1900 milliards... le pari risqué de Biden
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Après des heures de débats, de négociations et un vote marathon sur de nombreux amendements, le Sénat américain a approuvé samedi le plan de 1 900 milliards de dollars voulu par Joe Biden pour relancer la première économie mondiale, frappée par la pandémie de Covid-19. "Nous avons fait un pas de géant pour venir en aide aux Américains", s’est félicité, depuis la Maison-Blanche, le président des Etats-Unis, qui avait fait de ce plan de soutien massif l’une de ses promesses de campagne.
Adopté grâce aux seules voix des sénateurs démocrates, le texte doit être examiné à partir de ce mardi à la Chambre des représentants où les démocrates, majoritaires, devraient l’approuver rapidement pour que Joe Biden puisse le promulguer d’ici le 14 mars et éviter la suspension du versement d’allocations-chômage.
"Cette loi va accorder plus d’aides à plus de gens que tout ce que le gouvernement fédéral a fait pendant des décennies", s’est félicité le chef des démocrates, Chuck Schumer, juste avant le vote final. Jamais auparavant le Congrès n’avait dépensé autant d’argent "de façon aussi incohérente ou après un processus aussi peu rigoureux", a rétorqué le chef de la minorité républicaine, Mitch McConnell.
Dans le détail, le plan Biden prévoit plusieurs dizaines de milliards de dollars pour l’accélération du rythme des vaccinations et le déploiement de tests, mais aussi 130 milliards de dollars pour aider les écoles et lycées à rouvrir malgré la pandémie. De nouveaux chèques d’aide d’un montant de 1 400 dollars devraient être envoyés aux Américains, selon leur niveau de revenus, ainsi que 350 milliards de dollars d’aide aux États et aux collectivités locales. Le versement des allocations-chômage sera lui prolongé jusqu’au 30 septembre 2021. En revanche, la hausse du salaire minimum à 15 euros par heure, souhaitée par le président des Etats-Unis, n’en fait pas partie, ayant été retoquée au sénat.
L’idée du plan Biden est d’inonder l'économie américaine de liquidités dans les jours qui suivront le vote pour propulser résolument l’économie américaine vers la reprise, sans risque de rechute. Joe Biden assume une posture très keynésienne qui s'inscrit néanmoins dans une certaine continuité puisque deux autres plans ont déjà été adoptés début le début de la crise sanitaire. Fin mars, Donald Trump avait fait voter un premier plan de sauvetage de 2 200 milliards de dollars, soit 10 % du PIB américain. Fin décembre, le Congrès ajoutait 900 milliards. Mais ce n'était qu'un acompte, dit aujourd'hui Joe Biden en mettant la dernière main à ce plan encore plus massif. En un an, le pays du libéralisme aura donc injecté plus d'argent public dans son économie que la plupart des autres pays développés pour faire repartir la machine.
Mais avec quels résultats ? L'économie, de fait, repart plus vite qu'ailleurs. La croissance devrait atteindre + 3,6 % cette année selon les prévisions du Conférence Board, organisme qui fait autorité. Après un recul limité de - 3,6 % en 2020. Mais c’est surtout du côté de l'emploi que l’on s’attend à un fort rebond : les économistes prévoient en moyenne entre 5,5 et 6,5 millions d'emplois en plus cette année, ce qui en ferait la meilleure année depuis la Seconde guerre mondiale. Néanmoins ça n'effacerait pas tous les effets de la crise : 9,4 millions d'emplois ont disparu l'an dernier aux Etats-Unis. Par ailleurs, si les économistes s’accordent à dire que la reprise américaine sera rapide, certains, comme Olivier Blanchard, l'ex-chef économiste du FMI, ou Larry Summers, ancien conseiller de Bill Clinton, craignent que ce plan ne conduise à "une surchauffe de l’économie" et à un regain d'inflation. A l’inverse la cheffe économiste du FMI Gina Gopinath juge ces craintes d'une inflation hors de contrôle aux Etats-Unis exagérées. "L'expérience des quatre dernières décennies rend peu probable, même avec l'enveloppe budgétaire proposée, que les États-Unis connaissent une flambée des pressions sur les prix qui pousseront constamment l'inflation bien au-dessus de l'objectif de 2 % de la Fed", a-t-elle expliqué.
Alors que va-t-il se passer ? Quel sera l’impact de ce plan de sauvetage gigantesque ? Et quel bilan tirer des premiers pas de Joe Biden à la Maison-Blanche ? Le nouveau président américain - qui entend lancer une série de réformes éclair lors de ses 100 premiers jours - a déjà annulé une partie des mesures prises par Donald Trump durant son mandat. Et si sa priorité absolue est donnée à la lutte contre le Covid-19 et la relance de l'économie, Joe Biden veut aussi tenir rapidement certaines promesses de campagne, notamment sur l'environnement. Sa première décision en dit d'ailleurs long sur le changement de direction opéré par la nouvelle administration : le retour des Etats-Unis dans l'Accord de Paris. Un décret emblématique comme nombre de ceux qui suivront. De l'arrêt du financement du mur avec le Mexique, au masque obligatoire dans les bâtiments fédéraux, en passant par l'accès de tous les Américains à une couverture médicale ou la promotion du "Made in America", le nouveau président veut être sur tous les fronts et défend une relance verte sur le modèle du New Deal des années 1930. Sera-t-il pour autant le Roosevelt du XXIe siècle ?
Invités :
- Philippe Dessertine, économiste
- Pierre Haski, chroniqueur international, France Inter et L’Obs
- Nicole Bacharan, historienne et politologue spécialiste des Etats-Unis
- Marie-Cécile Naves, politologue, directrice de recherches à l’IRIS, spécialiste des Etats-Unis
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé