J’ai quitté le père de mes enfants pour une femme
La maison des Maternelles- 13 min 7 s
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Découvrir son homosexualité
Avant de découvrir son homosexualité, Clémence était très heureuse dans sa vie de famille auprès de son compagnon et de leurs deux enfants :
« Avec Mathieu, on s’est rencontré en 2007, j’avais 22 ans. 5 ans plus tard, on a eu notre premier enfant et notre 2ème, 2 ans après. On avait acheté notre maison. On construisait notre vie. À ce moment-là, Mathieu était la personne avec qui je pensais rester toute ma vie. Je n’avais pas de doute. Ce que j’ai découvert de moi après, n’était pas du tout prévu. »
À 34 ans, alors que ses enfants, Louis et Marin, ont 5 et 7 ans, le départ d’une de ses salariés va bouleverser sa vie :
« Marie travaillait en temps partiel dans le café-concert que je tiens à Cherbourg. Elle était également ingénieure dans une entreprise. Un jour, elle m’a dit qu’elle ne pouvait plus concilier ses deux emplois et elle a rompu son contrat avec nous. C’est là que je me suis rendu compte que son départ me faisait plus d’effet que ça aurait dû. Sans doute, avant, je me mettais des barrières. J’étais en couple, mère de deux enfants et nous avions une relation d’employeur - salariée… Mais son départ me touchait beaucoup, j’ai compris que j’étais plus attachée à elle que je ne le pensais. En fait, j’étais bouleversée. »
C’est la première fois que Clémence éprouve ce type de sentiment pour une femme. Cette soudaine attirance provoque chez elle « un tsunami émotionnel » comme elle le décrit :
« C’était soudain, violent. Pendant environ 6 mois, j’ai gardé ça pour moi. Je n’en ai parlé ni à Mathieu, ni à Marie. Je devais d’abord faire le point avec moi-même. Avec le recul, je pense que c’était en moi depuis longtemps mais je me mentais à moi-même, je me suis interdit ce chemin-là. J’aurais pu en parler à des amis ou de la famille, notamment à ma sœur, mais j’avais peur. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Je savais que j’éprouvais des sentiments amoureux pour Marie mais je ne savais pas si je souhaitais que ça se concrétise. D’un côté, ce n’est peut-être pas plus mal d’en avoir parlé à personne car j’ai pu peser le pour et le contre, sans que personne ne m’influence. Mais d’un autre côté, je me suis sentie très seule à ce moment-là. »
Le courage de suivre son cœur
Après des mois de réflexion, Clémence prend conscience qu’assumer son homosexualité ne fera pas d’elle une mauvaise mère. Quoiqu’il arrive, elle aime ses enfants. Elle sait qu’elle fera tout pour qu’ils vivent ce bouleversement le mieux possible. Soulagée de ce poids, elle prend la décision de sortir du silence :
« J’ai pris la décision de parler à Marie. J’avais ce besoin vital de lui en parler. Pourtant, je ne savais pas si elle était homosexuelle ou hétérosexuelle. Je ne savais même pas si elle était en couple. Je ne l’avais jamais vu avec quelqu’un mais je ne connaissais pas sa situation amoureuse… Marie est quelqu’un d’assez réservée, pudique. Je ne savais pas si les sentiments que j’éprouvais pour elle étaient réciproques. Je pouvais tout-à-fait me prendre un râteau. Et heureusement, pas de râteau : c’était réciproque ! »
Clémence doit alors annoncer à son mari qu’elle le quitte pour une femme. Un choc pour le père de famille :
« Il a été surpris, déboussolé, comme toute ma famille d’ailleurs. Son incompréhension était normale. Ce n’était pas tant le fait que je sois amoureuse d’une femme, c’était notre séparation qui était difficile. Pour moi, c’était un changement de vie. Je ne voulais pas qu’il souffre. J’ai essayé de faire au mieux. »
Pour les enfants, le couple décide d’annoncer les choses progressivement. D’abord la séparation, puis dans un deuxième temps, la jeune mère explique à Louis et Marin qu’elle a rencontré une amoureuse qui s’appelle Marie. Une annonce qui n’a pas du tout perturbé les enfants :
« La seule réaction, ça a été Marin, mon plus jeune, qui a dit : « Ça, ce n’est pas comme tout le monde ! » C'est vrai, ce n'est pas comme tout le monde. Ça a ouvert la discussion sur le fait que ça existe, que ce n'est pas pour ça qu'on n'est pas heureux. Bien au contraire. Que le plus important, c'est l'amour qui règne dans la famille, que ce soit avec un homme ou une femme. À chaque fois qu'il y a eu des interrogations sur ce sujet, mon rôle à moi était d'ouvrir la discussion. Car s’ils l'abordaient, c'est qu'ils avaient envie d'en discuter. À l’adolescence, il y aura peut-être de nouveaux questionnements, je serai à leur écoute, attentive. Pour moi, la communication c’est la clé. »
Une famille heureuse
Les préjugés, les réflexions, le rejet dont les enfants pourraient être victimes ont, bien sûr,fait partie des craintes de la jeune femme. Mais celle-ci est rassurée par les évolutions de la société sur ces questions :
« Aujourd’hui, quand on regarde la télévision, on voit des publicités, des téléfilms qui mettent en scène des couples homosexuels, des familles homoparentales. ça me soulage beaucoup de voir qu’il y a d’autres schémas qui sont proposés. Ça se normalise. Cet été, j’ai annoncé sur les réseaux sociaux être en couple avec Marie, j’ai reçu une vague de bienveillance à laquelle je ne m’attendais pas. »
Par son expérience, Clémence veut rassurer celles et ceux qui vivent ce bouleversement et qui n’osent pas l’assumer. Malgré les doutes et les peurs, au bout du chemin, c’est souvent beaucoup de bonheur ! Elle conseille aussi aux couples qui se sépareraient pour les mêmes raisons de laisser aux enfants et à l’entourage du temps pour se faire à l’idée :
« Il faut se mettre à la place de l’autre. Pour l’entourage aussi, c’est déroutant. Quand j’en ai parlé à ma famille, je leur ai expliqué que ce n’était pas un coup de tête, que j’y avais beaucoup réfléchi et qu’aujourd’hui c’était comme ça : je voulais vivre avec Marie mais que c’était à eux de me dire lorsqu’ils seraient prêts à la rencontrer. Pour certains, ça a été immédiat. Pour d’autres, ça a pris plus de temps. Au bout d’une petite année, Marie était acceptée par tous. Le temps fait bien les choses, j’en suis la preuve vivante. Aujourd’hui, tout le monde est apaisé et nos enfants sont épanouis. »