatrices de sorties scolaires. 66 % des Français s'y disent hostiles, selon un sondage Ifop publié ce lundi. Quand dans la classe politique, la droite et l'extrême droite multiplient les réactions et les propositions de loi, alors que la majorité se divise jusqu'au sein du gouvernement. Les propos du ministre de l'Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, jugeant après cet incident que "le voile en soi n'est pas souhaitable dans notre société" ayant été autant approuvés que critiqués par des ministres et des élus de LREM.
Pour tenter de clore la polémique, le Premier ministre a été chargé de délivrer, ce mardi, à l'Assemblée, en réunion de groupe puis dans l'hémicycle, la ligne sur la laïcité. Revenant sur ce qui dit vraiment la loi, Édouard Philippe a rappelé que le voile islamique était interdit à l'école mais que la loi n'interdisait pas son port par des étudiantes ou des mères accompagnant les sorties scolaires. "On peut donc porter un voile quand on accompagne une sortie scolaire, mais on n’a pas le droit de faire du prosélytisme, et les autorités peuvent et doivent intervenir si tel est le cas. Voilà l’état du Droit", a-t-il expliqué, rejetant l’idée d’une nouvelle loi sur le sujet comme le proposent les députés Les Républicains.
Néanmoins malgré cette mise au point, le débat du port du voile continue à agiter jusqu'au sein de la majorité ce mercredi. Et le président du Sénat, Gérard Larcher, demande désormais au chef de l’État de s'exprimer sur la laïcité et la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l'État. Le Rassemblement national, qui lance une pétition pour l'interdiction du voile lors des sorties scolaires, se tourne lui-aussi vers le président de la République, auquel il demande de "faire respecter la volonté des Français" et de "légiférer pour interdire le port de signes religieux ostentatoires lors des sorties scolaires". Parallèlement, dans une tribune publiée mardi par Le Monde, 90 personnalités, dont l'acteur Omar Sy, appellent Emmanuel Macron à condamner "l'agression" subie par la mère de famille voilée lors d'une sortie scolaire au Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté.
Pour l’instant, Emmanuel Macron reste silencieux. L’Élysée a toutefois fait savoir que "le président juge irresponsable et dangereux que certains responsables politiques fassent l'amalgame entre le port du voile et la radicalisation". Pour le chef de l'État, "il faut poursuivre la lutte contre le communautarisme et le dialogue avec les instances représentatives religieuses".
Pourquoi le voile divise-t-il encore ? Espace public, travail, école... Que disent les lois de 2004 et 1905 ?
Invités :
• Bruno Jeudy, rédacteur en chef du service politique de Paris Match.
• Raphaëlle Bacqué, Grand reporter du quotidien Le Monde.
• Hakim El Karoui, essayiste et auteur de "L’islam, une religion française".
• Sophie Gherardi, directrice du Centre d'étude du fait religieux contemporain (Cefrelco).
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé