Grande précarité : le témoignage d'une mère
La maison des Maternelles- 1 min 43 s
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Fatou est la maman de Wandifa, 7 ans, Hadja, 6 ans, Elhadj, 4 ans et Fanta, bientôt 1 an. Faute de logement, son mari et elle ont vécu avec leurs enfants dans plusieurs chambres d’hôtel et passé certaines nuits dans la rue.
LMDM- En 2008, vous avez quitté le Sénégal pour rejoindre vos parents en France, vous étiez âgée de 19 ans. À 23 ans vous décidez de quitter le foyer familial, pourquoi ?
Fatou - J’avais rencontré un homme que j’aimais. Il n’est pas Sénégalais. Ma grand-mère avait choisi un autre mari pour moi. Alors, j’ai décidé de partir. On a d’abord vécu chez ma belle-mère. Mais il n’y avait pas beaucoup de place. Ma belle-mère avait 4 enfants qui vivaient encore chez elle. Et quand je suis tombé enceinte, il a fallu partir.
Quelle solution d’hébergement avez-vous trouvé ?
À 7 mois de grossesse, on m’a proposé un foyer mais je ne pouvais pas y aller avec mon mari. Et je ne voulais pas être séparée de lui. On n’avait personne qui pouvait nous accueillir. Mon mari n’avait pas de papier. Il travaillait au noir et n’était pas toujours payé. Donc on a appelé le 115. Ils nous ont trouvé un premier hôtel, puis un autre. On changeait tout le temps. 2 semaines ici. 2 semaines ailleurs. On appelait toute la journée le 115 pour savoir où on pourrait dormir, mais ça ne répond pas toujours car parfois ils sont saturés d’appels.
Après la naissance de votre fille aînée, Wandifa, vous n’aviez donc toujours pas de maison pour accueillir votre bébé. Vous deviez être très inquiète. Comment se passait la vie à l’hôtel ?
Oui, j’étais inquiète. En tout, je ne sais même pas combien d’hôtels on a connu. On ne sait jamais où on dormira le soir. Il faut toujours que la valise soit prête. Les hôteliers ont les clés. Ils rentrent dans la chambre quand on n’est pas là. On n’a pas de vie. On est tous dans la même chambre, les toilettes et les douches à l’extérieur. On ne peut rien faire à l’hôtel. On y va juste pour manger et dormir. Parfois il y a un micro-ondes mais ça ne marche mais toujours. Il faut trouver des solutions pour faire chauffer le lait. On a souvent mangé froid. La plupart des hôtels ne sont pas propres. On a connu un hôtel où il y avait des rats et des souris. Wandifa et Hadja avaient peur. Ils m’en parlent encore aujourd’hui.
Comment avez-vous géré la scolarité de vos enfants ?
On a vécu dans des hôtels qui étaient très loin de l’école ou de la crèche. Je devais lever les enfants à 5h20 et on partait à 6h20 de l’hôtel, 2h de bus, train, métro pour emmener les enfants le matin. Pareil le soir. Je les ai toujours emmenés. Ils n’ont raté qu’un jour, mais ils étaient fatigués.
Malgré vos appels répétés au 115 et alors que vous étiez avec vos enfants, ils n'ont pas toujours pu vous aider ?
On a appelé le 115 plein de fois, mais ils n’ont pas toujours pu nous trouver de solution. On a du dormir 3 jours dehors. On s’est abrité dans un parking. J’avais très peur. Quand tu es dehors avec des enfants, t’imagines tout. J’avais peur qu’on voie les enfants et qu’on me les retire. j’avais peur d’être séparé d’eux. Je n’aurais pas pu le supporter. J’ai souvent pleuré. Je me suis souvent demandé si notre vie allait changer un jour.
C’est important de dire que dans la galère, vous avez trouvé des mains tendues…
La psychologue de la PMI m’a beaucoup aidé. J’avais des idées noires. Sans elle, je ne serais pas là.
Après 4 ans de précarité, vous obtenez un contrat de travail et vous demandez un appartement du dispositif « louez solidaire ». Est-ce que vous pouvez nous raconter comment s’est passé la visite de l’appartement avec les enfants ?
Quand on a visité l’appartement, les enfants n’y croyaient pas. C’était magique pour eux. Ils me demandaient : « c’est notre chambre ? ». On était content. Aujourd’hui, on peut inviter leurs amis à la maison, fêter les anniversaires… Ils ont enfin des jeux (à l’hôtel, ils n’en avaient pas), un endroit à eux.
Normalement, vous aurez bientôt un logement à vous. C’est bientôt la fin de vos difficultés ?
Oui. Je ne sais pas quand. On a tellement galéré. Je ne suis toujours pas tranquille. J’ai toujours ça en tête.