Accoucher sous X
La maison des Maternelles- 6 min 28 s
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LMDM : Qui sont les femmes que vous suivez dans le cadre d’un accouchement sous X ?
Katia Nardin-Godet : On rencontre plusieurs cas dans l’accouchement sous X :
- Les femmes qui n’ont pas été suivies pendant la grossesse, qui viennent accoucher, qui confient le bébé, et qui repartent quelques heures après. On ne sait rien de leurs motivations ou difficultés…
- Il y a celles qui vivent un déni de grossesse (partiel, tardif voire parfois quasi-total) et qui font ce choix parce qu’elles ne peuvent pas en faire d’autre, le délai d’IVG étant dépassé.
- Et il y a des femmes qui -pour de nombreuses raisons différentes et qui leur appartiennent- ne veulent pas avoir recours à l’IVG, qui ne se sentent pas de garder cet enfant mais qui vont tout faire pour qu’il grandisse bien : ne pas boire d’alcool, faire attention à ce qu’elles mangent, faire leur suivi médical… Et ensuite il y a l’idée d’un passage de relai (ou don) : "Je fais ma partie du job et après je sais que cet enfant aura une vie meilleure avec une autre famille."
- Il y a aussi des femmes qui ont des regrets, et qui parfois reviennent sur leur décision. Il y a 2 mois de délai de rétractation. Il y a aussi le temps à la maternité : certaines femmes peuvent revenir sur leur décision si c’est trop lourd.
Qui parle à l’enfant une fois le départ de sa mère biologique ? Est-ce qu’on lui raconte son histoire ? Est-ce qu’on lui explique ce qui va se passer ?
Oui, il y a plein de personnes qui peuvent parler au bébé. En priorité, la mère de naissance si elle le souhaite, le père biologique s’il est là. Ils peuvent parler à l’enfant. Dans ce cas j’essaye d'être là pour voir comment parler à ce bébé, aider à choisir ce qu’on lui dit et qui l’aidera à grandir, versus ce qui va être indigeste voire toxique pour lui. Cela peut-être dit aussi de façon indirecte, les parents biologiques peuvent ne pas vouloir rencontrer le bébé mais veulent que des éléments lui soient transmis, donc je suis porte-parole auprès du bébé, je vais prendre le temps de lui expliquer des choses. Il y a toute l’équipe médicale qui va accueillir le bébé si la mère de naissance n’a pas envie d’être en contact avec lui. La sage-femme en salle de naissance, puis les puéricultrices en pédiatrie. On a fait un gros travail à l’hôpital pour réfléchir à quoi dire à un bébé : ce qu’on lui dit, ce qu’on ne lui dit pas. On retrace dans le dossier de l’enfant les propos qu’on lui a tenus. Pour qu’on puisse éventuellement réajuster, et qu’on ne soit pas 15 à lui répéter la même chose. Pour finir, on a créé un album au CHU d'Angers sur les premiers moments de vie du bébé : il est rempli par les soignants, il raconte le premier bain, biberon, câlin… Tous les souvenirs qui ne seront pas transmis à l’enfant par son histoire familiale. On met des photos, on raconte des petits moments, et le bébé part de la maternité avec son album. Ensuite, si la mère confirme son projet de faire adopter son bébé, c’est le service adoption qui vient prendre le relai, et qui va venir expliquer au bébé ce qu’il se passe de la légalité : « Voilà comment les choses vont se passer maintenant, qui va prendre soin de toi. » Et puis la famille d’accueil temporaire va venir le rencontrer aussi.
Une femme qui accouche sous le secret peut-elle garder un lien de filiation avec l’enfant tout en le faisant adopter par une autre famille ?
Oui, en fait il y a 6 modalités différentes décrites par la loi dans le cadre de l’accouchement sous X. La mère peut laisser des éléments identifiants : ses coordonnées, son nom, etc, comme l’a fait Alexandrine. Ou bien laisser des éléments non-identifiants : la couleur de ses yeux, ses loisirs, ses origines… Ensuite, il y a plusieurs façons de maintenir ou non la filiation :
- accoucher sous le secret, confier l’enfant à l’adoption sans lien de filiation : c’est une adoption plénière.
- accoucher sous le secret, établir finalement un lien de filiation mais remettre l’enfant à l’adoption. Ce sera alors une adoption dite « simple », la filiation sera maintenue avec la mère de naissance, l’enfant pourra porter le nom de ses parents adoptifs mais aussi celui de sa mère de naissance éventuellement, et hériter de l’ensemble de ses parents. Dans ce cas de figure très spécifique, on peut aussi se demander si l’adoption est vraiment le projet de la mère de naissance, ou si peut-être elle raconte que pour l’instant elle ne peut pas s’occuper de l’enfant mais qu’elle espère bien pouvoir le faire un peu plus tard, et dans ce cas, on pourrait plutôt être dans le cadre d’un projet de placement temporaire de l’enfant.