Chine / Inde : ça peut déraper ?
C dans l'air- 1 h 3 min
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Quand l’Empire du Milieu redessine ses frontières. La semaine dernière, le gouvernement chinois a publié l’édition 2023 de la carte officielle du pays. Un nouveau tracé qui semble faire fi du droit international puisqu'il empiète sur le périmètre de certains de ses voisins asiatiques et même de son allié russe. Concrètement, ces nouvelles délimitations montrent que la Chine rogne sur les zones maritimes philippine, malaisienne et vietnamienne en Mer de Chine méridionale, sur l’État d’Arunachal Pradesh au nord-est de l’Inde – que la Chine considère comme faisant partie du Tibet – mais aussi sur l’île de Bolchoï Oussouriisk qu’elle se partage depuis 2004 avec la Russie. Sur cette nouvelle carte, Pékin s’approprie également le glacier de l’Aksai Chin, frontalier de l’Inde et qui est à l’origine de tensions entre les deux pays depuis des dizaines d’années. Taïwan, territoire qu’elle considère comme l’une de ses provinces, est également placé sur l’espace appartenant à la Chine.
Pékin s’étale et s’attribue 100 000 km2 supplémentaires avec cette nouvelle carte, illustrant une nouvelle fois la volonté expansionniste du pays dirigé par Xi Jinping, au risque d’accroître les tensions avec certains de ses voisins. A commencer par l’Inde qui a adressé une "vive protestation" par voie diplomatique. "Nous rejetons ces affirmations car elles n’ont aucun fondement. De telles mesures prises par la partie chinoise ne font que compliquer le règlement de la question frontalière", a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Arindam Bagchi. L’Inde dirigée par le Premier ministre nationaliste Narendra Modi joue, sans trop le clamer, le jeu d’une alternative stratégique à la Chine et se montre préoccupée par l’expansion militaire de son voisin. Leur frontière commune, longue de 3 500 kilomètres, est ces dernières années régulièrement une source d’accrochages. Les deux armées n’hésitent plus en effet à aller au contact. En décembre 2022, dix soldats indiens et quatre militaires chinois ont perdu la vie durant l’un d’eux.
Le sujet sera forcément abordé lors du G20 des 9 et 10 septembre à New Delhi où se rendra le Premier ministre chinois, Li Qiang, mais pas le numéro un chinois, sauf coup de théâtre de dernière minute. Le ministre des Affaires étrangères indien a donné un aperçu de l’ambiance dans laquelle se dérouleront les prochains échanges. Il s'est exprimé mardi dernier sur le plateau de la chaîne indienne NDTV : "C’est une vieille habitude chez eux, ça a commencé dans les années 50. Nous connaissons précisément l’étendue de notre territoire, les frontières que nous devons défendre. Donc faire ce genre d’affirmations absurdes ne conduira personne à s’approprier le territoire des autres. Que les choses soient claires." Le pays a débuté ce lundi des manœuvres militaires le long de sa frontière avec la Chine.
Il y a deux semaines le président Xi Jinping avait discuté avec le Premier ministre indien Narendra Modi lors d'une rare rencontre en face-à-face lors du sommet des Brics en Afrique du Sud. Les deux parties avaient convenu d' "intensifier les efforts" de désengagement et de désescalade, mais la publication de cette carte vient raviver les tensions entre les deux géants d’Asie, deux puissances nucléaires que tout oppose.
Alors pourquoi la Chine a-t-elle décidé de redéfinir ses frontières au risque d’une nouvelle escalade des tensions avec l’Inde ? Un affrontement global est-il possible entre ces deux pays ? Quelles sont les ambitions de l’empire du Milieu et de l’Inde ? Enfin la stratégie de l’Arabie saoudite, mêlant soft power et autonomisation diplomatique, porte-t-elle ses fruits ?
Nos experts :
- Antoine Bondaz, chercheur spécialiste de la Chine - Fondation pour la recherche stratégique
- Philippe Dessertine, directeur de l’Institut de Haute Finance et auteur de "Le grand basculement"
- Sylvie Matelly, économiste - Directrice adjointe de l'IRIS - Institut de Relations Internationales et Stratégiques
- Pierre Haski, chroniqueur international - France Inter et L’Obs
- Emmanuel Derville, (en duplex de New Delhi), correspondant en Asie du Sud - Le Figaro
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé
Maison de production : France Télévisions / Maximal Productions