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Esprit d'Arménie au Festival de Fontfroide - Jordi Savall
- Arts & spectacles
- 1 h 15 min
- indisponible
- tous publics
L'Arménie est une des plus anciennes civilisations chrétiennes de l'orient, qui a survécu miraculeusement à une histoire convulsive et particulièrement tragique. Depuis sa fondation, elle se situe politiquement et géographiquement au milieu d'autres grandes cultures imprégnées par des croyances orientales et par la pensée musulmane et a vécu une histoire très douloureuse, ponctuée par des guerres et des massacres extrêmes, qui ont causé la disparition de plus de la moitié de sa population, l'exil de beaucoup d'autres et la perte de grandes parties de son territoire. Malgré cela elle a su conserver l'essence de ses particularités nationales tout au long des siècles, comme le prouve surtout la création de son propre alphabet (en 405 par le moine Mesrop Machtots) et comme le montre aussi son riche patrimoine architectural, éparpillé aujourd'hui, même en dehors de ses territoires actuels. Bien que ce patrimoine tangible en soit un des témoignages les plus frappants, elle a aussi gardé un riche patrimoine intangible, dans le domaine musical: un répertoire très riche et très différencié mais malheureusement assez peu connu (à part celui du duduk). De toutes les cultures développées, la musique – représentée par certains instruments comme par les manières de chanter et de jouer qui peuvent la concrétiser –, devient le reflet spirituel le plus fidèle de l'âme et de l'Histoire des peuples. De tous les instruments utilisés dans ses anciennes traditions musicales, l'Arménie a accordé une préférence particulière à un instrument unique : le duduk, à tel point qu'on peut affirmer que cet instrument la définit d'une manière presque absolue. Dès l'écoute des premiers sons de ces instruments – habituellement ils se jouent en duo – la qualité (presque vocale) et la douceur de ses vibrations nous transportent dans un univers élégiaque et poétique hors norme, et nous entrainent dans une dimension intime et profonde. La musique devient ainsi un véritable baume, à la fois sensuel et spirituel, capable de toucher directement notre âme et, en la caressant, de la guérir de toutes les blessures et de tous les chagrins. Montserrat Figueras avait une profonde sympathie et une grande fascination pour ces instruments arméniens, spécialement le duduk et le kamantcha et aussi une grande admiration pour les extraordinaires qualités musicales de nos amis musiciens d'Arménie. C'est après sa mort que j'ai moi-même trouvé une grande consolation à l'écoute de ces merveilleuses Plaintes à deux duduks et kamantcha, c'est pourquoi je leur ai demandé de venir aux cérémonies que nous avons organisées pour les Adieux à notre chère Montserrat. Leurs interventions musicales ont rempli les lieux des sons d'un autre monde, mais d'une beauté et d'une spiritualité bouleversantes. C'est après ces moments d'une si grande émotion et du fait de l'impact de la profonde consolation que leur musique m'apportait, que j'ai pensé à l'idée de dédier ce projet singulier à la Mémoire de Montserrat Figueras, tout en rendant un hommage personnel à un peuple qui a tant souffert dans son histoire (d'une souffrance qui n'est pas encore reconnue pleinement) et qui, malgré tant de douleur avait inspiré des musiques si pleines d'amour et si porteuses de paix et d'harmonie. En même temps, ce disque se veut aussi un sincère hommage à ces merveilleux musiciens qui consacrent leur vie à maintenir vivante la mémoire de cette ancienne culture. Chance merveilleuse : le très cher ami et grand maître du kamantcha Gaguik Mouradian, m'avait offert – en 2004, déjà – plusieurs recueils de musiques arméniennes, parmi lesquels, le fabuleux “THÉSAURUS” de mélodies arméniennes publié en 1982 à Erevan, par le musicologue Nigoghos Tahmizian, dans lequel j'ai pu trouver les plus beaux exemples de ce répertoire, complétés par