René Frydman témoigne de 40 ans de pratique en maternité
La maison des Maternelles- 9 min 34 s
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LMDM – Au travers de votre expérience, peut-on dire qu’il n’y a rien à voir entre un accouchement aujourd’hui et un accouchement il y a 40 ans ?
René Frydman - Physiologiquement c’est toujours la même chose. C’est ainsi depuis que le monde est monde. D’ailleurs dans le livre je pars de la mythologie jusqu’à la science-fiction. L’accouchement reste l’accouchement, c’est l’environnement qui a changé. C’est-à-dire le respect plus prononcé de la femme, du couple. Par exemple, à titre personnel, je n’ai pas pu assister à l’accouchement de ma femme car les hommes n’étaient pas autorisés à rentrer dans une salle d’accouchement. Bien sûr il n’y avait pas de péridurale, pas d’échographie pas d’amniocentèse… Mais le plus important c’est la réflexion qui se passe aujourd’hui sur le fait que ces moments qui sont assez brefs dans une vie -cela correspond à 2, 3 jours- vont rester gravés tout le temps. Donc on va jouer sur l’émotion et éviter les violences.
Quelles sont les difficultés actuelles ?
Le combat actuel consiste à respecter ce que veut un couple qui souhaite des enfants. C’est cela qui est difficile car parallèlement les maternités ont grossi, elles se sont regroupées. Donc c’est devenu un peu plus médical, usine, technique… En même temps il y a des choses qui sont nécessaires pour la sécurité. Mais il y a toujours du travail concernant l’accompagnement.
Quand vous travaillez dans une équipe il y a beaucoup de personnes impliquées : sage-femme, infirmier, anesthésiste, gynécologue… Il suffit qu’il y en ait un qui ne soit pas tout à fait sur la même ligne pour que le château de cartes s’écroule. C’est un travail important de culture et d’idéologie qu’il faut mettre en place.
On apprend énormément de choses sur l’histoire de la médecine obstétricale dans votre livre. Par exemple entre le 17 et le 19ème siècle, à cause de la fièvre puerpérale, la mortalité maternelle était estimée à 25%...
Il y a eu des périodes à Port-Royal, à Paris, où il y avait effectivement des taux de 20, 25% de mortalité. Et je rends d’ailleurs hommage à Semmelweis qui n’est pas assez connu. C’était un médecin autrichien qui a inventé l’hygiène. Il s’est battu pour que les médecins et les sages-femmes se lavent les mains pour éviter de transmettre cette fameuse fièvre puerpérale qui était mortelle.
Vous revenez également dans votre livre sur les récentes évolutions ?
Il y a également eu des évolutions surprenantes comme la FIV ou, plus récemment, la greffe d’utérus. Et il y a eu une première naissance en France grâce à cette greffe. Ce sont des avancées techniques qui posent réflexion : il faut prendre le recul, évaluer, voir ce qui est bien ou pas bien… Ces nouveautés ouvrent complètement le projet d’enfant.
Du coup quelles seront les grandes nouveautés de demain ? Est-ce la GPA par exemple ?
Ce n’est pas une avancée médicale. C’est une avancée sociétale. Je ne suis pas pour la GPA car je pense que c’est une exploitation de la femme qui doit louer son corps, qui est commercialisé… On cherche la GPA éthique. Depuis 25 ans que cela existe dans le monde il n’y a pas un seul exemple. Je pense que les avancées de demain, d’un point de vue médical, consistent d’abord à consolider les acquis d’aujourd’hui. C’est-à-dire essayer de diminuer les effets négatifs, parce qu’il y en a. Et c’est améliorer l’organisation de la santé : développer des consultations avant, des consultations après… Faire en sorte que ce soit le plus fluide et le plus poétique possible.
Qu’en est-il de la place du père aujourd’hui ?
J’avais connu des maternités en Russie dans lesquelles sous prétexte de risque d’infection, les hommes ne pouvaient pas rentrer et voyaient leur bébé uniquement par le biais d’un écran TV. L’absence de contact, l’absence de lien, l’absence de poésie sont regrettables. Au moment de l’accouchement, quand vous regardez dans les yeux une maman ou un papa, vous avez cet espèce d’image fluide qui dure très peu de temps, où l’on atteint le nirvana.
Une histoire de la naissance, en coédition Grasset et France Culture , 20€.
A noter:
Le livre est à écouter sur France Culture.fr et l’application Radio France sous la forme de 32 épisodes de 14 minutes.