Enfants et Covid-19 : un pédiatre-infectiologue répond à vos questions
La maison des Maternelles- 12 min 38 s
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Alors que le protocole sanitaire dans les écoles vient de changer depuis ce matin, Santé Public France annonce que les enfants représentent moins de 5% des cas de Covid, majoritairement peu graves et asymptomatiques. Robert Cohen, pédiatre infectiologue à l’hôpital intercommunal de Créteil, confirme ce chiffre et l’explique :
« Les enfants ne sont ni les vecteurs de la maladie, ni un groupe important pour la maladie. Ils sont moins souvent contaminés que les adultes, et même quand ils sont contaminés, ils font beaucoup moins de maladie. Parce qu’on peut être contaminé en faisant une maladie, ou non. Eux, le plus souvent ils ne font pas de maladie. Et enfin, ils sont aussi moins contaminants pour les autres, entre eux et vers les adultes. »
Comment expliquer cette immunité chez les enfants ?
« Il y a pleins de raisons. La première, c’est qu’on sait qu’ils ont moins de récepteurs au virus dans le nez. C’est-à-dire que le virus va moins avoir tendance à s’accrocher sur les sinus. La deuxième, comme il ne vous a pas échappé que les enfants étaient souvent enrhumés et qu’ils toussaient souvent, ils ont une immunité entraînée, bien plus entraînée que celle des adultes. La troisième c’est que, comme ils ont fait d’autres infections à coronavirus, ils se défendent un peu mieux. Et enfin, il y a énormément de maladies infectieuses qui sont plus graves chez l’adulte que chez l’enfant. Il vaut mieux attraper la varicelle avant 10 ans qu’à l’âge adulte. Pour les oreillons, pareil. La rougeole, c’est pareil. Donc ce n’est pas vraiment une surprise sur ce point-là. Et nombre d’études démontrent qu’ils sont moins contagieux -alors je précise que "moins contagieux" ne veut pas dire "pas contagieux" ! »
Les parents d’enfants en bas âge sont-ils plus immunisés ?
« C’est une hypothèse qui est plus que solide. Votre immunité est entraînée par les enfants qui sont à votre contact, on le sait depuis extrêmement longtemps. Vous attrapez des rhumes de temps en temps, c’est clair. Mais entre ces rhumes là et la probabilité de maladies infectieuses graves, il y a une différence. Donc le contact avec les virus banaux est nécessaire à la construction d’une immunité chez l’enfant et permet aussi aux adultes d’avoir un éveil immunitaire. Donc fréquenter des enfants, c’est très bien. »
Que faire si notre enfant se réveille le matin avec de la fièvre ?
« On ne le met pas à l’école. Un enfant malade aujourd’hui, le système ne peut plus se permettre d’accepter comme il acceptait au début. On est obligé de se prendre 24 ou 48 heures pour prendre rendez-vous avec son médecin généraliste ou son pédiatre qui précisera s’il faut faire une PCR ou non. Quand les enfants n’ont pas été au contact avec un sujet Covid +, la probabilité que nous avons dans les études que nous réalisons en ce moment c’est moins de 1% de risque qu’il ait la PCR positive. Par contre, s’il a été contact dans la famille, on monte à 10% de risque. Et s’il a été contact à l’école, on est à un chiffre plutôt vers le 1%. Donc prélever tous les enfants qui ont le nez qui coule ou qui toussent à l’école, c’est non. On sort de l’école et on se donne le temps. C’est juste irréalisable. Vous savez aujourd’hui quel est le temps pour avoir un rendez-vous de PCR et quel est le temps de rendu ? On est dans la protection administrative et dans la protection des politiques. Ça devient insupportable. Les enfants vont payer extrêmement cher une maladie qui ne les touche quasiment pas. Même si c’est clair qu’il faut quelques règles d’hygiène dans les classes et on ne mélange pas toutes les classes ensemble. Si l’enfant est malade, on va le garder pour savoir comment ça évolue, pour faire le point. Vous vous rendez compte, pendant l’hiver ils vont avoir 7, 8, 9, 10 PCR pour un enfant malade en crèche ? Et même si c’était des tests salivaires, imaginez les coûts et le faible rendement de tout ça. »
Trouvez-vous les enfants perturbés par la situation ?
« Je les trouve perturbés en consultation, clairement. C’est-à-dire que les enfants sont inquiets. Ils voient bien. On a été confiné… On a peur des autres… Les classes ferment, de temps en temps c’est les écoles -une chose qui ne faudrait jamais faire. Donc ils sont très inquiets. En consultation, ils témoignent de leur anxiété. Même les parents qui discutent entre eux… Les enfants sont des éponges : ils sont complètement poreux aux informations et il faut les protéger, les rassurer. J’ai vu un enfant de 4 ans et demi en consultation me demander : "Je ne vais pas mourir ?" Vous vous rendez compte pour nous d’entendre ça ? Ce n’est pas possible, on ne peut plus rester dans ce niveau d’angoisse pour les enfants. »
Risque-t-on d’être reconfiné ?
« Je pense que le risque que l’on soit de nouveau confiné est très faible. Mais même cette école en pointillé qui se profile -c’est-à-dire je ferme 15 jours la classe, je la rouvre 15 jours- va être extrêmement traumatisant pour les parents qui vont devoir assumer la garde. Alors j’entends bien le ministère dire on va assurer un nouveau système de garde. Mais quel est le sens d’un nouveau système de garde si je vais mettre des enfants ensemble ? C’est juste déplacer le problème. On arrive à une gestion de crise qui ne devient absolument pas adaptée aux circonstances, et pas adaptée aux enfants. »
Les enfants doivent-ils être vaccinés contre la grippe ?
« Il y a deux vaccins : celui du rotavirus que je conseille à tous les parents de faire parce que le Covid s’accompagne dans 30% des cas au moins de signes digestifs, de gastro-entérites. Si on peut éliminer la première cause de gastro-entérite, en tout cas la plus grave, il faut le faire. Le problème c’est qu’il n’est pas remboursé parce que là encore, l’administration ne suit pas. Le deuxième c’est la grippe. Nous on est favorable à la vaccination des enfants contre la grippe. Pas que nous, c’est une recommandation internationale. Le problème c’est : est-ce qu’on va avoir assez de vaccins grippe pour vacciner les enfants ? Donc on va passer d’une pénurie à éventuellement une autre. Pour les vaccins c’est difficile car il y a beaucoup de gens réticents comme vous le savez, donc il ne faut pas 60 millions de vaccins non plus. Mais on a un vrai risque de ne pas avoir assez de dose pour vacciner bien que le nombre de dose ait augmenté, il ne permettrait pas de vacciner tous les enfants -ce qui serait vraiment bien. »
Pour rappel, le vaccin contre la grippe est à faire idéalement avant la mi-novembre.