les pièces pour kamantcha et celles à deux duduks qu'ont proposé nos amis musiciens d'Arménie. Avec la collaboration d'un autre extraordinaire musicien et aussi très cher ami, le joueur de duduk Haïg Sarikouyoumdjian, j'ai passé plusieurs mois d'étude et de travail quotidien, à déchiffrer les secrets de ces anciennes et très belles mélodies, en écoutant d'anciens enregistrements et en recherchant les clés “secrètes”sur le style et le caractère de chacune de ces musiques. Pendant tous ces derniers mois, il n'y avait pas de nuit que je ne finisse sans passer quelques heures enrichissantes dans l'étude et l'interprétation de ces mélodies au charme puissant. Finalement nous avons trouvé des dates pour les travailler ensemble, et entre la fin du mois de Mars et les premiers jours d'Avril nous nous sommes retrouvés dans la merveilleuse Église Collégiale de Cardona afin d'enregistrer toutes les pièces choisies pour aboutir à cet hommage personnel et collectif dédié à cet envoûtant et élégiaque Esprit d'Arménie. Tout de suite après, et grâce à la collaboration de Lise Nazarian, encore une autre chère amie d'Arménie, nous nous sommes mis à la recherche et à l'étude des éléments complémentaires à la musique pour la réalisation du livret du CD : livres d'art et d'histoire sur l'Arménie, qu'on a trouvés en abondance grâce à Armen Samuelian et Alice Aslanian conservateurs et animateurs de la merveilleuse “Librairie Orientale », rue Monsieur Le Prince, à Paris, et aussi au choix du spécialiste J.P. Mahé pour la présentation d'un article essentiel sur l'Art et l'Histoire de ce pays. En complément, Manuel Forcano a apporté des textes sur la Mémoire du Génocide et sur la chronologie de son Histoire : une histoire que nous espérons pouvoir aider à maintenir vivante grâce à l'émotion qu'apportent les musiques de cet enregistrement. Sans Émotion il n'y a pas de Mémoire, sans Mémoire il n'y a pas de Justice, sans Justice il n'y a pas de Civilisation, et sans Civilisation l'être humain n'a pas de futur. JORDI SAVALL JORDI SAVALL Versailles, le 5 Juillet 2012
En savoir plus L'Arménie est une des plus anciennes civilisations chrétiennes de l'orient, qui a survécu miraculeusement à une histoire convulsive et particulièrement tragique. Depuis sa fondation, elle se situe politiquement et géographiquement au milieu d'autres grandes cultures imprégnées par des croyances orientales et par la pensée musulmane et a vécu une histoire très douloureuse, ponctuée par des guerres et des massacres extrêmes, qui ont causé la disparition de plus de la moitié de sa population, l'exil de beaucoup d'autres et la perte de grandes parties de son territoire. Malgré cela elle a su conserver l'essence de ses particularités nationales tout au long des siècles, comme le prouve surtout la création de son propre alphabet (en 405 par le moine Mesrop Machtots) et comme le montre aussi son riche patrimoine architectural, éparpillé aujourd'hui, même en dehors de ses territoires actuels. Bien que ce patrimoine tangible en soit un des témoignages les plus frappants, elle a aussi gardé un riche patrimoine intangible, dans le domaine musical: un répertoire très riche et très différencié mais malheureusement assez peu connu (à part celui du duduk). De toutes les cultures développées, la musique – représentée par certains instruments comme par les manières de chanter et de jouer qui peuvent la concrétiser –, devient le reflet spirituel le plus fidèle de l'âme et de l'Histoire des peuples. De tous les instruments utilisés dans ses anciennes traditions musicales, l'Arménie a accordé une préférence particulière à un instrument unique : le duduk, à tel point qu'on peut affirmer que cet instrument la définit d'une manière presque absolue. Dès l'écoute des premiers sons de ces instruments – habituellement ils se jouent en duo – la qualité (presque vocale) et la douceur de ses vibrations nous transportent dans un univers élégiaque et poétique hors norme, et nous entrainent dans