Affaires : Ferrand s'accroche, Mélenchon s'indigne
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Le président de l'Assemblée nationale a été mis en examen dans la nuit de mercredi à jeudi pour "prise illégale d'intérêt" dans l’affaire des Mutuelles de Bretagne, révélée en mai 2017 par Le Canard enchaîné. Richard Ferrand est soupçonné d'avoir fait profiter sa compagne d'une opération immobilière alors qu'il dirigeait cet organisme mutualiste basé dans le Finistère. Dans la foulée, le quatrième personnage de l’État a aussitôt annoncé, dans un communiqué, être "déterminé à poursuivre [sa] mission" à la tête de l’Assemblée, en affirmant vouloir "poursuivre sa défense" pour "obtenir un non-lieu". "Il n’est pas question d’une démission car une instruction n’est en aucun cas une condamnation", a indiqué son entourage.
Cette mise en examen n’en reste pas moins un nouveau coup dur pour le chef de l’État, qui avait promis d’incarner une "République irréprochable" et avait fait de l’exemplarité un de ses marqueurs de la campagne présidentielle. Depuis le début du quinquennat, plusieurs proches ou soutiens de la première heure d’Emmanuel Macron ont en effet dû quitter leurs fonctions à la suite de démêlés judiciaires. Après Richard Ferrand déjà, qui avait dû abandonner son poste de ministre en juin 2017 suite à l’ouverture de l’enquête sur cette affaire des Mutuelles de Bretagne, Sylvie Goulard, François Bayrou et Marielle de Sarnez, avaient eux aussi été contraints de quitter le gouvernement à cause de l’affaire des emplois présumés fictifs des assistants parlementaires du MoDem. Hasard du calendrier, ils ont été entendus ces dernières 48 heures par la police judiciaire dans le cadre de cette affaire. Enfin en juillet dernier, l’ex-ministre de l’écologie, François de Rugy, a dû démissionner pour une polémique sur ses frais de représentation en tant que président de l’Assemblée nationale.
Cette fois, le président de l’Assemblée nationale en exercice est mis en examen, une première. Et depuis ce matin une question se pose : peut-il rester au perchoir ? Pour l’instant ce marcheur de la première heure est un homme très largement soutenu par la macronie : il "garde la confiance" du président de la République, et en réalité c’est toute la majorité qui depuis ce matin apporte son soutien à l’ancien secrétaire général de La République En Marche. Mais dans l’opposition, les avis sont partagés. Car si aujourd’hui bien des partis, le Rassemblement national et la France insoumise prochainement, ont des batailles judicaires en perspective qui les contraignent à l’humilité, des voix s’élèvent pour demander sa démission. "Tout ministre mis en examen devrait démissionner", a ainsi tweeté le secrétaire national du PCF Fabien Roussel dans un rappel à la règle prônée par le gouvernement. "Pourquoi cela ne serait-il pas valable pour le 4e personnage de l'État ?" Une règle également mise en avant par le député LFI François Ruffin exhumant des propos datant de juin 2017 de Christophe Castaner, alors porte-parole du gouvernement, à propos de Richard Ferrand.
À droite, chez les Républicains le ton est nuancé : le président par intérim Jean Leonetti a ainsi rappelé qu’une "mise en examen ne vaut pas condamnation". "C’est un des plus grands personnages de l’État. La décision n’appartient qu’à lui". Au Rassemblement national, l’eurodéputé et membre de la direction Nicolas Bay, lui-même mis en examen dans l’affaire des emplois présumés fictifs du RN au Parlement européen, a estimé que les faits reprochés à Richard Ferrand, "s’ils sont avérés, sont graves". "Pour autant, par principe, la mise en examen (…) ne peut pas en soi suffire à demander la démission d’un mandat", car a-t-il souligné, dans ce cas, "cela aboutit à donner au magistrat un poids absolument considérable et à lui permettre d’interférer dans le débat politique de manière directe".
La démission de Richard Ferrand est en revanche demandée par l'association de lutte contre la corruption Anticor, qui s'est portée partie civile dans ce dossier. Pour nous, a expliqué l’avocat de l’association, "Richard Ferrand doit partir, en raison de l'équilibre des pouvoirs et de la manière dont les institutions doivent fonctionner". Il a également jugé que "cette mise en examen [allait] perturber les institutions".
Alors Richard Ferrand peut-il rester président de l’Assemblée nationale ?
Invités :
• Bruno Jeudy, rédacteur en chef du service politique de Paris Match.
• Caroline Michel-Aguirre, journaliste de l’Obs.
• Jean Garrigues, historien, spécialiste de la vie politique.
• Stéphane Vernay, rédacteur en chef délégué et Directeur de la rédaction parisienne du journal Ouest France.
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé