Manifestations, évacuations : la police va trop loin ?
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Les images ont fait le tour du monde et la polémique ne faiblit pas. Vendredi 28 juin, alors que le mercure atteignait un record historique, des centaines de personnes s'étaient rassemblées près du pont de Sully qui relie les 4e et 5e arrondissements de Paris, à l'appel du groupe international Extinction Rébellion. Ils souhaitaient alerter sur l'urgence climatique, en usant de méthodes de désobéissance civile non-violente, comme s'asseoir sur la rue. Mais alors que certains ont tenté de bloquer la circulation, des policiers les ont rapidement délogés, en faisant parfois usage de gaz lacrymogène, comme l'ont montré des vidéos prises par des journalistes sur place.
Relayées depuis des milliers de fois sur les réseaux sociaux, ces images ont suscité une vague d'indignation en France, mais aussi au-delà. Greta Thunberg, la jeune activiste suédoise de 16 ans qui a lancé le mouvement « Fridays for the future », a interpellé sa communauté via son compte Instagram, en partageant la séquence et en rappelant au passage que la France venait de connaitre un record de température, avec 45.9°C : « Ce n'est pas le ‘nouveau normal’. C'est juste le début de la démolition et de l'urgence climatiques. Regardez cette vidéo et demandez-vous : qui défend qui ? » L'actrice Marion Cotillard, très engagée en faveur du climat, a également réagi sur son compte, dénonçant des vidéos « insoutenables ». « Cher gouvernement français, pouvez-vous m'expliquer ces images ? », a-t-elle apostrophé. Le réalisateur et militant écologiste Cyril Dion a de son côté indiqué samedi soir qu'il refusait sa promotion dans l'ordre du Mérite, en guise de protestation. « Comment accepter d'être décoré par un gouvernement qui fait usage d'une telle violence à l'encontre d'une partie de sa population ? », s'est-il interrogé dans un message posté sur Facebook.
Plusieurs responsables politiques ont également dénoncé l'intervention de la police. « Ce ne sont pas des bombes d'eau pour rafraîchir les militants pacifiques venus alerter sur le climat. Ce sont des bombes lacrymo. Ça ne se passe pas dans une dictature. Ça se passe en France », a dénoncé sur Twitter le premier secrétaire du PS, Olivier Faure. « Le seul gaz que le gouvernement connaît c'est la lacrymo contre les jeunes qui demandent des actions contre le réchauffement climatique », a renchéri Manon Aubry, députée européenne La France insoumise.
Du côté du gouvernement, Christophe Castaner a demandé un rapport au préfet de police de Paris. « À la demande du ministre, une inspection technique CRS a été déclenchée et un rapport a été demandé au préfet de police sur les modalités de gestion de cette opération de maintien de l’ordre rendue nécessaire pour rétablir la circulation au cœur de Paris », a déclaré la place Beauvau. Le ministre de l'Environnement a reconnu que les images l'avaient surpris : « Quand j’ai vu ça, je me suis posé des questions », a indiqué sur BFM François de Rugy. Pour autant, il dédouane l'action des CRS face à ce qu'il décrit comme « des manifestants très radicaux ».
Cette affaire intervient quelques jours après une autre opération de police controversée lors de la Fête de la musique à Nantes. Ce soir-là, 14 personnes ont été secourues après être tombées dans la Loire et une personne est toujours portée disparue. Une enquête a été ouverte pour disparition inquiétante et le ministre de l’Intérieur a saisi l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) pour faire la lumière sur les conditions d'intervention des forces de l'ordre.
Violence disproportionnée, absence de matricule, recours abusif aux lanceurs de balles de défense (LBD)... Depuis le mois de novembre, plus de 555 signalements ont été transmis à l’IGPN, donnant lieu à 265 enquêtes. Aucune poursuite n’a encore été engagée.
Alors que s’est-il passé à paris et à Nantes ? Comment fonctionne la « police des polices » ? Quelles sont ses méthodes ? Le maintien de l’ordre à la française est-il à un tournant ? Doit-il évoluer ? Avec quels moyens ? Et avec quelles méthodes ?
Invités :
- Yves Thréard - Éditorialiste et directeur adjoint de la rédaction du journal Le Figaro.
- Camille Polloni - Journaliste Police-Justice pour le site d’information Les Jours.fr
- Jean-Marc Bailleul - Secrétaire général du Syndicat des Cadres de la Sécurité Intérieure (SCSI-CFDT).
- Nicolas Chapuis - Journaliste reporter au Monde, chargé de la rubrique Police-Justice.
Présenté par : Caroline Roux, Laurent Bazin