Tapie : 26 après... la relaxe !
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Bernard Tapie a été relaxé ce mardi par le tribunal correctionnel de Paris, plus de dix ans après l'arbitrage controversé ayant octroyé 403 millions d'euros à l'homme d'affaires pour solder son litige avec le Crédit Lyonnais. L’ancien patron de la marque aux trois bandes était jugé – avec notamment l’actuel PDG d’Orange Stéphane Richard – pour escroquerie et détournement de fonds publics. Il lui était reproché d’avoir cherché à berner l’État pour récupérer cet argent, au milieu des années 2000. Une somme qu’il a touchée en 2008 et qu’il doit théoriquement rembourser.
Pour le tribunal, « aucun élément du dossier ne permet d'affirmer » que la sentence d'arbitrage, définitivement annulée au civil, « ait été surprise par la fraude ou par des manœuvres frauduleuses qui auraient été commises par Monsieur Tapie ». Le jugement précise : « Bernard Tapie a fait preuve d'un activisme important auprès de personnels politiques. Mais il n'est pas rapporté la preuve qu'il ait activé ses réseaux pour que des instructions soient données à qui que ce soit », notamment à Stéphane Richard et aux deux hauts fonctionnaires de Bercy Jean-François Rocchi et Bernard Scemama. « Les éléments constitutifs du délit d'escroquerie ne sont pas caractérisés », a ainsi déclaré la présidente Christine Mée, qui n'a pas retenu l'infraction de « détournement de fonds publics » ou de « complicité » de ce délit.
Une peine de cinq ans de prison ferme avait été requise contre Bernard Tapie par le parquet, qui avait estimé que l'ancien ministre a « truqué » l’arbitrage. D'abord en activant ses soutiens à l'Élysée afin que le pouvoir sarkozyste choisisse la voie arbitrale au lieu de la justice ordinaire. Ensuite en s'assurant de la « partialité » d'un des juges arbitres, qui entretenait des « liens anciens et réguliers » avec son avocat historique Maurice Lantourne. Cet arbitrage lui avait notamment accordé 45 millions d'euros au seul titre du préjudice moral, en réparation d'une « faute » du Crédit Lyonnais lors de la revente de l'équipementier sportif Adidas. Rendu par un tribunal arbitral privé, il était censé mettre un terme au contentieux entre Bernard Tapie et l'ex-banque publique, qu'il accuse depuis vingt-cinq ans de l'avoir floué. Mais la sentence a été définitivement annulée en 2015 au civil pour « fraude » et l'homme d'affaire a été condamné à restituer les millions perçus, dont le montant et les délais de remboursement sont encore débattus. L’ex-ministre de l'Économie Christine Lagarde a, elle, été condamnée l’année suivante pour « négligence » par la Cour de justice de la République.
Ce mardi, les juges du tribunal correctionnel de Paris ont finalement prononcé la relaxe générale des prévenus. Un jugement qui a surpris beaucoup de monde. « C’est stupéfiant », a ainsi réagi sur Europe 1 Laurent Mauduit, auteur de deux livres sur l’affaire. Pour le co-fondateur de Mediapart, « tout cela est absolument incohérent ». « Comment concevoir que Tapie soit relaxé et que dans le même temps, dans une autre procédure pénale, devant la Cour de justice de la République – une autre juridiction mais les mêmes faits –, Christine Lagarde soit, elle, condamnée ? », questionne-t-il. « Comment, alors que les mêmes griefs reposaient sur Stéphane Richard et sur elle, l’une est condamnée, même si c’est de manière modique, et l’autre est absout ».
Malade, Bernard Tapie n’était pas présent au moment du délibéré. Néanmoins celui qui est réputé pour son franc parler a été fidèle à sa réputation. Interrogé par La Provence, le quotidien régional dont il est l'actionnaire majoritaire, il a déclaré depuis son lit d'hôpital : « Je n'ai qu'une seule réflexion : mon cancer vient d'en prendre un sale coup dans la gueule ! » De son côté, son avocat Hervé Temime a estimé « qu’aujourd'hui, le tribunal a rendu avec une indépendance rare un jugement d'une netteté exceptionnelle et c'est pour nous […] une immense satisfaction et une grande libération ».
Pour autant Bernard Tapie n'en a pas fini avec la justice : une dizaine de procédures sont toujours en cours, devant différentes juridictions. Et si le parquet n'a pas encore annoncé s'il allait faire appel de ce jugement, le volet civil de l'affaire donne toujours lieu à des audiences concernant le remboursement des 403 millions d'euros de l'arbitrage.
Invités :
• Christophe Barbier, éditorialiste politique pour L’Express.
• Philippe Dessertine, directeur de l’Institut de Haute Finance.
• Denis Demonpion, éditorialiste politique, auteur de « Tapie - Sarkozy : Les clefs du scandale ».
• Valérie de Senneville, Grand reporter, chargée des questions de justice pour Les Échos.
Présenté par : Caroline Roux