Danyèl Waro « le volcan de La Réunion »
- Arts & spectacles
- 2023
- 1 h 16 min
- indisponible
- tous publics
La Réunion a deux volcans, dit-on : le Piton de la Fournaise et Danyèl Waro.
Planteur, communiste, musicien et mystique, Waro mange dans des feuilles de bananiers et marche sur les braises. A soixante-huit ans, le chantre le plus célèbre de la créolité réunionnaise est une légende vivante. Cet intarissable poète et musicien est devenu la voix du Maloya, le blues de l'île, ancienne danse de la révolte des esclaves devenue chant de revendication de la culture créole. Fils de petit cultivateur, pur créole, sang-mêlé, insulaire insurgé, conscience inquiète contre la facilité, l'uniformisation, l'intolérance, les renoncements, il a grandi dans les champs au sud de l'île.
Nourri de différents apports, musique prolétaire, contestataire et cathartique basée sur les rythmes ternaires et le chant, le Maloya est descendu de l'esclavage et des rituels religieux afro-malgaches. Après la départementalisation de la Réunion en 1946, le Maloya est perçu comme le symbole de la révolte contre l'ordre établi : ce blues insulaire issu du chant des anciens esclaves travaillant sur les plantations de canne a été interdit par les autorités françaises. Le Parti Communiste réunionnais exprimait ses revendications autonomistes à travers cette musique. Le Maloya était joué clandestinement dans les kabars, réunions de musiciens cachées au fond des campagnes. En 1981, avec l'arrivée au pouvoir de la gauche et la libéralisation des ondes, le Maloya revient en pleine lumière.
Danyèl Waro a découvert le Maloya dans les années 70 grâce à Firmin Viry, chanteur et communiste à un meeting politique. « Le Maloya allait me donner la force et le courage de dire non ». Il refuse le service militaire, passe deux ans en prison à Rennes pour insoumission. Danyèl Waro s'enracine ensuite dans son île, son peuple, sa langue. Le Maloya devient nourriture spirituelle. Se réapproprier une langue bafouée : Danyèl Waro a un rapport particulier à l'oralité, sa diction poétique s'inscrit dans le slam contemporain. Il goûte la rythmique des mots, leurs couleurs, leurs saveurs, leurs chocs physiques, qu’il prolonge de son instrument fétiche le kayamb, de sa danse de chamane, de son engagement, corps et âmes sur la scène : un acte physique, une émotion forte. Waro est un chanteur à la peau très blanche et au cœur africain.
«Ma bataille, artistique davantage que politique, était dès l’origine en faveur du Maloya, la musique des défavorisés. Il nous fallait nous réapproprier le créole, cette langue bafouée, interdite à l’école, sur les ondes, à la télévision, sous prétexte de nous inculquer, via un centralisme forcené, la 'langue de la réussite', le français : quelle violence insidieuse exercée contre notre identité ! Comment, dès lors, nous construire ?»
Les paroles créoles touchent par leur rythme, leur musicalité comme en témoigne ce concert enregistré le 3 février 2023 au TÉAT Champ Fleuri à Saint Denis de la Réunion.
Réalisé par : Guillaume Dero