« J’ai accouché toute seule de mes jumeaux »
La maison des Maternelles- 23 min 42 s
- extrait
- tous publics
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En avril 2020 Stéphanie apprend qu’elle attend des jumeaux. Déjà maman d’un petit Axel de 2 ans, la nouvelle est un choc. Mais, très bien suivie, la grossesse se passe le mieux possible. Du fait de la gémellité, on prévient Stéphanie qu’elle sera déclenchée avant le terme. Et période de crise sanitaire oblige, les restrictions sont nombreuses comme se souvient la mère de famille :
« Quand on m’a donné la date du déclenchement, on m’a tout de suite prévenue que le papa ne pourrait pas rester pendant le travail, à cause du Covid et qu’il pourrait revenir au moment de la poussée. On m’avait aussi expliqué que je pousserais pour le premier bébé et que pour le deuxième le médecin devrait le sortir car il était en siège. On m’avait aussi dit que pour les grossesses gémellaires on donnait la péridurale tôt, et que j’aurai une grosse équipe autour de moi : des internes, 2 sages-femmes, 2 auxiliaires de puériculture, l’obstétricien… »
Du monde à la maternité
Mais rien ne va se passer comme prévu. Quand elle atteint 36 semaines d’aménorrhée, Stéphaie se rend à la maternité pour le déclenchement. De nombreux accouchements sont en cours, Stéphanie doit patienter. Puis, après examen, on lui pose un ballonnet pour faire mâturer son col : il est 17 heures. L’interne lui explique qu’elle va être surveillée pendant 2 heures puis qu’elle sera conduite en chambre pour la nuit. Durant cette attente la future mère ressent des contractions qui se rapprochent. À 19h20 on l’informe que sa chambre est en train d’être préparée :
« On m’enlève le monitoring et on me dit de ne pas m’inquiéter, qu’on va bientôt me monter en chambre. Je suis encore au téléphone et je dis à mon conjoint que les contractions sont quand même plus douloureuses. Il calcule : c’est toutes les 4 minutes. Il me conseille de sonner pour que quelqu’un me renseigne sur l’avancement du col, mais personne n’arrive. Je me dis juste – vu le monde à mon arrivée aux urgences – qu’ils sont occupés, que des femmes accouchent, et moi je ne me sens pas non plus hyper mal, donc je me dis : "Pas grave !" »
Les minutes passent, la douleur s’intensifie. Stéphanie sort de la chambre et trouve une infirmière à qui elle demande d’examiner son col. Cette dernière ne peut s’occuper d’elle, mais lui promet qu’elle va envoyer quelqu’un. Une heure plus tard, une sage-femme arrive :
« Je lui explique que j’ai des contractions très fortes et rapprochées mais elle me dit que beaucoup de femmes sont en train d’accoucher et qu’elle doit les faire accoucher pour pouvoir me faire passer en salle de travail ensuite. Elle me promet qu’elle repasse tout à l’heure pour regarder mon col, et en attendant elle me ramène un ballon et me conseille de prendre une douche car ça va me faire du bien. »
Soulager les contractions
Stéphanie reste plus d’une heure sous la douche pour supporter les contractions qui sont de plus en plus violentes. Elle se dit que c’est normal car c’est une grossesse gémellaire. Sauf que ces contractions sont celles de l’expulsion. Vers 23h20, quand elle sort de la douche une sage-femme vient l’ausculter. Elle lui dit que son col est à 3 centimètres et qu’elle va lui préparer une salle c’accouchement. Elle lui conseille d’appeler son conjoint pour qu’il vienne :
« Je me relève du lit, je l’appelle, et comme il y avait un lavabo dans la salle je m’appuie dessus car mes contractions sont très fortes. Je lui dis : "Dépêche-toi de venir, on me passe en salle, je souffre vraiment beaucoup." Et là j’ai une très forte contraction, je lui dis : "Je ne peux plus te parler", et je raccroche. »
Un accouchement surprise
Tout va alors s’enchainer très vite :
« Je suis debout face au lavabo avec les jambes un peu fléchies, j’essaye de maîtriser mais là je ressens une nouvelle contraction et je perce la première poche des eaux… Je sonne pour qu’ils me mettent une perfusion pour éviter l’infection, et là je sens une deuxième contraction même pas 1 minute après. J’ai alors une énorme envie de pousser. Je ne comprends pas ce qu’il se passe ! Mais je n’arrive pas à me retenir, je pousse, et là je sens la tête du premier bébé sortir. Tout se passe très vite. Je l’attrape avec les 2 mains, il se met à pleurer… Dans ma tête je me dis : "Tu es en train d’halluciner car la douleur est trop forte, tu n’accouches pas !" »
Quelques secondes après, une troisième contraction la saisie :
« La deuxième poche des eaux éclate… Là je me dis que le deuxième bébé va arriver. J’ai juste le temps de caler mon bébé dans ma main gauche et j’attrape le second bébé avec ma main droite : il pleure tout de suite aussi, ce qui me rassure ! Comme il est sorti en siège je l’ai sûrement attrapé par les fesses mais je ne sais pas comment j’ai fait car ça glissait quand même avec le liquide sur eux ! C’était l’instinct de survie… »
Deux bébés en bonne santé
Stéphanie se met alors à crier à l’aide car personne ne répond quand elle sonne. Une équipe de 6 personnes se présente dans l’urgence. Le personnel se rend compte que la sonnette était cassée… Ils prodiguent à Stéphanie les premiers soins ainsi qu’à ses 2 fils Loen, le premier qui pèse 2,2 kilos et Eden, le second qui pèse 1,8 kilo. Le papa se présente quelques minutes plus tard quand l’équipe est en train de recoudre Stéphanie. Pensant assister à l’accouchement, il hallucine en découvrant ses bébés en couveuse avant qu’ils soient placés en néonatalogie. Stéphanie va ensuite être suivie par une assistante sociale, un psy et la cheffe du bloc pour reparler du déroulé, des couacs… Des conversations qui ont été bénéfiques :
« Quand j’en parle aujourd’hui, je raconte l’histoire comme si j’étais une warrior et je me dis que j’ai de la chance que ça se soit bien terminé. J’ai quand même le mérite de dire que j’ai donné naissance à mes bébés toute seule, je le vois comme ça ! »