une dimension intime et profonde. La musique devient ainsi un véritable baume, à la fois sensuel et spirituel, capable de toucher directement notre âme et, en la caressant, de la guérir de toutes les blessures et de tous les chagrins. Montserrat Figueras avait une profonde sympathie et une grande fascination pour ces instruments arméniens, spécialement le duduk et le kamantcha et aussi une grande admiration pour les extraordinaires qualités musicales de nos amis musiciens d'Arménie. C'est après sa mort que j'ai moi-même trouvé une grande consolation à l'écoute de ces merveilleuses Plaintes à deux duduks et kamantcha, c'est pourquoi je leur ai demandé de venir aux cérémonies que nous avons organisées pour les Adieux à notre chère Montserrat. Leurs interventions musicales ont rempli les lieux des sons d'un autre monde, mais d'une beauté et d'une spiritualité bouleversantes. C'est après ces moments d'une si grande émotion et du fait de l'impact de la profonde consolation que leur musique m'apportait, que j'ai pensé à l'idée de dédier ce projet singulier à la Mémoire de Montserrat Figueras, tout en rendant un hommage personnel à un peuple qui a tant souffert dans son histoire (d'une souffrance qui n'est pas encore reconnue pleinement) et qui, malgré tant de douleur avait inspiré des musiques si pleines d'amour et si porteuses de paix et d'harmonie. En même temps, ce disque se veut aussi un sincère hommage à ces merveilleux musiciens qui consacrent leur vie à maintenir vivante la mémoire de cette ancienne culture. Chance merveilleuse : le très cher ami et grand maître du kamantcha Gaguik Mouradian, m'avait offert – en 2004, déjà – plusieurs recueils de musiques arméniennes, parmi lesquels, le fabuleux “THÉSAURUS” de mélodies arméniennes publié en 1982 à Erevan, par le musicologue Nigoghos Tahmizian, dans lequel j'ai pu trouver les plus beaux exemples de ce répertoire, complétés par les pièces pour kamantcha et celles à deux duduks qu'ont proposé nos amis musiciens d'Arménie. Avec la collaboration d'un autre extraordinaire musicien et aussi très cher ami, le joueur de duduk Haïg Sarikouyoumdjian, j'ai passé plusieurs mois d'étude et de travail quotidien, à déchiffrer les secrets de ces anciennes et très belles mélodies, en écoutant d'anciens enregistrements et en recherchant les clés “secrètes”sur le style et le caractère de chacune de ces musiques. Pendant tous ces derniers mois, il n'y avait pas de nuit que je ne finisse sans passer quelques heures enrichissantes dans l'étude et l'interprétation de ces mélodies au charme puissant. Finalement nous avons trouvé des dates pour les travailler ensemble, et entre la fin du mois de Mars et les premiers jours d'Avril nous nous sommes retrouvés dans la merveilleuse Église Collégiale de Cardona afin d'enregistrer toutes les pièces choisies pour aboutir à cet hommage personnel et collectif dédié à cet envoûtant et élégiaque Esprit d'Arménie. Tout de suite après, et grâce à la collaboration de Lise Nazarian, encore une autre chère amie d'Arménie, nous nous sommes mis à la recherche et à l'étude des éléments complémentaires à la musique pour la réalisation du livret du CD : livres d'art et d'histoire sur l'Arménie, qu'on a trouvés en abondance grâce à Armen Samuelian et Alice Aslanian conservateurs et animateurs de la merveilleuse “Librairie Orientale », rue Monsieur Le Prince, à Paris, et aussi au choix du spécialiste J.P. Mahé pour la présentation d'un article essentiel sur l'Art et l'Histoire de ce pays. En complément, Manuel Forcano a apporté des textes sur la Mémoire du Génocide et sur la chronologie de son Histoire : une histoire que nous espérons pouvoir aider à maintenir vivante grâce à l'émotion qu'apportent les musiques de cet enregistrement. Sans Émotion il n'y a pas de Mémoire, sans Mémoire il n'y a pas de Justice, sans Justice il n'y a pas de Civilisation, et sans Civilisation l'être humain n'a pas de futur. JORDI SAVALL JORDI SAVALL Versailles, le 5 Juillet 2012