Les 4 vérités - Antoine Frérot
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Chroniqueuse : Caroline Roux
Caroline Roux reçoit Antoine Frérot, PDG de Veolia.
Invité sur notre plateau, il est venu défendre son projet de racheter son concurrent historique, Suez.
Un projet ambitieux
Dimanche 30 août, Antoine Frérot secoue les marchés financiers, les acteurs du secteur et les observateurs en annonçant son intention de racheter à Engie l’essentiel de ses parts (29,9 %) dans Suez, avant de lancer, dans un second temps, une OPA sur le reste des actions.
Son ambition : construire le « champion mondial de la transformation écologique », un géant français pesant plus de 40 milliards d’euros, sur fond de compétition accrue – chinoise notamment. Un plan « gagnant pour tous », à l’écouter.
Et pour cause, Antoine Frérot le sait : un mariage avec Suez créerait une position ultra-dominatrice dans l’eau en France, inacceptable pour les autorités de la concurrence. C’est que les deux groupes se partagent l’immense majorité des concessions. Aussi croit-il avoir trouvé la parade : s’il parvient à racheter Suez, l’eau en France (11 000 salariés) serait aussitôt revendue à un fonds d’infrastructure français, Meridiam. Suffisant ? « La concurrence sera quand même dégradée », juge l’économiste Stéphane Saussier, spécialiste des concessions.
La décision est entre les mains d'Engie mais aussi du gouvernement, actionnaire de référence du groupe de Jean-Pierre Clamadieu, qui a répété à maintes reprises ne pas vouloir trancher dans la précipitation.
Le dilemme d’Engie
Le conseil d’administration d’Engie doit se prononcer mercredi 30 septembre, au plus tard, sur l’offre d’achat par Veolia de 29,9% du capital de Suez. Le PDG de Veolia, l’a martelé ces derniers jours : il ne prolongera pas le calendrier de son offre, malgré la tentative de conciliation menée samedi par le ministre de l’Économie, qui appelle depuis plusieurs jours à une temporisation. « Nous n'avons pas besoin d'une prolongation, mais d'une décision », a de nouveau insisté Antoine Frérot, pour expliquer son absence à la réunion organisée samedi 26 septembre par Bercy.
Veolia ne veut pas laisser plus de temps à Engie, car le groupe estime que toutes les parties ont désormais besoin de clarté, quel que soit le sens de la décision. Antoine Frérot craint aussi que la direction de Suez, farouchement opposée à un rachat par son concurrent, profite d’une éventuelle prolongation pour trouver de nouveaux moyens de défense.
La stratégie de Veolia
Pour forcer la décision, Antoine Frérot a annoncé que son groupe allait augmenter le prix proposé à Engie, actuellement fixé à 15,5 euros par action Suez. « Le prix de l'offre sera amélioré, mais je ne dis pas combien », a-t-il déclaré. Le chiffre de 17 euros circule depuis quelques jours, sachant que le plus haut historique de l’action Suez est de 18,95 euros, touché au printemps 2008, quelques semaines après l’introduction en Bourse du groupe de gestion de l’eau et des déchets. Cela coûterait quasiment 10% de plus à Veolia, soit près d’un milliard d'euros pour 100% du capital de Suez, valorisé environ dix milliards d'euros au prix initial.
Selon Antoine Frérot, « Veolia a les moyens financiers de remonter son offre en respectant sa discipline financière ». L'augmentation de capital envisagée « serait d'un montant limité » et la « dette financière sur Ebitda resterait inférieure à trois fois dès la deuxième année après l’OPA », a précisé le PDG de Veolia.
Antoine Frérot a également promis des améliorations sur l’ensemble des points de précision demandés par Engie. « Les engagements sociaux sont formalisés dans le courrier qui sera transmis au conseil d'administration d’Engie », a indiqué le PDG de Veolia. Meridiam, appelé à acheter Suez eau France, peut permettre à Veolia d'obtenir le feu vert de l'Autorité de la concurrence, mais aussi pour alléger la facture, a promis les mêmes engagements de son côté.
Concernant la gouvernance, Antoine Frérot se dit ouvert. Sur les douze membres du comité exécutif (Comex) du nouveau groupe, quatre à cinq personnes pourraient venir de Suez. « Ce serait la même chose dans les rangs de direction par pays », a ajouté Antoine Frérot. « Suez compte dans ses rangs plusieurs profils compatibles avec les besoins de Veolia, dont la pyramide des âges est plus vieille que celle de son concurrent », analyse une source industrielle, qui connaît bien les deux groupes. Certains dirigeants de Suez eau France pourraient également être tentés par le rachat de Meridiam et un intéressement au capital.
Même le conseil d’administration de Veolia est prêt à faire une place à Suez. « Le conseil d’administration de Veolia accepte l'idée de mixer le conseil. Il accueillerait un administrateur salarié venant de Suez », a indiqué Antoine Frérot. En revanche, compte tenu des échanges belliqueux entretenus ces derniers jours entre les deux directions, et de l’énergie déployée pour échapper à Veolia, Bertrand Camus, le directeur général de Suez, serait condamné au départ si la fusion aboutit.
Selon deux sources, Philippe Varin aurait évoqué avec Bercy l’hypothèse de prendre la présidence non exécutive du groupe fusionné, si l’opération devait se faire. Ce que dément formellement un proche de Suez.
A trois jours du conseil d’administration tenu au siège d’Engie, la bataille continue de faire rage entre ces deux mastodontes industriels de l’eau et des déchets.